Le “pre-roll”, une arme de pub efficace ?

Quel est l’impact réel des “pre-rolls”, ces publicités intrusives qui précèdent la diffusion de vidéos sur le Net ? Réponse avec une étude menée par RMB, la régie publicitaire de la RTBF.

Cela fait aujourd’hui partie des petits rituels du Web : lorsqu’un internaute souhaite visionner une vidéo sur un site d’informations ou sur une plateforme comme YouTube, il doit généralement se farcir un “pre-roll”, une pub imposée qui précède la diffusion de la séquence choisie. Si certains de ces mini-spots publicitaires comportent la mention “Ignorer l’annonce” permettant au surfeur de zapper une grande partie de la pub entamée (généralement après cinq secondes de message commercial forcé), d’autres ne laissent en revanche aucun choix à l’internaute, au risque de faire fuir tous les allergiques au hold-up publicitaire.

Mais qu’en est-il de l’accueil réservé par le grand public à ces fameux “pre-rolls” et surtout de leur impact réel sur les cibles choisies ? Dépendent-ils de “l’environnement” et donc du site qui diffuse les vidéos ? Pour répondre à ces questions qui taraudent tant les annonceurs que les agences médias, la RMB a mené une nouvelle étude sur la question.

Baptisée Digitude (contraction attendue des mots digital et attitude), cette enquête réalisée par la régie publicitaire de la RTBF est assez inédite dans sa conception puisqu’elle comporte quatre volets complémentaires : deux études déclaratives classiques et deux études en situation réelle, dont l’une a été menée avec un “Internet tracker“, un mouchard placé sur l’ordinateur du cobaye pour mieux disséquer son comportement sur le Web (sites visités, nombre de pages vues, durée, etc.)

Une note de 4 sur 10

Au total, ce ne sont pas moins de 3.990 interviews qui ont été menées en Fédération Wallonie-Bruxelles, pendant cinq semaines, pour l’ensemble de ces quatre volets. Sans entrer dans le détail de tous les résultats, il apparaît que l’internaute francophone se connecte en moyenne huit fois par jour pour une durée cumulée de 104 minutes quotidiennes, visitant 226 pages réparties sur 20 sites différents. Les PC et les ordinateurs portables sont toujours les appareils les plus utilisés (respectivement plébiscités par 74% et 53% des interrogés), tandis que les smartphones et les tablettes ne séduisent encore, pour le moment, que 44% et 22% des Belges francophones lorsqu’il s’agit de surfer sur le Net.

Plus du tiers du temps consacré au Web est dédié au réseaux sociaux (quasi-exclusivement Facebook cité par 92% des troupes), tandis que 86% des sondés regardent volontiers des vidéos sur le Net (en moyenne 29 séquences par semaine), principalement sur YouTube qui englobe à lui seul 72% du temps passé par les Belges francophones pour la vision de vidéos sur Internet.

Dans ce contexte de connexion soutenue, on ne peut pas dire que l’intrusion publicitaire des “pre-rolls” soit vraiment bien accueillie par les internautes. Même si 63% des personnes interrogées acceptent de regarder ce contenu publicitaire en échange d’un accès gratuit à la vidéo souhaitée, ils donnent en effet au “pre-roll” la note sévère de 4 sur 10 en termes de ressenti général. Etonnamment, ce sont les plus jeunes qui se montrent les moins tolérants : contrairement aux 25-54 ans qui trouvent ces contenus “attrayants” à 44%, seuls 21% des 15-25 ans partagent en effet cette impression au sujet des pubs imposées.

Un contexte influent

Mais c’est dans la partie “laboratoire” que les résultats sont les plus intéressants. Confrontés à la vision de spots pour trois marques différentes dans le contexte reconstitué de quatre sites bien distincts (YouTube, Facebook, Skynet et RTBF.be), les internautes se montrent alors plus réceptifs aux “pre-rolls” lorsque les questions abordent des domaines plus larges. Noyés dans la masse des informations à commenter, les vidéos publicitaires semblent avoir un impact efficace puisque plus d’un sondé sur deux (52%) se souvient spontanément de la marque mise à l’honneur dans le “pre-roll” diffusé avant une séquence définie.

Plus étonnant : le ressenti d’un même “pre-roll” serait différent selon le contexte du site qui l’héberge. “L’étude révèle que le ‘pre-roll’ absorbe les qualités de son environnement, précise Lynda Calonne, responsable de l’étude et strategic research supervisor à la RMB. Un transfert de valeur semble s’opérer car les résultats montrent que l’impact d’un ‘pre-roll’ est plus fort sur un site d’informations que sur un réseau social ou une plateforme comme YouTube. L’individu est visiblement plus détaché sur un site de divertissement alors qu’il est plus impliqué sur un site d’informations, comme si ce dernier apportait inconsciemment plus de crédit au message publicitaire diffusé”.

Bref, la crédibilité et la proximité d’une marque seraient, selon l’étude, en moyenne supérieures de 20% sur un site connoté “sérieux” par rapport à un site davantage associé au loisir. Pas énorme, certes, mais malgré tout significatif.

Jouer la complémentarité

Les résultats de cette nouvelle enquête de la RMB vont-ils pour autant bouleverser les habitudes publicitaires des annonceurs et des agences médias ? Head of Interaction chez MEC Belgique, Damien Nicolas a pris connaissance de l’étude et tire la conclusion suivante : “Cela confirme bien ce que nous observons déjà dans nos campagnes et ce que d’autres acteurs démontrent, analyse-t-il. Le ‘pre-roll’ est un format très impactant en comparaison avec d’autres formats Internet comme les banners ou les liens sponsorisés, avec de meilleurs taux de clic et de meilleures conversions sur les sites des annonceurs”.

Mais quid de la force du “pre-roll” sur un site d’informations comme la RTBF ou RTL-TVI par rapport à une plateforme de vidéos comme YouTube ? “Il ne s’agit pas de choisir l’un ou l’autre, poursuit Damien Nicolas. Car les deux sont complémentaires. Un média local et fort donnera au ‘pre-roll’ un environnement plus riche et la possibilité de mettre en adéquation le produit commercial et un contexte éditorial connu et reconnu. D’un autre côté, YouTube permettra de diffuser le ‘pre-roll’ sur des personnes bien ciblées (en fonction de leur âge, leur genre, leur localisation, leurs centres d’intérêts…) et parfois pour un coût média plus bas. Les deux approches peuvent donc parfaitement cohabiter”.

Frédéric Brébant

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