Notionnels : l’amputation plutôt que les oubliettes !

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Souvent présenté comme le père spirituel des “intérêts notionnels”, Bruno Colmant a toujours défendu son bébé avec acharnement. Bruno Colmant a-t-il voulu proposer un demi-sauvetage avant que l’idée d’une suppression ne percole trop loin ? L’intéressé nous le confirme sans ambages.

Souvent présenté comme le père spirituel de la “déduction pour capital à risque”, Bruno Colmant, aujourd’hui CEO adjoint d’Ageas, a toujours défendu son bébé avec acharnement. C’est que ces intérêts notionnels, puisque c’est bien d’eux qu’il s’agit, ont d’emblée suscité de vives controverses. Sur la scène politique, la gauche n’a cessé de les critiquer. Sur la scène économique, les chiffres les plus débridés ont circulé quant à leur coût pour l’Etat, même si la Banque nationale a apaisé le jeu.

Le décor a de toute manière changé au cours des derniers mois. Il y a d’abord le déficit budgétaire auquel la Belgique est brutalement confrontée, qui impose d’énormes économies et ressources nouvelles. Il y a ensuite le résultat des élections. Promoteur des intérêts notionnels, le MR en est sorti perdant, alors que le PS en est le grand vainqueur du côté francophone, lui qui n’a jamais pu avaler cette couleuvre jugée favorable aux entreprises tout en ne posant aucune exigence en termes d’emploi.

Bruno Colmant a-t-il voulu proposer un demi-sauvetage avant que l’idée d’une suppression ne percole trop loin ? L’intéressé nous le confirme sans ambages. Parmi les diverses pistes qu’il a évoquées la semaine dernière en matière de recettes nouvelles pour l’Etat, il insiste donc sur les intérêts notionnels en proposant pour l’avenir un taux d’intérêt plus modeste que celui qui prévaut aujourd’hui.

La déduction pour capital à risque, il faut le rappeler, consiste à réduire le handicap fiscal dont les fonds propres souffrent par rapport à l’endettement. Les charges relatives à ce dernier sont en effet déductibles du bénéfice imposable. Avec les intérêts notionnels, l’entreprise “fait semblant” que ses fonds propres sont également grevés d’intérêts débiteurs, et les déduit. La loi a fixé ce taux d’intérêt, en l’occurrence fictif ou “notionnel”, au niveau du taux sur les emprunts d’Etat à 10 ans.

En pratique, toutefois, ce taux ne saurait être ajusté sans cesse et il est dès lors fixé pour un certain temps. Soit à 3,8 % pour 2010 et 2011… alors que ce taux est aujourd’hui descendu à 3,2 % à peine. Les intérêts notionnels sont donc, très objectivement, devenus trop généreux.

Arguant du fait que ce taux comporte une prime de risque par rapport aux emprunts de l’Etat allemand (qui affichent actuellement 2,6 %), lesquels constituent l’étalon de la zone euro, Bruno Colmant propose de descendre à 2,5 %. Compte tenu de quelques restrictions au niveau de l’application du principe, la charge pour l’Etat serait globalement abaissée de 55 % environ.

La FEB a déjà clamé son désaccord, mais l’ancien patron d’Euronext ne s’en émeut pas : “Il est évident que tout le monde devra faire un effort et il est temps que chacun le comprenne !”

Guy Legrand

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