« L’impact sera très modeste » : les pires gaffes du patron de BP

© Reuters

La France a eu Didier Lombard, qui avait évoqué, en plein drame social chez France Télécom, la « mode » des suicides. Outre-Atlantique, un nouveau prince de la gaffe est né : Tony Hayward, patron de BP. Retour sur ses petites phrases qui ont brouillé la communication du groupe pétrolier.

La communication de BP, au moment où le groupe vit une crise historique, restera probablement dans les annales. Depuis l’explosion de la plateforme pétrolière Deepwater Horizon, qui a fait 11 morts et déverse chaque jour des millions de litres de pétrole dans le golfe du Mexique, le dispositif de gestion de crise du groupe fonctionne à plein. Partout, le groupe se confond en excuses. Il est présent sur tous les réseaux sociaux, Twitter et Facebook inclus, et répond à la presse comme aux internautes sans sourciller.

C’est un BP contrit qui se présente devant l’administration américaine et n’hésite pas à lancer de gigantesques campagnes de communication dans les médias américains pour prôner sa détermination à « limiter l’impact » de la catastrophe. Jusqu’à présent, si le groupe était parvenu à endiguer la marée noire, on aurait presque pu considérer qu’il avait fait une campagne de communication exemplaire : il a admis sa responsabilité dès les premières heures du drame et assuré avoir la situation bien en main.

En réalité, le groupe n’a pas arrêté de multiplier les erreurs. Son PDG n’y est malheureusement pas pour rien : il a été incapable d’estimer la gravité de la situation à sa juste mesure, d’adopter la posture du calme dans la tempête, et d’user d’une rhétorique destinée à restaurer la confiance. Désinvolte, larmoyant, autocentré et imprudent, Tony Hayward multiplie les gaffes depuis maintenant plus d’un mois. Et si la nouvelle mission de BP était d’arriver à faire taire son dirigeant ?

« Je voudrais retrouver ma vie d’avant », Climatebrad, 31 mai 2010

C’est la dernière en date, et pas la moins maladroite. « I would like my life back…« , cette petite phrase de Tony Hayward fait le tour du Web depuis quelques jours. Face aux caméras, Tony Hayward s’est excusé platement auprès des habitants du golfe du Mexique pour la « disruption massive » causée par la marée noire, avant d’assurer qu’il était le premier à vouloir que cela cesse pour retrouver sa vie d’antan et revoir sa Grande-Bretagne… Le Huffington Post ne compatit pas. Et la population locale encore moins.

« Que diable avons-nous fait pour mériter cela ? », New York Times, 29 avril

Le patron de BP a eu la dignité de ne pas lancer cette phrase devant un parterre de journalistes mais devant ses cadres dirigeants, et on l’en remercie. Manque de chance, elle a fini par fuiter dans la presse. Et ce sont toutes les familles des victimes, les pêcheurs, l’industrie du tourisme… qui ont dû se demander à leur tour ce qu’ils avaient fait pour mériter cela.

« Il est vrai que, depuis que le drame est arrivé, j’ai des difficultés à dormir », Times, 13 mai 2010

Là encore, le patron de BP a donné dans le mélo, en confessant à un journaliste du Times quelques problèmes de sommeil. Pas très « classe », surtout lorsqu’on dirige une des plus grosses entreprises au monde et que cette entreprise est en train de mettre à plat toute l’économie d’une région… et de tuer par la même occasion son écosystème.

« Cette fuite était minuscule en proportion de l’immensité de l’océan », Guardian, 14 mai 2010

Pour être tout à fait exact, la phrase authentique est un peu moins grotesque. Quoique : « Le golfe du Mexique est très grand et le volume de pétrole et de dispersant que nous y mettons est minuscule comparé au volume total de l’eau. » Rassurés ?

« Je pense que l’impact sur l’environnement de ce désastre sera très, très modeste », Sky News, 18 mai 2010

Malheureusement pour lui, depuis que cette phrase a été prononcée, la fuite n’a toujours pas été colmatée. En revanche, les estimations sur le nombre de barils de brut s’échappant chaque jour de la nappe de pétrole n’ont cessé d’augmenter. Au point de provoquer l’agacement non mesuré de l’administration américaine, qui a fini par se rendre compte que, depuis le début, le pétrolier donnait une estimation plus qu’approximative du nombre de litre de pétrole s’échappant chaque jour de la fuite.

« Nous ne pourrons l’emporter ici qu’en gagnant les coeurs et les esprits des populations locales »…

… a-t-il déclaré fièrement, ignorant apparemment que « les coeurs et les esprits » est une expression à tout jamais associée à la débâcle de la guerre du Viêtnam. Il est peut-être britannique mais ce n’est pas une excuse.

« Apollo 13 n’a pas entraîné la fin du programme spatial. Le crash de l’avion d’Air France au large des côtes du Brésil n’a pas entraîné la fin de l’industrie aéronautique », Guardian, 14 mai 2010

Faut-il s’en féliciter ? En tout cas, l’affirmation est des plus mal posées. Une question se pose de plus en plus : la marée noire ne pourrait-elle pas entraîner la chute du dirigeant de BP ?

Julie de la Brosse, L’Expansion.com

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