Avec la victoire de Boris Johnson, tout reste à jouer pour l’économie britannique

Boris Johnson

La victoire écrasante de Boris Johnson aux élections législatives britanniques va permettre de réaliser le Brexit d’ici fin janvier, ce qui devrait apporter un bol d’air à la cinquième économie mondiale.

Mais même si le chef du gouvernement conservateur parvient rapidement à réaliser sa promesse phare, l’économie britannique n’est pas prête de voir la fin des incertitudes, car vont s’ouvrir pour des mois, voire des années, de périlleuses négociations commerciales avec l’UE.

A court terme les investisseurs étaient ravis: la livre, baromètre des marchés sur le Brexit, s’est envolée dans la nuit, dépassant un temps 1,35 dollar.

Même si un grand nombre de chefs d’entreprises ont voté contre une sortie de l’UE, la plupart d’entre eux, à l’instar de la City of London, demandent à présent avant tout la fin du brouillard qui plombent les investissements et la consommation depuis le référendum, avec une croissance aujourd’hui au point mort.

Carolyn Fairbairn, directrice générale du CBI, la principale organisation patronale britannique, a d’ailleurs immédiatement appelé sur Twitter Boris Johnson “à utiliser son solide mandat pour rebâtir la confiance et mettre fin à un cycle d’incertitude” sur le Brexit.

La large majorité des conservateurs “va permettre à l’économie de respirer, comme elle en avait tant besoin, au cours des six prochains mois”, estime Samuel Tombs, économiste chez Pantheon Macroeconomics.

Au-delà du Brexit, le nouveau gouvernement devrait ainsi marquer “la fin d’une décennie d’austérité, et l’économie devrait bientôt bénéficier d’un stimulus budgétaire de taille”, remarque Ruth Gregory, de Capital Economics.

Les conservateurs ont promis d’injecter des centaines de millions de livres d’investissements dans les hôpitaux et les transports notamment, promettant une “révolution des infrastructures”, au risque de provoquer un bond de la dette et des déficits.

En ce qui concerne l’engagement du Royaume-Uni à atteindre la neutralité carbone en 2050, les conservateurs se montrent en revanche beaucoup plus timides que les travaillistes, qui avaient promis un “Green deal” et des investissements se chiffrant en centaines de milliards de livres dans la transition énergétique.

Croissance lente

Jonathan Portes, économiste du centre de réflexion sur le Brexit The UK in a changing Europe, n’attend pas de franche embellie: il ne prévoit pas de “tsunami d’investissements”, comme l’a évoqué Boris Johnson, et s’il y “aura peut-être un sursaut de la consommation – ou de l’immobilier – il sera modeste”, ajoute-t-il.

D’après lui, “l’économie britannique va rester sur une trajectoire de croissance lente”.

“Les conservateurs prévoient des hausses de dépenses gouvernementales mais pas assez pour contrebalancer les dégats subis par les services publics ces dix dernières années”, conclut-il.

Avec l’accord négocié par Boris Johnson, l’ensemble du Royaume-Uni y compris l’Irlande du nord vont quitter l’UE à l’issue d’une période de transition d’un à trois ans pour ne garder qu’un “accord de libre-échange limité”.

Le centre de réflexion The UK in a Changing Europe prévoit que l’accord de Boris Johnson pourrait faire “baisser le Produit intérieur brut par habitant du Royaume-Uni de 2,3% à 7%, comparé à s’il restait dans l’UE” sur une période de dix ans.

C’est proche des prévisions que le gouvernement britannique avait ébauchées lors d’un rapport il y a un an.

A plus long terme, le véritable enjeu sera l’issue des négociations sur un nouveau traité de libre-échange du Royaume-Uni avec l’UE, car il déterminera la relation pour des décennies du pays avec son principal partenaire commercial… Même si le gouvernement Johnson espère beaucoup des négociations avec d’autres pays, notamment les Etats-Unis.

Le CBI demande que le futur accord de libre-échange diminue le plus possible les droits de douane et les quotas pour garder la fluidité des échanges avec le plus gros marché d’exportation du Royaume-Uni, l’UE.

Jonathan Portes observe que même si un futur accord de libre-échange s’alignait sur l’Union européenne en termes de réglementations, avec des droits de douane minimaux ou nuls, et pas de quotas entre les transactions UE-Royaume-Uni, l’impact économique ne pourra être totalement amenuisé.

Le simple fait d’appartenir à des juridictions différentes crée des besoins de vérifications de conformité, avec à la clé des coûts, et des lenteurs administratives comme logistiques.

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