N’offrez plus de cadeaux à Noël !

Pour Joel Waldfogel, économiste américain, les présents de Noël ne satisfont généralement pas leurs destinataires. L’écart entre le prix réel des cadeaux et la valeur que leur attribuent les bénéficiaires est d’environ 18 %.

Noël ? C’est la loterie des cadeaux. Tout le monde ne tire pas les bons numéros. Un économiste de l’université du Minnesota, Joel Waldfogel, a étudié ce problème très saisonnier, et a consigné le résultat de ses recherches dans un petit ouvrage intitulé “Scroogenomics”, un titre inspiré par le personnage principal d’un conte de Noël de Charles Dickens, Ebenezer Scrooge, sur un homme qui détestait Noël. L’ouvrage de l’économiste a été publié en 2009, mais reste d’actualité….

Le livre est le résultat d’une série d’enquêtes entamées un peu par hasard avec ses étudiants, en 1993. “Début janvier, je leur ai demandé de dresser la liste des cadeaux qu’ils avaient reçus à Noël”, écrit l’économiste. Chacun doit détailler le prix des cadeaux, le montant qu’ils auraient été prêts à débourser s’ils les avaient achetés eux-mêmes et leur lien de parenté avec le donateur. Résultat du mini-sondage : la valeur attribuée aux cadeaux s’élevait à peine à 66 % de leur prix d’achat. Autrement dit, “les cadeaux détruiraient au moins un tiers de la valeur d’un objet donné”. Un chiffre revu à 18 à 20 % lorsque le professeur a creusé le sujet sur un échantillon plus large.

Bien sûr, ce hiatus n’est pas identique pour tout le monde. La satisfaction est plus importante pour les frères et soeurs, dont les cadeaux valent 99 % du prix d’achat pour les bénéficiaires, et les “significant others” (amis, petits amis, conjoints) qui excèdent même le prix avec 102 %. Bref, plus on est proche, plus avisé sera le choix. Par contre, les cadeaux des grands-parents, oncles et tantes, se situent, eux, plutôt vers 75 % de satisfaction – un cadeau de 100 dollars n’en vaut que 75 pour celui qui le reçoit !

Le phénomène n’est pas propre aux Etats-Unis. Pour l’Europe, l’auteur avance que le taux de déception avoisine les 9 %, tandis qu’en Amérique latine, il atteint 47 % ! L’Européen serait donc plus avisé dans ses choix, mais notre économiste reconnaît que l’échantillon utilisé n’est pas très grand dans tous les pays (chez nous, c’est Frank Verboven, de la KULeuven, qui s’est occupé de l’enquête).

Offrir de l’argent ou des bons d’achat pourrait s’avérer une solution pour contourner le problème – aux Etats-Unis, les enquêtes menées par Joel Waldfogel concluent que 8 % des cadeaux donnés le sont sous cette forme. Oui mais voilà, “des recherches en psychologie montrent que les dons en cash sont, dans beaucoup de circonstances, socialement embarrassants. Ils sont notamment particulièrement inappropriés pour les cadeaux offerts par des personnes jeunes à des personnes plus âgées”. Les bons d’achat seraient une meilleure alternative. Pourtant, eux aussi entraînent une perte car “environ 10 % de la valeur de ces bons n’est jamais utilisée. Les gens les oublient ou les perdent, ou achètent quelque chose d’un peu moins cher”, écrit Joel Waldfogel. Il existe toutefois une solide différence avec la perte de valeur ressentie pour les cadeaux. Dans ce dernier cas, il s’agit d’une perte sèche, subjective, qui n’est comptabilisée nulle part. Personne ne reçoit la différence. La situation est encore différente pour les bons d’achat non utilisés. Ils se transforment en bénéfice pur pour le magasin qui les a émis. De quoi “rebooster” le chiffre d’affaires selon l’article

Robert van Apeldoorn

Scroogenomics – Why You Shoudn’t buy Presents for the Holidays, Princeton University Press, 186 pages.

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