Pension : “Nous allons renforcer le deuxième pilier”

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Le vice-Premier ministre Van Quickenborne s’explique sur “sa” réforme des pensions, sur sa réponse au coût du vieillissement et sur la manière de rendre le régime des pensions plus légitime. Il plaide aussi pour une extension des pensions complémentaires privées.

A la veille de la grève générale du 30 janvier, le magazine Trends-Tendances publiait une interview de Vincent Van Quickenborne. Le ministre des Pensions y défendait “sa” réforme, menée tambour battant, contre tous les avis négatifs qui culminèrent dans une journée de grève. Le vice-Premier ministre disait notamment avoir “fait le calcul : si l’on prend toutes les mesures (Ndlr, des réformes votées en décembre), nous arrivons à un montant de 1,5 milliard d’euros sur toute la législature, jusqu’en 2014.”

Sur trois ans, donc. Soit 500 millions par an en moyenne…

Puis les décisions auront un effet après 2014, comme le passage de 60 à 62 ans pour la pension anticipée. La réforme des pensions de survie, qui ne touchera pas ceux et celles qui sont dans le système actuellement, générera des économies au-delà de 2014. Combien ? On ne sait pas, au minimum des dizaines de millions d’euros. Il y a par ailleurs des réformes dont nous n’avons pas calculé les effets dans le tableau budgétaire. C’est le cas, par exemple, du changement dans le mode de calcul des pensions des fonctionnaires, où l’on passe des cinq aux dix dernières années de carrière comme base. Nous avons préféré être prudents. En additionnant le tout, nous répondons, je pense, aux questions avancées par la Commission sur le vieillissement.

Quid de ce qu’on appelle la “légitimité” de la pension légale, le fait qu’il y a de moins en moins de lien entre ce que l’on paie en cotisations et les montants de retraite perçus ?

Une brochette de réformes permettra d’améliorer cette “légitimité”. En corrigeant les périodes assimilées – chômage de longue durée, prépensions, crédit temps – qui seront moins prises en compte (1), cela apportera un grand changement. Nous allons aussi renforcer et étendre le deuxième pilier – basé sur la capitalisation (Ndlr, fonds de pension, assurance de groupe principalement) et qui concerne environ 60 % des travailleurs – vers le non-marchand, les contractuels des services publics et les PME, notamment.

Pensez-vous qu’il faudrait, comme les Allemands, repousser l’âge légal de la pension ?

Je ne pense pas que ce soit le problème. Ce qu’il faut, comme la Commission européenne nous le recommande, c’est élever l’âge de sortie de la vie active, qui était de 64 ans en 1973 – l’année de ma naissance – pour arriver à 59,1 ans en 2010. Cette réforme devrait nous permettre d’arriver à 61 voire 62 ans. Nous nous retrouverons alors dans la première tranche des pays européens.

Comment pensez-vous pouvoir généraliser le deuxième pilier, les pensions complémentaires ?

Dans l’accord gouvernemental, nous faisons référence à l’accord interprofessionnel. Ce sujet devrait intervenir dans ce cadre. Il faudra faire un choix en septembre-octobre dans le cadre de l’accord 2013-2014. On devrait dégager une approche tripartite, syndicats-employeurs-gouvernement, et prévoir de l’argent pour le deuxième pilier, pour ceux qui n’en bénéficient pas encore.

A quoi sert le Fonds de vieillissement ? Il devait financer le coût du vieillissement, et semble peu utile…

Il est logé aux Finances, chez Steven Vanackere, sous la direction du ministre du Budget, Olivier Chastel. Dans ma note de politique générale, j’ai proposé d’étudier sa fusion avec le Fonds pour l’avenir des soins de santé, qui contient 1,2 milliard. Dans le Fonds de vieillissement, il y a 17 milliards à 18 milliards d’euros, intérêts compris. Mais il faut rester réaliste, il ne suffira pas. Il n’a pas été suffisamment approvisionné. A partir de 2007, il fallait y mettre les surplus du budget fédéral, mais il y a eu les élections puis la crise, et il n’y a pas eu d’excédent. J’espère qu’à partir de 2015, ce financement pourra reprendre. Je reste partisan de faire des surplus sur le budget et de les mettre dans ce fonds.

L’argent du Fonds ne peut être utilisé, cependant. La loi prévoit que la dette publique doit se situer sous les 60 % pour en sortir les fonds, ce qui n’est pas possible avant une dizaine d’années…

Nous allons étudier une évolution de ces règles avec les partenaires sociaux.

Vous n’avez pas l’intention de changer le système de calcul des pensions ?

Il y a des changements. Les années au-delà de 45 ans de carrière seront dorénavant comptabilisées pour la pension, ce qui n’est pas le cas jusqu’à présent.

Le gouvernement a rehaussé l’âge de la retraite anticipée, mais les incitants, sous la forme du bonus, pour “récompenser” les travailleurs qui restent plus longtemps, après 62 ans ou 44 ans de carrière, ne sont guère connus…

Non, ce n’est pas assez connu, alors que ceux qui en profitent peuvent ajouter à leur pension 150 euros par mois, ce qui n’est pas maigre comme résultat. Une enquête de l’ONP indique que seules 20 % des personnes concernées connaissent le système. Ce dispositif existe autant pour les salariés, les indépendants et, sous une autre forme, pour les fonctionnaires.

Il n’y a guère eu de publicité, ou d’intérêt, car le système de bonus est expérimental et limité à cette année. Sera-t-il prolongé ?

J’observe quand même que les gens s’intéressent de plus en plus à leur pension. La jeune génération s’y intéresse davantage. Avec cette réforme, les mentalités changent, les gens comprennent et acceptent qu’il faut reculer l’âge de la sortie de la vie active, et seront donc plus sensibles aux bonus. Donc je suis persuadé qu’une solution sera adoptée.

Y a-t-il un pays qui a bien géré la réforme de ses pensions ?

La Suède, bien sûr. Ce pays a été plus prévoyant que d’autres en réformant ses pensions dans les années 1990. Je pense qu’on peut arriver au même résultat avec le couplage entre le premier pilier, la répartition, et le deuxième, la capitalisation. C’est ma vision des pensions.

Propos recueillis par Robert van Apeldoorn

(1) Ces périodes étaient assimilées, en termes de cotisations de pension, à celle du dernier salaire perçu. Elles seront comptabilisées dorénavant sur une base moins favorable, généralement le salaire minimum.

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