“L’emballement autour de la PEB est à relativiser”

Une enquête de la Banque ING relève que la moitié des Belges n’achèterait plus une maison ayant un mauvais score énergétique. Un constat qui aurait d’indéniables répercussions sur l’activité du marché immobilier et sur les prix. On en est toutefois loin, explique Eric Verlinden, co-CEO de Goddard Loyd.

TRENDS-TENDANCES. Comment peut-on interpréter les résultats de cette enquête d’ING?

ERIC VERLINDEN. Il faut avant tout les relativiser, vu la période où cette enquête a été réalisée. Soit au quatrième trimestre 2022, moment où l’inquiétude des ménages était au plus haut sur les prix de l’énergie. Je pense qu’il faut savoir raison garder sur cette problématique du certificat PEB, qui prend parfois une importance disproportionnée. Car son impact sera complètement différent en fonction de la localisation et du type de bien. Comparer un appartement des années 1930 en centre urbain par rapport à une villa des années 1970 située en Brabant wallon n’a pas de sens. Dans le second cas, la performance énergétique des bâtiments (PEB) sera un élément important, mais bien moins dans le premier. Il est donc ridicule d’affirmer que 50 % des candidats acquéreurs n’achèteraient plus sans mettre ces éléments en parallèle.

Cet indicateur va néanmoins segmenter de plus en plus les hausses de prix ?

Oui et c’est normal. Dans le marché actuel, seuls les biens rénovés et bien localisés verront leur prix augmenter alors que les prix des passoires énergétiques se stabiliseront, voire baisseront. Par contre, faire croire qu’un propriétaire qui possède un logement avec un PEB F ne pourra plus le vendre est totalement faux. Il est évident que la performance énergétique des bâtiments a pris de l’importance ces derniers mois. Et c’est une très bonne chose de l’avoir mise à l’agenda. Etablir des deadlines était également nécessaire pour pousser les propriétaires à améliorer les performances de leur bâtiment. Mais les délais avancés ne pourront jamais être tenus car il y a une impossibilité financière des ménages à effectuer ces travaux. Et les caisses des pouvoirs publics sont vides. Si les objectifs resteront, les caps seront modulés et repoussés. Le parc immobilier belge est aussi composé de nombreuses copropriétés. Rénover son bien n’est pas aussi simple qu’on peut le croire car cela dépend des assemblées générales. Et l’unanimité est rarement facile à obtenir.

En France, les propriétaires d’un bien immobilier ayant un PEB équivalent à G ne peuvent plus le louer depuis le 1er janvier. On voit déjà que les loyers s’envolent. Une conséquence inévitable ?

C’est simplement la loi de l’offre et de la demande. La demande locative reste forte. Si le parc immobilier diminue, les prix montent. En Belgique, les propriétaires qui vont investir pour améliorer leur score énergétique augmenteront aussi leur loyer alors que les autres verront ces loyers se stabiliser. Cela aura pour conséquence que les gens qui ont moins de moyens n’auront d’autre choix que de vivre dans logements obsolètes sur le plan énergétique. C’est un vrai problème. Pour s’en sortir, il faut des décisions fortes et claires : soit un financement à taux zéro de longue durée, des primes, une clarification des décisions juridiques pour les copropriétés et un calendrier réaliste. Sans cela, ce sera compliqué.

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