Spéculer sur la dette des Etats : moins facile dès 2012

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Une nouvelle loi européenne interdira notamment, dès le 1er janvier prochain, les ventes à nu de CDS souverains. La spéculation sur la dette des Etats en sera limitée… mais pas impossible.

L’Union européenne s’est dotée mardi d’une loi qui limitera la spéculation sur la dette des Etats européens, en interdisant dès le 1er décembre les “CDS à nu” sur les titres de dette souveraine et en encadrant les “ventes à découvert” à partir de 2012. Les CDS, instruments financiers théoriquement utilisés pour se protéger contre le risque de défaut d’une entreprise ou d’un pays, ont été accusés d’amplifier la crise en servant à parier sur le défaut de paiement des Etats.

“C’est la première fois que l’Europe interdira un produit financier qui sert à spéculer sur la dette des Etats”, se sont félicités l’élu écologiste français Pascal Canfin, rapporteur du texte qui a été adopté à une très large majorité au Parlement européen, et l’eurodéputé belge Philippe Lamberts (Ecolo).

Un accord de principe avait été conclu entre le Parlement et les représentants des gouvernements européens le 18 octobre, au terme de longues tractations. Le texte a été adopté au Parlement par 507 voix contre 25 et 109 abstentions.

Interdiction des CDS souverains à nu : “Nous avons gagné la bataille !”

A partir du 1er décembre, il ne sera plus possible à un acteur financier d’acheter un CDS (credit default swap) ayant pour sous-jacent un titre de dette émis par un Etat européen, sans être détenteur de ce titre.

“Interdire la vente à nu de CDS est une bonne chose car la spéculation sur les dettes souveraines passe notamment par ce biais, a souligné le député socialiste français Liêm Hoang-Ngoc dans un communiqué. Les spéculateurs qui possèdent des assurances contre le risque de défaut d’un Etat, sans détenir l’obligation d’Etat correspondante, ont intérêt à ce que le risque de défaut de l’Etat en question s’accroisse.”

Le Parlement européen avait voté l’interdiction des CDS souverains à nu en juillet, mais certains Etats comme l’Italie y étaient réticents, craignant que leur interdiction n’affecte la liquidité du marché de leur dette souveraine.

Un compromis a été trouvé permettant aux Etats qui le souhaitent de ne pas appliquer le règlement pendant une période donnée, en fonction de critères spécifiques. Ils devront en informer l’autorité de régulation financière européenne (ESMA), qui devra se prononcer sur le bien-fondé des arguments avancés.

Pascal Canfin a souligné, dans l’hémicycle strasbourgeois et sous les applaudissements de ses collègues, le rôle prépondérant joué par le Parlement pour arracher un accord : “Le Parlement était seul à défendre (l’idée d’une interdiction des CDS). Nous avons gagné la bataille !”

Ventes à découvert : le texte adopté resserre les conditions

Le texte adopté mardi comporte également des dispositions sur les ventes à découvert. Ce mécanisme, qui permet à un acheteur de vendre un actif emprunté dont il n’acquittera lui-même le prix qu’a posteriori, revient à spéculer à la baisse sur la valeur de cet actif, et a été accusé de précipiter la chute des actions les plus fragiles.

Ces ventes à découvert mènent à de soudaines et fortes chutes des prix qui enclenchent une spirale négative, déstabilisant le marché et sapant la confiance des investisseurs, a relevé l’eurodéputé belge Saïd El Khadraoui (SP.a).

Un acteur de marché qui vendra à découvert une grande quantité de titres d’une entreprise ou d’un Etat devra en informer les autorités de supervision, et, dans certains cas, le marché. Les ventes à découvert à nu seront en outre plus encadrées : le vendeur devra avoir localisé le titre ou, à défaut, effectuer un emprunt équivalent.

Enfin l’ESMA pourra restreindre temporairement les ventes à nu de manière exceptionnelle en cas de chute brutale des cours.

Trends.be, avec Belga

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