Des jeunes entrepreneurs récompensés par la Fondation pour les générations futures

De gauche à droite, Benoît Derenne (Fondation pour les générations futures) avec les lauréats du Prix SE'nSE 2022: Adelaïde Biebuyck (Greenzy), Sander Steenacker et Hendrik Bekaert (OceanBites), Johan Corsini (Merciki) et Philippe Bijnens (Heau). © PG
Frederic Brebant Journaliste Trends-Tendances  

Portée par le désir de changer le monde, la Fondation pour les générations futures n’a rien d’une association gentiment utopiste. Chaque année, cette organisation belge libère près d’un demi-million d’euros pour soutenir de jeunes diplômés et entrepreneurs dans leurs idées de business pour une planète meilleure.

Un composteur d’intérieur pour les déchets organiques, un concept innovant de robinet de douche, un réseau d’entraide où l’argent n’existe plus et, enfin, la culture d’algues marines sur la terre ferme: derrière les noms Greenzy, Heau, Merciki et OceanBites, quatre start-up belges ont récemment brillé sous le feu des projecteurs médiatiques. Lauréates du prix SE’nSE 2022 , ces jeunes entreprises se partagent près de 100.000 euros – sous la forme de prêts subordonnés – pour aller plus loin dans leur aventure entrepreneuriale grâce au travail précieux de la Fondation pour les générations futures.

Depuis près de 25 ans, cette organisation soutient en effet les jeunes entrepreneurs, mais aussi les jeunes diplômés dans leur désir de changer le monde de manière responsable et durable.

Depuis près de 25 ans, cette organisation soutient les jeunes entrepreneurs, mais aussi les jeunes diplômés dans leur désir de changer le monde de manière responsable et durable.

“Comment pouvons-nous faire en sorte d’être les acteurs d’une transformation de la société par rapport aux défis qui sont immenses et qui ne vont que s’accentuer? interroge Benoît Derenne, directeur de la Fondation pour les générations futures. Notre mantra, c’est une démarche de pensée et d’action à 360 degrés qui conjugue quatre dimensions: sociale, environnementale, économique et participative. Aujourd’hui, il faut absolument avoir une vision complète de la situation et surtout appuyer les jeunes dans ce processus d’évolution. Voilà pourquoi nous travaillons à faire émerger de nouvelles idées, à financer ensuite les idées de ces jeunes au niveau du prototypage et à soutenir enfin de nouvelles start-up quand ces prototypes sont proches d’un marché.”

Doper l’esprit d’entreprendre

Fondée en 1998 par Benoît Derenne, la Fondation pour les générations futures se définit comme une “plateforme de philanthropie transformatrice” qui permet à ses partenaires, mécènes et donateurs, d’investir dans les projets de jeunes chercheurs et entrepreneurs. Cette fondation d’utilité publique, qui se veut “pluraliste et indépendante”, est active dans les trois Régions du pays et emploie aujourd’hui 15 personnes dédiées “à la transition de la société vers un mode de développement soutenable”.

Penser le futur autrement

Ambitieux, l’objectif de la Fondation est donc d’encourager l’esprit d’entreprendre et d’aider les jeunes à penser le futur autrement, en intervenant à trois stades différents: l’idée, le prototype et la commercialisation. Chacune de ces étapes cruciales est soutenue par un programme et des prix spécifiques que la plateforme décerne chaque année. Il y a d’abord les HERA Awards qui récompensent et valorisent des mémoires de master et des thèses de doctorat (une quinzaine de prix de 2.500 à 7.500 euros chacun).

Il y a ensuite le programme Prototyping the Future qui décerne une dizaine de bourses de 5.000 euros à des étudiants-entrepreneurs afin qu’ils développent le prototype de leur “innovation soutenable” (11 projets financés en 2022 via le Fonds Albert Vanhee pour les générations futures).

Et il y a enfin le prix SE’nSE soutenu par le Fonds philanthropique du même nom (SE’nSE pour Seed equity & sustainable entrepreneurship fund) et qui accorde des prêts subordonnés pour un montant global proche des 100.000 euros à des start-up prometteuses, afin de les accompagner dans leurs premiers pas sur le marché.

Visibilité et crédibilité

Initié par Pierre Mottet, président du conseil d’administration de la société IBA et également président de l’Union wallonne des entreprises, le prix SE’nSE a été décerné cette année à quatre start-up qui ont émergé parmi 29 dossiers de candidature. Dans les lauréates figure la wallonne Greenzy, fondée par deux ingénieures civiles, promouvant un composteur d’intérieur design qui broie et mélange les matières organiques afin d’obtenir du terreau “sans odeur et sans effort” (sic). “Ce prix est un gage de notoriété qui va nous donner beaucoup de visibilité et davantage de crédibilité, réagit Adelaïde Biebuyck, l’une des deux fondatrices de Greenzy. Nous sommes en pleine levée de fonds avec un objectif de 550.000 euros à atteindre et ce prêt nous permet non seulement de peaufiner le dossier, mais surtout de déclencher l’intérêt d’autres fonds durables pour atteindre justement l’objectif de notre levée de fonds.”

Un taux de réussite enthousiasmant

Boosté par ce prix, Greenzy s’apprête donc à franchir un cap dans le développement de son business model, en espérant que l’aventure entrepreneuriale se transforme en succès. Actuellement, la start-up travaille sur la finalisation de son produit et sur son industrialisation, en espérant pouvoir commercialiser ses 200 premiers composteurs d’intérieur l’été prochain.

En six éditions, seuls trois projets n’ont pas abouti sur 24 entreprises lauréates, ce qui est plutôt enthousiasmant.”

“Pendant 18 mois, les lauréats de SE’nSE ne payent aucun intérêt sur le prêt subordonné, rappelle Benoît Derenne. Le taux passe à 5% sur une durée de 36 mois, mais notre objectif est de récupérer rapidement cet argent pour pouvoir apporter un coup de pouce à d’autres start-up en devenir. En six éditions, seuls trois projets n’ont pas abouti sur 24 entreprises lauréates, ce qui est plutôt enthousiasmant. En revanche, pour les autres soutiens financiers qui récompensent des thèses et encouragent ensuite le prototypage, il s’agit de dons pour des projets qui, une fois sur deux, ne vont pas aboutir. Mais ce n’est pas grave car le message principal que l’on veut envoyer à tous ces jeunes est le suivant: on croit en vos capacités!”

Des concepts inédits

Au printemps dernier, une dizaine d’étudiants-entrepreneurs ont été honorés du prix Prototyping the Future pour les aider à passer du stade de l’idée innovante à l’étape du prototype. Les 11 lauréats de 2022, récompensés avec une bourse de 5.000 euros chacun, explorent différents secteurs de l’économie mais s’illustrent toujours avec des initiatives durables et originales. A Liège, le projet Ironi-La Drècherie entend ainsi réaliser “du mobilier contemporain en réutilisant de la drêche brassicole” (les résidus des céréales issus du brassage de la bière). A Bruxelles, les étudiants-entrepreneurs de DetectIR ont imaginé “un appareil médical simple et précis pour faciliter la localisation des veines”. A Gand, Thermo-Light a développé “un phare pour vélo alimenté par la chaleur du corps”, tandis qu’à Louvain-la-Neuve, les trois complices de Zafi Cycles se sont mis en tête de fabriquer des cadres de vélos “100% bois de la forêt de Soignes”.

“A la Fondation pour les générations futures, nous sommes stupéfaits par toute l’énergie de ces jeunes, s’enthousiasme le directeur Benoît Derenne, et nous nous réjouissons de pouvoir compter sur des partenaires qui nous font confiance et qui ont une vision qui est elle-même inspirante. La Fondation, c’est une rencontre entre des donateurs, des mécènes, des acteurs industriels et éventuellement quelques subsides sur projet qui donnent naissance à de belles aventures. Donc, c’est grâce à une très grande majorité d’apports privés que l’on peut faire vivre cette plateforme philanthropique dans sa mission de transformation de la société.”

Un nouveau Fonds

Chaque année, les donateurs et partenaires industriels (parmi lesquels on compte des entreprises comme Cosucra, EVS, IBA, Technord, Expanscience, Eurofins ou encore Triodos) permettent à la Fondation pour les générations futures de libérer entre 400.000 et 500.000 euros pour financer des projets d’innovation durable sous la forme de dons, de prêts ou de prises de participations. Mais bientôt, cette somme sera considérablement augmentée puisque la Fondation s’apprête à accueillir un nouveau Fonds philanthropique lancé par un partenaire franco-japonais.

“Ce Fonds baptisé Shinju accordera, à l’instar du Fonds SE’nSE, des prêts subordonnés à hauteur de 200.000 euros dans les thématiques de l’agroalimentaire et de la sylviculture, confie le directeur Benoît Derenne. Nous lancerons d’ailleurs un appel à projets dans quelques jours pour soutenir des projets durables dans ces matières. Je m’en réjouis car cela va doubler notre capacité financière à soutenir des start-up et cela démontre surtout que des gens continuent à s’associer à la Fondation. Le concept de philanthropie transformatrice est plus que jamais vivant.”

L’exemple Ecopoon

Lancée par les étudiants-entrepreneurs Maxime Vanderheyden et Cyril Ernst, la start-up Ecopoon est l’une de ces belles histoires soutenues par la Fondation pour les générations futures. En 2018, les deux complices terminent leurs études à HEC-Liège et s’indignent des tonnes de couverts en plastique jetés chaque année dans les festivals de musique. Ils développent alors l’idée d’une cuillère qui se mange et rejoignent le VentureLab, l’incubateur liégeois qui accompagne les étudiants et les jeunes diplômés dans l’entrepreneuriat. C’est via cet écosystème que Maxime et Cyril découvrent la Fondation pour les générations futures. Ils y présentent leur concept Ecopoon, “une gamme de couverts comestibles et écologiques produite en Belgique à partir d’ingrédients locaux”, et décrochent en 2020 une bourse de 5.000 euros dans le cadre du programme Prototyping the Future.

“A ce moment-là, c’était une aide très précieuse qui nous a permis de développer un premier prototype de fabrication de cuillères, se souvient Maxime. Cela nous a donné un peu de visibilité et nous avons surtout pu vendre nos premiers couverts comestibles à des particuliers grâce à une première machine pour les fabriquer.”

Maxime Vanderheyden et Cyril Ernst, fondateurs d'Ecopoon.
Maxime Vanderheyden et Cyril Ernst, fondateurs d’Ecopoon.© PG

Le bouche à oreille et la start-up s’installent. Un an plus tard, les deux entrepreneurs repartent à l’assaut de la Fondation pour participer cette fois au prix SE’nSE. Leur démarche séduit à nouveau le jury et le duo reçoit un prêt subordonné de 25.000 euros. Une étape décisive qui leur permet de s’installer dans un nouvel atelier à Battice et de faire construire une nouvelle machine de production, sur mesure, à plus grande échelle: “Avec ce double soutien, Ecopoon a gagné en crédibilité et ce prêt nous a aussi beaucoup aidés dans notre mission, conclut Maxime. Notre entreprise grandit et nous avons aujourd’hui des perspectives intéressantes en termes de volumes.” Histoire à suivre, donc…

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