“Theresa May veut un Brexit dur ? La négociation sera dure”

© Reuters

Le président français François Hollande a averti jeudi la Première ministre britannique Theresa May qu’elle devait s’attendre à une “négociation dure” si elle insistait sur un Brexit “dur”.

“Je l’ai dit très fermement: Mme Theresa May veut un Brexit dur ? La négociation sera dure”, a lancé le président français lors d’un sommet européen à Bruxelles, le premier auquel la dirigeante conservatrice assiste depuis que les Britanniques ont décidé le 23 juin de quitter l’Union européenne.

L’entourage de Theresa May s’est toutefois refusé à dramatiser: “C’est une négociation. Il y a beaucoup de bavardages”, a réagi une source à Downing Street sous couvert de l’anonymat.

Mme May avait provoqué des froncements de sourcils auprès des 27 en insistant sur l’idée d’appliquer un contrôle de l’immigration des citoyens de l’UE, s’orientant ainsi vers un Brexit sans concessions.

Pour les Européens, cette proposition va à l’encontre du principe de libre circulation et s’avère incompatible avec un accès sans conditions au marché unique.

Jeudi, Mme May s’est surtout employée à rassurer ses partenaires européens, s’engageant à ce que Londres assume pleinement son rôle jusqu’au Brexit, puis reste un “partenaire fiable”.

“Je suis ici avec un message très clair: le Royaume-Uni quitte l’UE mais nous allons continuer à jouer pleinement notre rôle jusqu’à ce que nous partions”, a assuré Mme May, qui devait exposer ses arguments lors du dîner jeudi avec ses homologues.

“Et après notre départ, nous serons un partenaire fort et fiable”, a promis la Première ministre britannique. “C’est dans l’intérêt aussi bien du Royaume-Uni que de l’UE de continuer à travailler étroitement ensemble”, a-t-elle plaidé.

Comme Mme May, le président du Conseil européen Donald Tusk s’est efforcé d’arrondir les angles, se disant “très heureux d’accueillir Theresa May aujourd’hui” dans la capitale européenne.

“Certains médias décrivent son premier sommet comme une arrivée dans la fosse aux lions. Ce n’est pas vrai, c’est plutôt un nid de colombes”, a-t-il ironisé. “Vous pouvez être sûrs qu’elle sera absolument saine et sauve et j’espère qu’elle réalisera que l’UE est la meilleure compagnie qu’on puisse avoir au monde”.

M. Tusk a réitéré qu’il n’y aurait “pas de négociations” sur la sortie du Royaume-Uni avant l’activation par Londres de l’article 50 du traité de Lisbonne.

Longues négociations

Theresa May a récemment indiqué que ce lancement officiel de la procédure de divorce avec l’UE interviendrait d’ici fin mars 2017.

Ce calendrier, qui ouvre la voie à un départ effectif du Royaume-Uni de l’UE début 2019, a été salué par les dirigeants européens, qui poussent pour un divorce rapide depuis le référendum du 23 juin.

Mme May, qui n’avait pas été invitée au dernier sommet de l’UE, à Bratislava en septembre, devrait profiter du rendez-vous de Bruxelles pour sonder des alliés potentiels. Elle doit rencontrer vendredi pour la première fois le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker à l’occasion d’un déjeuner de travail.

Elle s’est déjà rendue en France, en Allemagne, au Danemark, aux Pays-Bas et en Espagne. A Bruxelles, elle aura des apartés avec les dirigeants de l’Estonie et de la Roumanie.

“Le Royaume-Uni est impatient de savoir ce que d’autres Etats membres sont prêts à accepter dans les négociations sur le Brexit”, note Iain Begg, professeur de sciences politiques à la London School of Economics.

Preuve de la complexité des négociations à venir, Mme May a indiqué mercredi devant le Parlement que les négociations allaient durer “deux ans, ou plus”, n’excluant donc pas la possibilité d’une prolongation de la période prévue.

“Nous voulons que notre départ soit un processus ordonné, constructif et sans accrocs, minimisant les incertitudes”, a insisté la source de Downing Street.

Une des difficultés vient des divisions du gouvernement britannique, qui peine à s’accorder sur une stratégie claire. Le ministre des Affaires étrangères, Boris Johnson, insiste sur le nécessaire contrôle de l’immigration. Celui des Finances, Philip Hammond, cherche d’abord à protéger l’économie.

Ces divergences de vue ne sont “un secret pour personne”, a reconnu M. Hammond, qui insiste sur l’impératif pour le secteur financier de ne pas être entravé par des restrictions sur le mouvement des travailleurs qualifiés.

L’Ecosse, qui menace d’un nouveau référendum d’indépendance et a publié un projet de loi en ce sens jeudi, constitue un autre casse-tête. Plusieurs recours en justice risquent également de freiner le processus.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content