La saga du roman-photo

Tranchant avec ses habituelles propositions, le Musée de la photographie de Charleroi, présente un genre plus diversifié et signifiant que sa réputation à l’eau de rose ne le laisse croire.
« Le roman-photo a mauvaise presse. Le terme sous-entend tout à la fois niaiserie sentimentale, frivolité ou encore ingénuité. A ce jour, il n’a que rarement retenu l’attention des historiens de l’image, et moins encore celle des musées et des centres d’art. Grave erreur ! Car le roman-photo a pourtant bien des choses à nous dire. »
En prélude à l’exposition installée en ses murs pendant près de quatre mois, le musée carolo livre quelques lignes chargées de déminer les nombreux préjugés, attachés à ce qui n’est a priori qu’un sous-genre photographique, bien moins glorieux que le portrait ou le photojournalisme de guerre. Pourtant, depuis sa naissance en 1947 en Italie, le roman-photo a séduit des dizaines de millions de lecteurs/spectateurs, touchés par ce processus qui consiste à raconter une histoire avec des photographies et des bulles – sorte de BD où le dessin serait remplacé par l’image argentique, et plus récemment digitale. Pendant au moins deux décennies, les magazines proposant ces mini-feuilletons ont conquis une bonne partie de l’Europe. Ceux-ci n’ont pas complètement disparu puisque l’hebdomadaire français Nous deux, spécialiste du genre, tire toujours à près de 200.000 exemplaires.

Mais si les épisodes fleur bleue n’ont pas manqué de prospérer au fil des ans, l’expo de Charleroi montre, en deux parties, à la fois la richesse esthétique et la diversité des formats. Visuellement, il y a de vraies merveilles, par exemple le noir et blanc extrêmement sophistiqué des mises en scènes sixties du magazine italien Bolero, en 1962-1963 pour la série Il Giorno dell’odio. Ou l’usage à la même époque de l’ektachrome qui, parfaitement éclairé, donne des ambiances que n’aurait pas désavouées Fellini. Et puis, au-delà de ses récits amoureux, le roman-photo témoigne aussi de l’évolution des moeurs comme celle des revendications sociales ou féminines, y compris les satires fameuses d’ Hara-Kiri et du Professeur Choron, montrées dans une partie de l’expo… interdite aux moins de 18 ans.

Jusqu’au 22 septembre au Musée de la Photographie, www.museephoto.be
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