Référendum : les raisons de la volte-face de Papandréou

© Reuters

Le Premier ministre grec a laissé entendre en fin de journée que le référendum n’aurait finalement pas lieu. Les pressions exercées de toute part auront donc eu raison de lui. Récit d’une journée extraordinaire.

Une journée en enfer pour le premier ministre grec. En l’espace de quelques heures, des pressions venues de l’Europe, de l’opposition, et même de son propre parti ont forcé Georges Papandréou à prendre le chemin de l’abandon du référendum sur le plan d’aide européen qu’il avait annoncé avec fracas ce mardi. Car depuis 48h, ce choix de consulter le peuple empoisonne ses relations avec l’Europe entière et avec les membres de sa propre majorité. Retour sur une spectaculaire volte-face.

Tout commence très tard hier soir. A 23h45, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel adressent un ultimatum au premier ministre. Le président affirme que l’Europe et le FMI n’iront pas “verser le moindre centime” au pays avant le vote de ce référendum. Un vote qui devra absolument poser la question du maintien ou non du pays dans la zone euro affirme le président. Les leaders européens font pression, car ils sont excédés par le choix de Papandréou d’organiser ce référendum qui aurait des conséquences désastreuses (détaillées dans cet article) pour le pays et pour la zone euro si le “non” l’emportait. Ils cherchent donc un vote positif rapide pour lancer dès que possible l’application du plan de sauvetage. Cette pression par le portefeuille est très efficace, car la Grèce a absolument besoin du prêt de 8 milliards d’euro de l’Europe et du FMI, vital pour payer ses fonctionnaires et faire face à ses prochaines échéances de remboursement de sa dette. Et si le référendum a lieu fin décembre, voire début janvier, il sera déjà trop tard pour les finances du pays.

Deuxième mauvaise nouvelle de la matinée pour le premier ministre. A 9h42, la majorité sur laquelle il compte pour son vote de confiance vendredi n’est plus acquise. La télévision grecque annonce que deux députées ne voteront pas la confiance. Le Pasok dispose de 152 députés sur un total de 300, mais avec deux députées en moins, il n’est plus en mesure de l’emporter. Ces deux femmes sont opposées au projet de référendum du premier ministre. Et ce ne sont pas les seules. Le très influent ministre des Finances Evangélos Vénizélos – rival malheureux de Papandréou à la direction du parti en 2007 – et le ministre du Développement Michalis Chryssohoïdis annoncent qu’ils sont aussi contre la tenue d’un tel vote.

Télémaque Hytiris, député très proche de Papandréou réclame l’alliance avec la droite pour sortir de la crise politique peu après midi. “Il faut que M. Papandréou se rende chez le président de la République, Carolos Papoulias pour que ce dernier convoque un gouvernement de coalition responsable afin de sortir de l’impasse politique.” Trois ministres du gouvernement Papandréou se joignent au mouvement d’appel à l’union nationale, celui de la Santé, de l’Education, et des Transports.

Avertissement sans frais de la porte-parole de la Commission européenne Karolina Kottova à 12h20. Elle affirme que “dans la situation actuelle” des traités européens, la Grèce pourrait être éjectée de l’Union Européenne si son peuple décidait de quitter la zone euro lors du référendum. “Le traité ne prévoit pas de sortie de la zone euro sans sortie de l’UE”, affirme Karolina Kottova.

Après avoir longtemps protesté contre les plans de sauvetage qui ont amené à une austérité très forte pour la population, l’opposition semble avoir mis de l’eau dans son vin. “Le nouvel accord sur la poursuite de l’aide à la Grèce est inévitable et il faut le garantir”, affirme le chef de file de Nouvelle Démocratie (ND) Antonis Samaras à 15h. Le chef de l’opposition, requinqué par les critiques européennes à l’encontre de Papandréou appelle même “à un gouvernement temporaire de transition qui aura comme mission exclusive le déroulement des élections et l’approbation de l’accord” européen. Le premier ministre saluera quelques heures plus tard “la position du parti de l’opposition de la droite”, sur l’accord européen. En jugeant toutefois catastrophique” la tenue d’éventuelles élections anticipées en Grèce.

Deux écoles s’affrontent sur ce point. Georges Prevelakis, professeur de géopolique à la Sorbonne appelle à des élections anticipées. “Papandréou doit quitter le pouvoir, c’est souhaité par tout le monde, même au niveau européen. Il a très mal appliqué les plans d’austérité, il a bloqué le secteur privé et il a démantelé l’Etat. Et la perspective d’élections anticipées et l’alternance au pouvoir va calmer les débats”. Mais pour le politologue grec Georges Sefertzis, il faudrait plutôt envisager un gouvernement de coalition pour éviter la crise politique. “C’est une solution très saine et sûre pour une période transitoire. On pourrait ensuite penser à des élections anticipées d’ici à l’automne prochain.” Une chose est sûre: après son choix d’organiser un référendum et son probable revirement 48h plus tard, Papandréou a montré que son avenir à la tête du pays devrait rapidement toucher à sa fin.

Ali Bekhtaoui

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