Saut d’index: pas d’avis du Conseil national du travail, Peeters invoque l’urgence

Kris Peeters © Belga

La Commission des Affaires sociales de la Chambre a rejeté mardi, majorité contre opposition, les demandes d’audition et d’un avis du Conseil National du Travail (CNT) à propos du saut d’index.

La Commission a commencé l’examen du projet de loi, déposé en urgence, qui contient diverses mesures de “promotion de l’emploi”, dont le saut d’index. Les échanges ont été vifs. Plus de deux heures ont été consacrées à l’organisation des travaux. L’opposition socialiste, écologiste, cdH, PTB et FDF a réclamé des auditions et un avis du CNT, instance qui réunit les partenaires sociaux, le gouvernement n’ayant pas sollicité celui-ci.

Le ministre de l’Emploi, Kris Peeters (CD&V), a invoqué l’urgence. Si l’on en croit l’exposé des motifs, le gouvernement souhaite que le projet de loi entre en vigueur d’ici au 29 mars.

L’inflation a été relativement forte en février et l’indice-pivot pourrait être dépassé dès le mois d’avril dans certains secteurs, notamment le textile et la distribution. Une inégalité pourrait se créer en les travailleurs qui bénéficieraient tout de même d’une indexation de leur salaire – quelque 200.000 personnes, selon le ministre – et d’autres dont le salaire ne serait pas indexé.

M. Peeters souhaite également que les négociations dans les secteurs puissent commencer rapidement pour mettre en oeuvre l’accord conclu par la majorité des partenaires sociaux sur les salaires. Les secrétariats sociaux doivent en outre disposer du temps nécessaire pour procéder correctement au calcul des salaires.

Le saut d’index cristallise la tension sociale depuis la mise sur pied du gouvernement. Par cette mesure, l’équipe Michel veut favoriser la réduction de l’écart salarial entre la Belgique et ses trois voisins. Le saut d’index sera limité à 2%. Aucune indexation négative ne sera possible.

Le projet initial contenait une disposition pénale en cas de non-respect mais elle a été abrogée. “Mais il y a toujours une sanction prévue”, a précisé M. Peeters.

La mesure touchera les salaires et les allocations, y compris les allocations des entités fédérées. L’opposition y a vu un problème en matière d’allocations familiales, transférées aux entités fédérées par la 6e réforme de l’Etat. La décision est conforme à l’avis du Conseil d’Etat, a affirmé la ministre de la Santé, Maggie De Block (Open Vld). Les entreprises publiques seront également concernées. M. Peeters a d’ailleurs rappelé qu’elles seraient désormais soumises à la loi de 1996 sur la compétitivité des entreprises et donc à la norme salariale.

La question des loyers demeure pendante. Pour les uns, le pouvoir fédéral peut décider de leur appliquer le saut d’index. Pour d’autres, elle relève exclusivement des Régions. Le point sera tranché dans les semaines à venir.

La majorité souhaite approuver le projet de loi ce mardi. La séance de la Commission s’annonce longue.

L’opposition appuie sur le frein

L’opposition a appuyé mardi sur le frein pour retarder le vote en Commission des Affaires sociales du projet de loi de “promotion de l’emploi” qui contient la mesure très controversée du saut d’index. Le gouvernement et la majorité ne sont pas au bout de leurs peines. Une série d’amendements ont été déposés. Une deuxième lecture sera également, selon toute vraisemblance, demandée avant le vote sur l’ensemble du texte. Certains partis devraient aussi demander l’avis du Conseil d’Etat lorsque le texte atterrira en séance plénière.

Le gouvernement souhaite que le texte entre en vigueur au plus tard le 29 mars. Le ministre de l’Emploi, Kris Peeters, a justifié l’urgence par le risque du franchissement de l’indice-pivot au mois d’avril dans certains secteurs, en particulier la construction et le textile. Ce faisant, le salaire de certains travailleurs (200.000 selon lui) serait indexé in extremis cette année, au contraire du salaire des autres travailleurs. C’est notamment pour cette raison que l’avis du Conseil National du Travail (CNT), qui réunit les partenaires sociaux, n’a pas été requis.

“Vous avez décidé de passer en force et, volontairement, vous boycottez les partenaires sociaux”, a lancé la cheffe de groupe cdH, Catherine Fonck.

L’opposition a dénoncé l’influence de la N-VA dans le choix de cette mesure et la façon dont le gouvernement tente de la faire passer. “Dans votre gouvernement, certains partis, et particulièrement la N-VA, se glorifie de chaque coup de canif en affirmant que les partenaires sociaux n’ont rien à dire”, a fait remarquer la députée centriste.

“C’est une rupture du contrat social et de la parole de formations qui font partie de ce gouvernement”, a déploré Georges Gilkinet (Ecolo) en rappelant les déclarations du CD&V ou du MR qui, avant les élections, n’entendaient pas mettre l’index à mal.

La mesure coûtera en moyenne 25.000 euros sur l’ensemble de la carrière d’un travailleur, a affirmé Frédéric Daerden (PS) qui a dénoncé une “injustice et une aberration”. “Il y a les entreprises du Bel 20 qui augmentent leurs dividendes et un gouvernement qui diminue les salaires”.

La précipitation du gouvernement dénote l’influence des lobbys économiques, estime Raoul Hedebouw (PTB) qui voit aussi une autre raison: un possible relèvement de certains taux de TVA, décidé dans le cadre d’un virage fiscal et dont il faut immuniser les salaires.

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