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Amnistie fiscale: “Si le gouvernement prétend faire mieux, pourquoi ne le fait-il pas tout de suite ?”
Parmi les mesures annoncées dans le cadre du fameux tax shift du gouvernement, figure celle de l’instauration d’une quatrième amnistie fiscale. Presque aucun détail n’a encore été fourni, et pour cause…
Comme pour la quasi-totalité de l’accord de juillet du gouvernement, ce n’est à ce jour qu’une annonce, et presque aucun détail n’a été fourni. Ce n’est vraisemblablement pas là un souci de discrétion de la part du gouvernement, mais tout simplement, à l’instar d’autres décisions, le signe que les partis de la coalition n’ont conclu à ce jour aucun accord sur les modalités de l’opération.
Il a seulement été annoncé que cette amnistie fiscale serait pour 2017, et c’est déjà bien surprenant. En effet, si la mesure est considérée comme souhaitable, et rentable pour le Trésor, et si en outre, comme on le dit, elle est destinée à être permanente, on voit mal pourquoi elle ne peut être introduite qu’en 2017. Le gouvernement veut-il vraiment se priver de recettes pour 2015 et 2016 ? Pourquoi avoir légalisé l’amnistie jusqu’à fin 2013 et à nouveau en 2017, et pas au cours des années 2014 à 2016 ?
Si le gouvernement prétend faire mieux, pourquoi ne le fait-il pas tout de suite ?
Il existe certes actuellement une pratique administrative, organisée par circulaire, qui permet à l’administration d’accepter les impôts correspondant à des sommes spontanément reconnues par des contribuables. Mais cette pratique, certes souvent satisfaisante, n’offre pas la même sécurité juridique qu’un système légalement organisé. Et si le gouvernement prétend faire mieux, pourquoi ne peut-il le faire tout de suite ?
Sur le plan des principes, on fait à nouveau valoir qu’une amnistie ne serait pas équitable à l’égard des contribuables qui ont payé leurs impôts régulièrement. L’argument serait pertinent s’il s’agissait d’effacer les dettes fiscales de ceux qui invoquent une amnistie. Mais l’on sait qu’il n’en est rien et qu’il n’en a jamais été question à propos des mesures de déclaration libératoire unique, de DLU bis ou ter. Le système belge de régularisation fiscale a toujours été fondé sur la règle que le contribuable doit payer tous les impôts dus non prescrits, au taux normal, plus une pénalité. Il n’implique donc aucune discrimination à l’égard des contribuables qui ont déclaré à temps leurs revenus, puisque ceux qui régularisent ceux-ci paieront le même impôt et en outre une pénalité.
On peut en revanche, logiquement, s’attendre à ce que la nouvelle amnistie fiscale ne soit en tout cas pas plus favorable que les précédentes, sans quoi ceux qui ont bénéficié de celle-ci se sentiraient victimes pour s’être mis en ordre plus tôt que les autres. Il faut donc imaginer que la pénalité sera en tout cas égale, voire supérieure, aux 15 % réclamés lors de la DLU ter.
Si le gouvernement maintient le principe, annoncé, d’une amnistie permanente, cela signifie qu’il sera désormais légalement possible de régulariser, indéfiniment moyennant le paiement de l’impôt et d’une pénalité, tout impôt impayé, pour autant qu’il s’agisse d’une démarche spontanée. Cela exclut bien sûr les aveux tardifs, arrivant par exemple après un contrôle fiscal ou même l’annonce de celui-ci. Le principe de la mesure paraît justifié.
La discussion ne peut alors porter que sur l’importance de la pénalité. Quand il s’agit de revenus professionnels ou d’autres revenus taxables globalement, cette pénalité s’ajoute à des impôts et charges sociales, qui représentent au total souvent près de 60 % du revenu. Si on y ajoute une pénalité de 15 %, sans parler parfois d’une régularisation supplémentaire en matière de TVA, cela veut déjà dire que l’Etat s’approprie les trois quarts du revenu perçu. Pour les revenus mobiliers, une pénalité de 15 % du revenu correspond, suivant les taux actuels, à une majoration de 60 % de l’impôt, qui est habituellement de 25 %. Est-ce vraiment une sanction trop légère ?
Une telle pénalité n’est en général pas inférieure au montant que paient les contribuables lorsqu’ils font l’objet d’une procédure de rectification de leurs revenus. Il ne serait pas logique de leur réclamer plus lorsqu’ils reconnaissent spontanément une irrégularité que lorsque les services fiscaux doivent se mobiliser pour constater celle-ci.
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