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Pourquoi nous n’avons pas vu venir la crise en 2008

Pourquoi n’avons-nous pas vu venir la crise en 2008 ? Voilà une bonne question et quand elle est posée cette semaine par Kenneth Rogoff, l’ancien économiste en chef du Fonds Monétaire International et professeur d’économie à Harvard, cette question prend tout son sel tellement elle semble évidente.

En fait, cet économiste distingué ne fait que reposer la question posée, il y a deux ans, par la Reine d’Angleterre. En visitant la prestigieuse London School of Economics, elle a osé poser la question que tout le monde se pose : pourquoi, avec les milliers d’économistes bardés de diplômes qui peuplent les banques et les grandes institutions, aucun d’entre eux n’a vu venir cette crise ?

D’abord, dire que personne n’avait prévu cette crise est faux. Quelques économistes l’ont vu venir, mais hélas leur discours était à l’époque inaudible. D’abord, parce que souvent ces économistes ne figuraient pas parmi les plus connus et donc leur voix avait moins d’impact. Ensuite, parce que comme dans une soirée arrosée, celui qui veut éteindre la lumière et retirer les boissons alcoolisées du bar se fait traiter de pisse-vinaigre. Or, à l’époque, tout le monde gagnait de l’argent et personne n’avait envie d’entendre un son de cloche différent.

Et puis, osons le dire aussi, quitte à me faire attaquer par emails interposés, les économistes des grandes banques n’étaient pas totalement objectifs et ne pouvaient sans doute pas aller à l’encontre de l’ambiance globale sous peine de recevoir leur C4. A chaque fois, qu’on évoque cette explication, les économistes bancaires se cabrent, car on met en doute leur probité, ce qui n’est pas notre cas, mais faut-il pour autant ne pas en parler ?

L’autre explication, c’est que la science économique a été contaminée par une idéologie du laisser-faire et par un aveuglement dans les modèles mathématiques qui a démontré ses limites en 2008. Il suffit de regarder la liste des Prix Nobel d’économie, la plupart du temps, ces Prix étaient donnés à des mathématiciens de formation qui n’avaient qu’un vague notion de l’économie réelle. Le dernier Prix Nobel d’économie vient d’être donné en partage à quelqu’un qui reconnaissait n’avoir jamais suivi un cours d’économie de sa vie. Et puis, comme le reconnaissent quelques économistes en privé, il faudrait probablement jeter à la poubelle une partie de l’enseignement macroéconomique actuel. Mais quel est le professeur qui a envie de reconnaître que ce qu’il enseigne depuis des lustres ne repose finalement que sur des fondements très fragiles pour ne pas dire autre chose, le débat reste ouvert.

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