Ukraine: le cadeau de Noël de Poutine à Ianoukovitch

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Le président russe a annoncé mardi que Moscou accordait 15 milliards de dollars à l’Ukraine et baissait le prix du gaz. L’opposition accuse le président ukrainien de vouloir “vendre” leur pays à la Russie. Angela Merkel assure que “l’offre européenne reste sur la table”.

L’ opposition pro-européenne y voit la “mise en gage” du pays à la Russie. Le président russe Vladimir Poutine a annoncé mardi que Moscou accordait 15 milliards de dollars à l’Ukraine et baissait le prix du gaz qu’elle lui vend, lors d’une visite du président ukrainien au Kremlin.

Moscou a annoncé son intention de placer “une partie de ses réserves (…) dans des titres du gouvernement ukrainien, à hauteur de 15 milliards de dollars”, a déclaré Vladimir Poutine à l’issue de ses discussions avec son homologue ukrainien, Viktor Ianoukovitch. Le ministre russe des Finances, Anton Silouanov, a précisé que cet argent serait investi immédiatement, en 2013, et en 2014 dans des obligations émises par l’Ukraine.

Qu’a promis Ianoukovitch en échange ? Les opposants au président Ianoukovitch, qui manifestent depuis près de quatre semaines, l’accusent de vouloir “vendre” l’Ukraine à la Russie, en profonde récession et au bord de la faillite.

“Le peuple ukrainien a le droit de savoir ce qu’a promis Ianoukovitch en échange”, a déclaré mardi devant la foule le célèbre boxeur et opposant ukrainien Vitali Klitschko, après cette annonce. “Il a mis le pays en gage”, a affirmé l’opposant, qui a annoncé le même jour mettre fin à sa carrière sportive pour briguer la présidence du pays et a réclamé une élection présidentielle anticipée dès le mois de mars.

Baisse du prix du gaz Faisant allusion aux conditions avancées par le Fonds monétaire international (FMI) pour l’octroi d’un prêt à Kiev, Vladimir Poutine a a souligné pour sa part que son offre n’était “liée à aucune condition, ni à une hausse, ni à une baisse, ni au gel des avantages sociaux, des retraites, des bourses ou des dépenses”. Le FMI, avec laquel l’Ukraine négocie depuis des années, exige des réformes de rigueur budgétaire.

M. Poutine a aussi indiqué que la Russie avait accepté de réduire d’un tiers le prix du gaz qu’elle exporte en Ukraine, qui coûtera désormais 268,5 dollars les 1000 mètres cubes contre plus de 400 actuellement.

L’Union douanière “pas évoquée” Vladimir Poutine a par ailleurs affirmé que la question de l’adhésion de l’Ukraine à l’Union douanière menée par Moscou, redoutée par l’opposition pro-européenne en Ukraine, n’avait pas été évoquée lors des négociations.

Les deux pays ont toutefois conclu un accord prévoyant de lever les “limitations commerciales” entre les deux pays jusqu’à fin 2014.

Au début de leurs discussions, Viktor Ianoukovitch avait plaidé pour un “partenariat stratégique” avec la Russie, plus à même selon lui de faire sortir l’Ukraine de la crise que la signature de l’accord d’association avec l’UE — en préparation depuis 3 ans–, très mal vu par Moscou.

Un aller simple Kiev-Moscou Avant la rencontre au Kremlin, un autre leader de l’opposition, Arseni Iatseniouk, a mis en garde Ianoukovitch contre toute initiative sur une adhésion de l’Ukraine à l’Union douanière pilotée par Moscou. “Ce serait pour lui un billet aller simple. S’il fait ça, il peut ne pas revenir de Moscou”, a-t-il lancé.

Environ 200 militants pro-européens se sont postés mardi matin sur la route de l’aéroport que devait emprunter le président, a indiqué le parti Batkivchtchina (la Patrie) de l’opposante emprisonnée Ioulia Timochenko sur son site. Selon la même source, Viktor Ianoukovitch a finalement choisi de rejoindre l’aéroport en hélicoptère.

L’offre européenne tient toujours La chancelière allemande Angela Merkel a regretté mercredi la décision ukrainienne de ne pas signer l’accord d’association avec l’Union européenne, tout en assurant que l’offre était “toujours sur la table”.

“Je regrette la décision du président Ianoukovitch de ne pas signer, ou du moins de ne pas signer pour le moment” l’accord d’association entre l’Ukraine et l’Union européenne, mais “l’offre reste sur la table”, a déclaré Mme Merkel lors d’un discours devant les députés allemands, avant le conseil européen en fin de semaine.

La chancelière allemande a également indiqué que l’UE allait “étudier et regarder attentivement” les accords économiques avec la Russie, signés mardi à Moscou par le président ukrainien.

Mais la chancelière a une nouvelle fois appelé à sortir d’une situation “où chaque décision prise par un pays situé entre l’Union européenne et la Russie est systématiquement interprétée comme une décision en faveur de l’un ou de l’autre”.

Concernant les manifestations pro-européennes d’opposants à Ianoukovitch, qui agitent régulièrement la capitale ukrainienne, Mme Merkel a appelé l’Ukraine à “garantir des conditions raisonnables (pour l’exercice) du droit à manifester”.

Une offre européenne insuffisante ? Mardi, le nouveau ministre allemand des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier, avait jugé que l’aide financière proposée par l’Union européenne à l’Ukraine pour la rapprocher de l’Europe avait été insuffisante. “Nous avons présenté une proposition d’aide financière et économique, loin de ce qui est nécessaire pour sauver l’Ukraine de la faillite et l’associer économiquement durablement à l’Europe”, avait déclaré M. Steinmeier.

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