Qualifio, la boîte belge qui a séduit TF1

Les fondateurs de Qualifiio, Serge Rapaille et Olivier Simonis. © PG

Spécialisée dans la création d’interactivités digitales et la collecte de profils sur les sites internet, la société wallonne Qualifio ne cesse de conquérir les marques et les médias de Belgique et de France. Son dernier exploit: la signature d’un tout nouveau contrat avec la première chaîne de télévision française.

Quel sera le prochain concurrent à quitter l’aventure “Koh-Lanta” ? Sur le site de la chaîne TF1, l’internaute peut faire ses pronostics et gagner des cadeaux de la célèbre émission de téléréalité française. Pour cela, il doit d’abord remplir un formulaire de participation et laisser son adresse e-mail, ainsi que des informations a priori anodines sur son profil de téléspectateur.

Derrière ce nouveau jeu-concours du “Meilleur Pronostiqueur” de Koh-Lanta, ce n’est pas le savoir-faire de TF1 mais bien celui d’une petite entreprise belge qu’il convient de saluer. Basée à Louvain-la-Neuve, Qualifio est une société de 23 personnes qui s’est spécialisée dans “la création d’interactivités digitales, la collecte et la qualification de profils “, dixit les deux fondateurs Serge Rapaille et Olivier Simonis.

Qualifio a développé une plateforme d’outils qui permet aux médias et aux marques de créer facilement toute une série d’activités sur leur site web et les réseaux sociaux : quizz, concours, sondages, jeux, tests de personnalité, votes de préférence, galerie de photos ou de vidéos, etc. L’éventail des animations disponibles est large et surtout personnalisable à souhait en termes de modèles, de graphismes, de couleurs et d’options. Cette flexibilité a incité les équipes digitales de TF1 à faire appel à la société belge pour l’émission “Koh-Lanta” et les nombreux autres programmes de la chaîne française.

Interactivité et big data

Se positionnant comme “une entreprise de software”, Qualifio se concentre uniquement sur les outils informatiques et laisse à ses clients le soin de définir leur propre contenu à travers ses modèles graphiques très faciles à dompter. Une fois le contrat signé, libre à eux de jongler avec les outils et de développer ensuite le type et le nombre de campagnes qu’ils souhaitent mener sur leur propre site, leur page Facebook ou leur compte Instagram.

Mais pourquoi les marques et les médias recourent-ils à ce genre de services ? “On est aujourd’hui dans le marketing de conversation, explique Olivier Simonis, managing director de Qualifio. La prise de parole d’une marque ne se fait plus de manière espacée, à travers deux ou trois campagnes par an, mais bien de manière continue sur les réseaux sociaux. Pour les entreprises, il s’agit donc de faire de l’animation de communautés, de créer de l’interactivité, et notre plateforme aide les marques et les médias à atteindre cet objectif, tout en leur permettant de récolter des profils qui peuvent leur être utiles dans leur stratégie commerciale.”

Au-delà de la dimension ludique des interactivités proposées, c’est effectivement le filon du big data qui pousse les clients de Qualifio à rechercher ce type de prestations. Grâce aux quizz, concours et autres tests de personnalité, les marques et les médias peuvent facilement collecter les profils de leurs internautes – pour autant que ceux-ci aient accepté les conditions du jeu – et donc qualifier précisément une audience. Efficace, ce système d’opt-in permet dès lors aux annonceurs d’acheter de précieuses bases de données et aux médias de tirer des revenus supplémentaires lorsqu’il s’agit de mener des actions publicitaires sur leur site internet, si bien que le retour sur investissement peut se révéler rapidement intéressant.

Le filon des médias

Fondée en 2010, Qualifio occupe principalement trois segments : les médias (70 % de sa clientèle), les grandes marques (15 %) et les agences de communication (15 %). Si les médias représentent la majorité du chiffre d’affaires de la société, c’est en raison du parcours professionnel de l’un des deux fondateurs. Diplômé en gestion (IAG) et en philosophie à l’UCL, Olivier Simonis a d’abord travaillé comme directeur marketing chez Rossel. C’est au sein de cet organe de presse qu’il a clairement identifié le besoin d’animer les sites des différents titres du groupe et surtout constaté la nécessité commerciale de connaître le profil des internautes. A l’époque, il convainc son complice Serge Rapaille, alors chargé des projets web de la RMB (la régie publicitaire de la RTBF), de le rejoindre pour développer ce genre d’interactivités digitales et pour proposer ce service aux médias et aux marques. Et comme le but final consiste en “la collecte et la qualification de profils”, le nom de Qualifio émerge du brainstorming.

Intéressés par cette nouveauté, les groupes Rossel et Roularta sont les premiers clients de la start-up en 2011, suivis du magazine Elle et de RTL Belgique. Les connexions de ces deux groupes de presse en France, respectivement avec La Voix du Nord et L’Express, leur ouvrent rapidement les frontières, si bien que la France est devenue aujourd’hui le premier marché de Qualifio. Passée de deux à 23 collaborateurs en cinq ans à peine, a société néo-louvaniste dispose même d’un bureau à Paris et d’une antenne aux Pays-Bas où elle est également active.

France Télévisions, Le Monde, M6, Carrefour, Danone Belgique, Guerlain, Kinepolis, NRJ, Media Markt, Proximus, Le Parisien… Le tableau de chasse de Qualifio est impressionnant et compte désormais 170 clients qui paient chacun un forfait fixé entre 500 et 8.000 euros par mois selon les services demandés. Enviable, ce portefeuille va certainement s’enrichir d’autres marques dans les mois à venir puisque Qualifio vise clairement de nouveaux marchés en ce début d’année : “En 2015, nous avions fixé nos priorités sur les Pays-Bas et la Suisse ; en 2016, ce sera la Grande-Bretagne et l’Espagne, confie Olivier Simonis. Et même si nous avons un profil très technologique, nous adoptons encore une démarche commerciale à l’ancienne avec des rendez-vous pris par téléphone et une démonstration sur place grâce au bouche à oreille.”

Recherche cerveaux désespérément

Affichant une croissance de 30 % par an depuis 2011, Qualifio a enregistré un chiffre d’affaires d’environ 1,5 million d’euros l’année dernière et compte le porter à 2 millions d’euros en 2016. Son succès pousse d’ailleurs la start-up à déménager de ses locaux actuels pour rejoindre de nouveaux bureaux plus vastes dans le centre de Louvain-la-Neuve en mai prochain. Mais dans cette belle histoire wallonne, tout n’est pas rose pour autant et le recrutement d’un personnel qualifié pose un réel problème : “C’est le frein n°1 à notre croissance, déplore le managing director de Qualifio. Cela peut sembler prétentieux, mais nous n’avons aucune difficulté à trouver des clients et du financement. En revanche, le nerf de la guerre est de recruter de bons développeurs en Belgique. Nous sommes en manque de cerveaux informatiques et c’est un vrai souci pour l’économie numérique. Car il y a un énorme gap aujourd’hui entre les besoins du marché et les profils qui sortent des écoles supérieures et des universités.”

Pour pallier ce réel problème, Qualifio a donc prévu de réserver, dans ses nouveaux bâtiments, un espace de coworking pour les étudiants en ingénierie informatique de l’UCL toute proche. L’objectif ? Créer des liens avec cette communauté estudiantine pour dénicher les meilleurs profils et les inciter à venir gonfler les rangs de la société belge, une fois leur diplôme en poche. Bien sûr, ce n’est pas vraiment l’aventure à la sauce “Koh-Lanta”, mais cela y ressemble déjà un peu…

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