Tunisie: “Si le secteur touristique s’écroule, l’économie s’écroule!”

Mémorial sur la plage de Sousse. © REUTERS

Le secteur touristique en Tunisie va en prendre un sacré coup après l’attaque de touristes sur une plage de Sousse ce 26 juin. “Si ce secteur s’écroule (…), l’économie s’écroule”, a mis en garde la ministre du tourisme. Heureusement les vacanciers semblent, en général, assez rapidement oublier ces évènements tragiques.

La Tunisie a vécu ce 26 juin la pire attaque terroriste de ces dernières années quand un homme a tiré sur des dizaines de touristes sur une plage de Sousse, tuant 38 personnes et en blessant autant d’autres. A cause de cet acte, le secteur du tourisme de ce pays qui se remettait seulement de son printemps-arabe ainsi que de l’attaque contre des touristes au musée du Bardo en mars dernier (22 morts), va en prendre un sacré coup. 3500 touristes britanniques avaient déjà quitté le pays dans les heures qui ont suivi le massacre tandisque les tours opérateurs Jetair et Thomas Cook rapatriaient leurs clients et annulaient tous leurs vols vers la Tunisie. D’autres vacanciers, une minorité, par défiance envers le terroriste, ont préféré continuer leurs vacances.

Le secteur touristique est un moteur de base de l’activité économique du pays. L’impact économique pour la Tunisie pourrait atteindre plus de 450 millions d’euros en 2015, a déclaré lundi la ministre du Tourisme Selma Elloumi Rekik. “Il y a des évaluations qui sont faites. On ne peut pas donner de chiffre exact, mais il faut compter au moins (pour) l’impact sur le PIB, (qu’) il y a un manque à gagner d’au moins un milliard de dinars pour l’année“, a-t-elle répondu à une question sur les pertes après l’attentat de vendredi.

L’attaque d’une synagogue dans l’est de la Tunisie en 2002 (19 personnes y avaient été tuées) peut servir, sur le plus long de terme, de comparaison, avance la BBC. Environ 30 000 emplois ont été perdus en deux ans et l’activité touristique a chuté dans les 6 mois qui ont suivi l’attaque. A la différence que ce 26 juin, le terroriste a spécifiquement visé des touristes, principalement britanniques, le secteur touristique tunisien peut donc s’attendre à de plus lourdes conséquences.

Cependant, la plupart des touristes semblent avoir une mémoire assez courte par rapport à ces évènements, comme l’atteste ce graphique réalisé par The Economist. Ainsi, dans le cas de l’attaque du site de Luxor en 1997 en Egypte, environ 12 mois plus tard, les touristes étaient de retour. Au Kenya, après les attaques de l’ambassade américaine de 1998, il a fallu environ un an pour revoir les vacanciers affluer. Ces dernoers sont aussi attirés par les prix cassés pratiqués par les établissements et considèrent que l’attractivité d’une destination surpasse le niveau de risque qui y est lié, explique la BBC.

En 2010, le Wall Street Journal avançait que la probabilité pour un touriste Occidental d’être tué par un terroriste était de une chance sur 3 millions chaque année, la même proportion qu’un Américain soit tué par une tornade.

Tunisie:
© The Economist

Une chance sur 3 millions d’être tué par un terroriste

La plupart des analyses sont d’avis que les pays qui vivent un conflit larvé, comme l’Égypte, souffrent beaucoup plus, économiquement, que ceux victimes d’attaques isolées. Les offices de tourisme essaient alors de trouver la parade, en proposant des destinations considérées comme “à part” dans un pays donné. Ce fut le cas tout un temps en Égypte, où Sharm el-Sheikh était présenté comme ne faisant pas vraiment partie du pays – ou du moins comme une zone préservée de toute menace terroriste – les touristes peu intéressés ou peu doués en géographie n’y voyant que du feu.

Cependant, en Tunisie, les deux attaques des derniers mois, celle du musée du Bardo et celle de l’hôtel de Sousse sont très rapprochées dans le temps, ce qui donne un signal très négatif aux vacanciers, qui placent la Tunisie sur la liste rouge des destinations à éviter. La ministre du Tourisme a, dans la foulée, annoncé une série de “mesures d’urgence” visant à soutenir les professionnels du secteur touristique, comme des “prêts exceptionnels (…) pour financer l’activité des établissements touristiques pour les saisons 2015 et 2016”. “Si ce secteur s’écroule (…), l’économie s’écroule”, a-t-elle mis en garde.

Depuis la révolution de 2011 qui a chassé du pouvoir le dictateur Zine Al Abidine ben Ali, la Tunisie fait face à une menace jihadiste croissante qui, couplée avec les bouleversements politiques et les tensions économiques et sociales, a pesé sur le tourisme, qui représente près de 7% du PIB et plus de 400.000 emplois directs et indirects. L’attentat de l’hôtel de Sousse a été revendiqué par le groupe Etat islamique (EI).

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