Bataille belgo-belge pour la taxation des voitures de leasing

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Christophe De Caevel
Christophe De Caevel Journaliste Trends-Tendances

La Wallonie perd plus de 30 millions par an, car les voitures de leasing sont immatriculées en Flandre ou à Bruxelles. Cela pourrait bientôt changer, au moins pour les véhicules utilisés par les pouvoirs publics, annonce le ministre du Budget Adrien Dolimont (MR).

“Il me semble que la Wallonie, pour l’ensemble de son activité publique, en ce compris la dimension communale, pourrait imposer le principe de l’immatriculation en Wallonie par le preneur de leasing.” Cette petite phrase du ministre wallon du Budget Adrien Dolimont (MR) en réponse à une question écrite du député Jean-Luc Crucke (MR), pourrait faire pas mal de remous dans le monde du leasing automobile.

Actuellement, les véhicules de leasing sont immatriculés, et donc taxés, sur base de la localisation de la société de leasing, ce qui se traduit quasi-systématiquement par une taxation à Bruxelles ou en Flandre. Une étude menée en 2021 par les services du gouvernement wallon, avec le concours du Tax Institute de l’ULiège et du Dulbea (ULB), avait chiffré le manque à gagner pour la Wallonie à 47 millions d’euros par an par rapport à une fiscalité du leasing applicable dans le chef du bénéficiaire du véhicule (92.889 voitures de leasing seraient utilisées par des résidents wallons, chiffres septembre 2020) ou de 34 millions d’euros par rapport à une imposition dans le chef de l’employeur preneur du leasing.

Le gouvernement wallon s’est logiquement tourné vers les deux autres régions mais celles-ci n’ont, tout aussi logiquement, guère montré d’intérêt pour un arrangement qui leur ferait perdre plusieurs dizaines de millions d’euros au profit de la Wallonie. “Une modification du régime actuel de taxation des véhicules des sociétés de leasing en Région wallonne paraît délicate à obtenir mais je continuerai à mettre tout en oeuvre et à maintenir le sujet à l’agenda des rencontres avec mes collègues des autres régions”, a assuré Adrien Dolimont.

Au vu de sa situation budgétaire, la Wallonie ne peut cependant pas se permettre d’attendre le bon vouloir de ses voisines pour percevoir les taxes de circulation et de mise en circulation des véhicules de leasing. Elle pourrait envisager une imposition spécifique des véhicules de leasing utilisés par des personnes résidant en Wallonie mais, concède le ministre, “cela ne passerait vraisemblablement pas le cap du Conseil d’Etat qui devrait invoquer le principe d’égalité et de non-discrimination”.

Il faudrait alors s’orienter plutôt vers une révision générale des taxes de circulation, remplaçant les actuelles TM et TMC par de nouvelles dispositions, qui toucheraient également les véhicules de leasing. “Il s’agit d’une hypothèse qui peut s’envisager, mais elle relève clairement d’un projet de gouvernement, poursuit Adrien Dolimont. Or, si la Déclaration de politique régionale de 2019 prévoit bien une réforme profonde de la fiscalité automobile, qui relève par ailleurs de la compétence du ministre de la Mobilité (Philippe Henry, Ecolo, NDLR), elle ne comprend pas d’orientation en ce sens.”

Le ministre sort alors un lapin de son chapeau en reprenant l’étude de 2021. Celle-ci rappelle en effet que la réglementation autorise la demande d’immatriculation des véhicules tant par le propriétaire (en l’occurrence la société de leasing) que par l’utilisateur du véhicule. Dans les faits, c’est toujours la première option qui est retenue. Mais le ministre a bien l’intention de faire appliquer la seconde option pour tous les véhicules de leasing des pouvoirs publics wallons, qu’ils relèvent des sphères régionales, provinciales ou communales. “Ceci est déjà de facto d’application en cas de leasing financier, mais ne l’est pas lors de la conclusion d’un leasing opérationnel”, ajoute Adrien Dolimont. Et si les entreprises actives en Wallonie devaient décider, dans une sorte d’élan patriotique régional, de suivre le mouvement et d’immatriculer leurs véhicules dans la région d’utilisation, le responsable des finances régionales n’aurait certainement pas à s’en plaindre. Ses collègues flamand et bruxellois risquent, en revanche, de faire la moue.

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