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Comment les réseaux sociaux nous ramènent à la préhistoire

Pour l’agence d’information Bloomberg, cela ne fait pas l’ombre d’un pli: les journalistes sont paniqués. Pourquoi ? Parce qu’aujourd’hui les fausses infos relayées par les réseaux sociaux ont pris le pas sur les véritables informations.

À la lumière des dernières élections américaines, les journalistes ont compris que les fausses infos relayées par les réseaux sociaux ont aujourd’hui pris le pas sur les véritables informations, celles qui sont vérifiées quant à leur contenu et validées quant à leur véritable source. L’inquiétude des journalistes est d’abord légitime, ils souhaitent que les citoyens soient bien informés. Ensuite, il est clair que les fausses nouvelles qui se répandent sur les réseaux sociaux décrédibilisent l’autorité des journalistes et leur rôle d’arbitre de la vérité. Et enfin, il faut bien avouer un petit secret, la troisième raison est que la plupart des journalistes auraient voté pour Hillary Clinton. L’idée que de fausses informations aient à ce point influencé le vote américain leur fait donc doublement peur !

En fait, pour comprendre le poids aujourd’hui de Facebook sur la politique, Bloomberg propose de se souvenir de l’apport de l’écrit sur l’oral. Walter J. Ong, un ancien prêtre jésuite et auteur d’un livre de référence sur ce sujet, résume bien la situation actuelle. Pour lui, l’invention de l’écriture n’était pas simplement une extension du monde oral, mais cela a ouvert une nouvelle façon de réfléchir, ce qui a donc créé un nouveau monde. Avant l’invention de l’écriture, la connaissance n’existait qu’au temps présent et entre deux personnes, ou quelques personnes maximum. Si l’information était oubliée, elle disparaissait à jamais. D’où l’idée de se focaliser sur des idées facilement mémorisables et répétables, bref des idées qu’on qualifierait de virales aujourd’hui. En d’autres mots, l’immédiateté de l’oralité ne favorisait pas les idées abstraites, compliquées et qui nécessitaient un véritable enseignement. Il a fallu attendre l’invention de l’écriture pour faire place à la complexité et aux nuances.

Les réseaux sociaux sont en quelque sorte un retour en arrière, un retour à un monde où l’oral dominait les idées, et où la légende pouvait l’emporter sur la réalité

Vous l’avez compris, le monde des réseaux sociaux est en réalité un retour en arrière, à époque où paradoxalement l’écriture n’avait pas encore été inventée. En effet, des réseaux sociaux comme Facebook, Twitter ou Snapchat donnent une prime aux idées simples, mémorisables et répétables, donc virales, comme du temps d’avant l’invention de l’écriture. Adieu ce qui est compliqué, nuancé ou qui nécessite une mise en perspective !

L’oralité de nos ancêtres favorisait les idées simples, celles qu’on ne pouvait pas vérifier, et celles qui étaient facilement mémorisables. Et donc, oui, dans le monde des réseaux sociaux, une prime est donnée aux textes courts, aux vidéos-chocs et courtes, aux discours simplistes, très carrés, et très clivants, sans oublier les slogans creux, mais aisément mémorisables. Exactement comme du temps avant l’invention de l’écriture. Il s’agit donc en quelque sorte d’une régression dans le temps, en dépit de l’apparente modernité de ces outils sociaux. Leur écriture, si je puis dire, reste très orale, donc limitée car sans nuances. Le monde des médias sociaux est en quelque sorte un retour en arrière, un retour à un monde où l’oral dominait les idées, et où la légende pouvait l’emporter sur la réalité. La première victime de ce retour en arrière, c’est, hélas !, la vérité…

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