COP15: tout ce que les entrepreneurs doivent savoir de l’accord ambitieux sur la biodiversité

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Voici ce que les entrepreneurs devraient retenir du sommet de la COP15, qui, après quelques rebondissements imprévus, a débouché sur un accord étonnamment ambitieux.

1. Avec 30 par 30, l’objectif est clair

Au coeur de l’accord se trouve le chiffre 30 : d’ici à 2030, 30% des terres et 30% des océans devraient être protégés. Aujourd’hui, les chiffres sont respectivement de 17% et 10%. Ces 30 %, selon les scientifiques, sont un minimum pour endiguer la perte de la biodiversité.

Or, la perte de biodiversité est aussi un risque économique. Le rapport 2022 du Forum économique mondial sur les risques montre que les personnes interrogées considèrent l’absence d’action en faveur du climat, les conditions météorologiques extrêmes et la perte de la biodiversité comme les trois principaux risques pour les dix prochaines années. Il est maintenant temps d’aborder ces problèmes, la preuve en a été faite par 30.

2. Un nouveau cadre mondial est désormais en place.

Ines Verleye, responsable technique de la délégation belge à la COP15, estime que l’avancée la plus importante de ce sommet est qu’un nouveau cadre mondial clair ait été posé. Les négociateurs ont tiré les leçons des erreurs du sommet de 2010. “Ensuite, il y avait des objectifs ambitieux, mais seuls ceux concernant les zones protégées ont donné des résultats. La biodiversité s’est dégradée depuis 2010”, a-t-elle expliqué, lors d’un appel vidéo avec nos confrères du magazine Trends, après une nuit blanche de négociations. “La grande tragédie est que la société n’ait pas adopté les objectifs de 2010. Ainsi, si nous voulons éviter le même échec, nous devons dès maintenant garantir un cadre transformateur qui s’intéresse également aux 70 % restants.”

Cela n’a en effet guère de sens de protéger 30 % de la nature, tout en laissant ailleurs se poursuivre des pratiques qui dégradent la biodiversité. Dans les années à venir, notre façon de produire des aliments, de fabriquer des produits, de concevoir des villes, etc. sera de plus en plus confrontée à l’impact qu’elle a sur la biodiversité. Comme pour l’accord de Paris sur le climat, les flux financiers joueront un rôle important à cet égard. Tous les deux ans, un nouveau sommet permettra d’affiner ce nouveau cadre mondial.

3. Une nouvelle législation et un plan national pour la biodiversité

Les entreprises, prévoyantes et résilientes, peuvent se préparer à la nouvelle législation qui découlera de ce fameux cadre mondial pour la biodiversité, déclare Koen Stuyck, porte-parole du WWF. L’ONG est membre de la coalition belge pour la biodiversité, aux côtés de BOS+, Greenpeace, Natagora, Natuurpunt, Canopea et Bond Beter Leefmilieu.

L’accord sur la biodiversité n’est juridiquement pas contraignant. “Toutefois, tous les pays membres vont désormais élaborer des plans de biodiversité dans lesquels ils fixeront des objectifs et alloueront des ressources financières pour atteindre ces objectifs”, explique Koen Stuyck. La coalition pour la biodiversité voit trois priorités, explique-t-il : “Réduire l’impact de la production et de la consommation sur la perte de biodiversité mondiale, protéger les zones les plus précieuses du sol national et restaurer de manière spectaculaire la nature afin que ses habitants puissent vivre et prospérer dans un environnement sain”.

4. les entreprises doivent apporter leur contribution

De nombreuses entreprises ont déjà pris des mesures. À court terme, vous pouvez examiner ce que vous pouvez faire dans vos propres locaux. Koen Stuyck énumère quelques exemples: “Verduriser les parkings, créer des toits de verdure, récupérer l’excès d’eau, attirer les insectes et les hérissons, réutiliser l’eau de pluie pour les toilettes. Il est possible de faire beaucoup de choses qui rendent les entreprises plus attrayantes pour les clients, les employés, les actionnaires et les gouvernements à court terme. Les municipalités seront heureuses de voir arriver ce type d’entreprises.”

Plus en profondeur, les entreprises peuvent examiner leur chaîne de production, explique Koen Stuyck. “Vos fournisseurs utilisent-ils des matériaux durables ? La déforestation a-t-elle fait son entrée dans la fabrication de votre produit ? Faites-vous le pari des matières premières recyclées ? Les entreprises ont un objectif. En plus de devenir neutres pour le climat, elles prendront également leurs responsabilités en matière de biodiversité. Ce n’est qu’une question de temps avant que l’Europe et la Belgique ne proposent de nouvelles réglementations.”

Ines Verleye, spécialiste de la biodiversité, ajoute : “Le nouveau cadre mondial pour la biodiversité comprend également des objectifs qui obligent les entreprises à inclure leur impact sur la biodiversité dans leurs rapports.”

5. Réformer les flux de subventions pour financer l’accord

“Pour financer le déficit en matière de biodiversité, il faut 700 à 800 milliards de dollars”, déclare Ines Verleye. “Aujourd’hui, 500 milliards sont dépensés chaque année en subventions qui nuisent à la biodiversité. Si nous réformons ces 500 milliards, vous pourrez utiliser cet argent pour réparer les dommages causés.”

Chaque pays devra examiner ses propres flux de subventions, mais il est évident que les leviers les plus importants se trouvent là. Subventionner les énergies fossiles ne nous aidera pas à atteindre les objectifs en matière de climat ou de biodiversité. L’Union européenne a également déjà fait savoir, dans le cadre de son “Green Deal”, que notre modèle classique d’agriculture industrielle devait être réformé. La stratégie “de la ferme à la fourchette” du Green Deal contient des objectifs clairs pour rendre le système alimentaire de l’UE plus durable d’ici 2030: réduire de moitié l’utilisation des pesticides, diminuer d’un cinquième les engrais, enrayer le déclin des insectes et garantir qu’un quart des terres agricoles sera biologiques.

“Nous ne pouvons plus investir dans des processus de production qui nuisent à la biodiversité”, déclare Ines Verleye. “Pensez aux chaînes de production qui commercialisent des produits bon marché. Nous sommes aujourd’hui trop poussés vers les profits à court terme, or ceux-ci n’incluent pas la perte de biodiversité.”

6 De la diversité des espèces aux brevets des nouveaux médicaments

La convention sur la biodiversité a un large champ d’application, de la conservation de la biodiversité à l’utilisation équitable des ressources naturelles. Il s’agit aussi bien de protéger la diversité des espèces que les brevets sur les médicaments. Le budget consacré à la protection de la diversité des espèces augmente de manière sensible, pour atteindre 20 milliards par an d’ici 2025 et 30 milliards d’ici 2030.

En ce qui concerne les médicaments, la COP15 a instauré un mécanisme financier permettant de partager les bénéfices des nouveaux médicaments, vaccins et produits alimentaires développés à partir des informations génétiques d’êtres vivants. En effet, pour développer de nouveaux vaccins, médicaments ou faire des avancées en matière de nutrition, les séquences génétiques de plantes, d’animaux et autres organismes vivants jouent un rôle crucial.

Afin de partager équitablement les bénéfices des percées dans les domaines de la biotechnologie et des sciences de la vie qui nécessitent une biodiversité numérique, un mécanisme financier, baptisé Digital Sequence Information (DSI), a été mis au point. L’accord est intervenu après que des pays du Sud, en particulier, aient demandé une compensation pour les produits développés à partir de la biodiversité de leur pays.

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