Préserver et transmettre un patrimoine n’est pas qu’une affaire financière

Karolien Haese dirige la GCEA Academy, située à deux pas de la gare de Rhode-Saint-Genèse.

Créée au sein de Gillion Crowet Estate Alliance, le nouveau holding de la famille Gillion Crowet Merode, la GCEA Academy entend permettre à tout un chacun de reprendre le contrôle de son patrimoine et sa transmission en se posant les bonnes questions. Soit remettre de l’humanité dans un processus souvent uniquement financier.

Au début du mois de janvier, Fednot, la fédération des notaires, faisait état d’un souhait de plus en plus marqué des Belges de contrôler ce qu’il advient de leur héritage. Ainsi, sur les neufs premiers mois de 2024, 59.727 testaments ont été enregistrés, soit une hausse de 5% par rapport à la même période en 2023 (56.740) et de 15% sur 2022 (51.918). Parallèlement, les pactes successoraux, introduits en 2018 pour réduire les conflits familiaux, ont, eux aussi, le vent en poupe (4.718 de janvier à septembre).

Cet héritage prend des formes très diverses quelle que soit la hauteur du patrimoine : immobilier, placements, collections, entreprise familiale, droits de propriété intellectuelle, santé, droits et images numériques, etc.

Dans la très vaste majorité des cas, cette transmission se ressent comme un devoir avec, à la clé, le sentiment de la nécessité d’optimiser financièrement et fiscalement le patrimoine. En réalité, cette vision financière est réductrice et n’est pas synonyme de robustesse et de durabilité. Elle exclut du débat les valeurs familiales, entrepreneuriales, voire sociétales des cédants et leur besoin de confort.

Remise en question

Depuis le début du 20e siècle, la famille Gillion émarge au cercle restreint des grands bâtisseurs belges. On lui doit des bâtiments bruxellois historiques comme l’INR à la place Flagey, le Résidence Palace, l’hôtel Plaza, l’hôtel de ville de Forest ou la galerie de la Toison d’Or. Confrontée à un certain nombre de défis, elle vient d’écrire, au terme d’une restructuration stratégique de son patrimoine, une nouvelle page de sa longue histoire en créant Gillion Crowet Estate Alliance (GCEA), le nouveau holding familial porté par Nathalie Gillion Crowet, l’épouse du prince Amaury de Merode, et par son fils Aurèle de Merode, représentant de la cinquième génération de la famille.

GCEA entend proposer une version plus holistique de l’immobilier qui intègre aussi les notions de durabilité et de responsabilité sociale. Si nous vous en parlons aujourd’hui, c’est que vient de se créer, au sein du holding, la GCEA Academy, une ASBL logée dans un magnifique bâtiment à deux pas de la gare de Rhode-Saint-Genèse et dirigée par Karolien Haese, avocate associée au sein du cabinet DCH Avocats. Depuis des décennies, et même lorsqu’elle fut CEO de la Clinique Saint-Jean à Bruxelles (elle a aussi fondé BHCT, une ONG internationale spécialisée dans la gestion de la santé et du patrimoine), elle se passionne pour la protection et la transmission des patrimoines quels qu’ils soient.

“Même si c’est un projet que je porte en moi depuis longtemps, l’Academy est née à la demande de la famille Gillion Crowet Merode, dans le cadre d’une restructuration de son patrimoine, explique-t-elle. J’ai d’abord participé, en tant que conseil, à la préservation du patrimoine industriel, de collection et historique, tout en veillant à respecter les valeurs profondes véhiculées par les différentes générations. Après plusieurs mois de réflexion et d’action, la famille m’a sollicitée pour une toute autre expérience, celle de partager les principes clés appliqués à la structuration de leur patrimoine plus largement que dans les bureaux fermés d’un cabinet d’avocat. J’ai relevé ce défi au sein d’une Academy qui offre l’opportunité d’allier la profession d’avocat à la transmission du savoir, tout en intégrant la jeune génération dans cette aventure.”

La GCEA Academy se veut un lieu de partage entre les clients et détenteurs de patrimoine et des experts du secteur.

Un programme en cinq points

Concrètement, la GCEA Academy est, certes, un centre de formation, mais elle se veut surtout un lieu de partage entre les clients et détenteurs de patrimoine et des experts du secteur. L’idée de base est de passer de l’ingénierie fiscale à la stratégie patrimoniale transgénérationnelle, d’avoir les clés pour se poser les bonnes questions et appréhender son patrimoine dans toutes ses dimensions. Une association ouverte à tous, quel que soit leur patrimoine.

“Une maison ouvrière avec PEB G et trois héritiers potentiels nécessite que l’on se pose les mêmes questions, assène Karolien Haese. Par exemple, que faire de ce bien à un moment où les parents vont avoir besoin d’une rente viagère ou de rentrer dans une maison de repos ? Ceci est déjà une vraie question. Autre exemple récent : les droits d’enregistrement wallons. Ce n’est pas parce qu’ils baissent à 3% qu’il est nécessaire d’acheter. Quel est l’intérêt de posséder un tel bien dans le contexte de la famille ? Est-ce vraiment une bonne affaire s’il faut rénover, compte tenu des taux d’intérêt et de l’explosion des coûts de la construction ?”

Avec l’aide de Frederik Leloup, professeur en executive education sur les new leaderships (UCLouvain BMI International Executive MBA), et aussi dans le cadre d’Ineo, une formation interdisciplinaire en entrepreneuriat de l’UCLouvain, qui va coordonner l’Academy, Karolien Haese a développé un programme en cinq axes.

  • Le premier s’appelle “Construire, Préserver et Transmettre”. Il évoque le changement de perspective d’une transmission de patrimoine, passant du devoir vers un plaisir partagé entre générations.
  • Le deuxième, nommé “Symptômes, Diagnostic et Traitement”, vise à mettre en évidence la notion de soin patrimonial, à l’image des soins de santé. Il a pour but de donner les clés à un propriétaire de patrimoine pour prendre l’initiative une fois un diagnostic précis posé.
  • Le troisième vise à mieux connaître les dynamiques de courage, d’engagement et de responsabilité afin de mieux gérer les conflits de gouvernance et d’amener une évolution des mentalités dans les entreprises familiales ou au sein des familles.
  • Avec la collaboration de Lombard Odier, le gestionnaire d’actifs bien connu, le quatrième pilier parle des valeurs matérielles, existentielles et essentielles, et la distinction entre les trois, dans l’optique de l’affectation et de l’équilibre d’un patrimoine familial.
  • Enfin, un dernier chapitre va explorer les critères décisionnels comme le prix ou la qualité en mettant l’accent sur le confort du détenteur du patrimoine, une notion essentielle trop souvent oubliée.

Masterclass et podcasts

Ces cinq piliers sont autant de thèmes qui peuvent être abordés de plusieurs manières. Soit sous la forme de tables de discussion en soirée, soit sous la forme de masterclass. Elles peuvent être commandées sur mesure (un module ou plusieurs) ou être suivies dans le cadre d’un programme public organisé plusieurs fois par an. Le tarif de ces différentes formules variera évidemment en fonction des cas.

Des experts, des professeurs d’université, mais aussi des familles qui ont procédé à de telles transformations stratégiques viendront animer ces différentes sessions. À l’aide d’un studio dédié, des podcasts et capsules vidéos permettront, via le site www.gcea.be, de traiter des sujets spécifiques de façon moderne et ludique. Enfin, outre la formation sur mesure à destination des écoles et universités, la GCEA Academy appliquera aussi toutes ses compétences à la résolution de cas aigus de gestion de patrimoine dans le cadre de mises au vert.

“Je vais consacrer la moitié de mon temps à l’Academy, conclut Karolien Haese. Jusqu’à la fin de l’année, je continuerai à être en même temps avocate-associée chez DCH. Après, on verra. Toutes les options sont ouvertes.”

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