Taxation des loyers: le PS change son fusil d’épaule

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Paul Magnette s’était prononcé en faveur d’une taxation accrue des revenus locatifs. Le parti socialiste avance désormais avec prudence dans ce dossier sensible. Mais les propriétaires ne sont pas rassurés.

“On doit davantage taxer les revenus locatifs.” Ces propos du président du PS Paul Magnette, répercutés dans les colonnes du journal Le Soir à la mi-janvier, ont fait l’effet d’une petite bombe dans le secteur immobilier. La Belgique est une terre de “petits” propriétaires : le marché locatif compte pas moins de 400.000 bailleurs, selon le Syndicat national des propriétaires, pour un million de biens mis en location. Ces propriétaires, qui bien souvent ont investi dans la brique pour s’assurer un complément de pension, craignent comme la peste une hausse de la fiscalité sur l’immobilier.

Mais la proposition de Paul Magnette visait les multipropriétaires : via une certaine progressivité de l’impôt, les “petits” bailleurs devaient être épargnés. Malgré cette précision, les réactions ne se sont pas fait attendre, au point que le PS a été contraint de répondre à de nombreux e-mails émanant de propriétaires inquiets, comme l’a rapporté récemment L’Echo. Le parti socialiste a dès lors quelque peu modifié son discours. Exit l’épouvantail de la taxation des loyers. Le PS fait désormais référence à son projet de programme wallon, qui suggère la mise en place d’un système de bonus-malus fiscal. “Il ne s’agit pas de taxer plus, mais de taxer mieux”, nous explique le porte-parole du parti.

Séparer le bon grain de l’ivraie Le PS veut récompenser les “bons” propriétaires, sanctionner les “mauvais”. Comment ? En jouant sur le précompte immobilier. Les propriétaires qui rénovent leur bien, l’isolent correctement, bref qui mettent un logement décent à disposition de leurs locataires, bénéficieront de réductions fiscales au précompte immobilier. Par contre, les propriétaires qui laissent leur bien péricliter, qui n’investissent pas dans l’isolation ou la mise aux normes de leur immeuble, seront pénalisés via une hausse de leur précompte immobilier.

Dans le projet du PS, les récompenses et les sanctions fiscales ne dépendent pas uniquement des travaux effectués (ou non) dans l’immeuble. Elles résultent aussi… du niveau du loyer fixé par le propriétaire ! La proposition fait resurgir une vieille idée du parti socialiste : l’encadrement des loyers, un système complexe qui n’a jamais pu être mise en place faute d’accord politique, malgré des tentatives à Bruxelles. Le PS propose de comparer les loyers réels à une “grille indicative des loyers établie sur base du type de bien, de son équipement sanitaire, de sa performance énergétique, etc.” Si le propriétaire dépasse la “norme”, il sera pénalisé fiscalement. L’idée étant de convaincre les bailleurs d’être “raisonnables” dans la fixation de leurs loyers. On en revient quelque part à la proposition initiale de taxation des loyers réels…

Du côté du Syndicat national des propriétaires et copropriétaires (SNPC), le lobby des bailleurs, on reste “dubitatifs”. “Nous continuons à conseiller la prudence à nos membres par rapport aux investissements parce que nous ne savons pas comment, demain, l’immobilier sera taxé, souligne le vice-président du SNPC Olivier Hamal. Les socialistes abandonnent l’idée de la taxation des loyers réels parce qu’ils se rendent comptent que la hausse sera répercutée sur les locataires. Mais leur message reste assez alambiqué. Et des mesures sont envisagées de tous côtés, comme l’encadrement des loyers (Laurette Onkelinx, PS), le blocage des loyers (Monica De Coninck, sp.a) ou encore l’interdiction des expulsions en hiver (Isabelle Meerhaeghe, Ecolo). On cherche les propriétaires. C’est dangereux pour la stabilité du marché immobilier.”

GILLES QUOISTIAUX

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