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Panama Papers: pas de distinction entre argent sale et optimisation fiscale…

Le scandale des sociétés offshore du Panama suscite beaucoup de débats : certains hommes politiques voudraient en profiter pour durcir les lois contre les avocats et les banques qui aident à réaliser ce genre de montage fiscal.

Le scandale des sociétés offshore au Panama n’en finit pas de susciter des vagues au niveau politique. Il est clair que ce genre de révélations tombe toujours mal et encore plus en période de crise. Le parti socialiste flamand, par la bouche de son président John Crombez, en a profité pour sortir son vieux rêve ; c’est-à-dire responsabiliser pénalement les intermédiaires qui aident les entreprises ou les ménages fortunés à mettre à l’abri du fisc leur fortune. John Crombez vise très clairement les banques, les avocats et les autres intermédiaires qui créent ce type d’évasion fiscale et pour lesquels il demande des lois plus dures. Il va même jusqu’à proposer de retirer les licences des banques qui aident à réaliser ce genre de montage.

En fait, c’est un vieux rêve de l’administration fiscale et en particulier de l’ISI. Je me souviens fort bien de l’ancien directeur de l’ISI à Bruxelles qui m’expliquait, il y a 20 ans déjà, qu’il est en réalité impossible de lutter contre tous les fraudeurs, parce qu’ils sont trop nombreux. En revanche, ceux qui les conseillent sont nettement moins nombreux et peuvent être plus facilement poursuivis si on donne les moyens à l’ISI. En d’autres mots, plutôt que de courir derrière les fraudeurs, le mieux, c’est de faire peur aux conseillers fiscaux, aux avocats et aux banquiers qui mettent en place ce genre de montages fiscaux.

Plutôt que de courir derrière les fraudeurs, mieux vaut faire peur aux conseillers fiscaux, avocats et banquiers qui mettent en place ces montages fiscaux.

En réalité, ce que propose John Crombez sans le dire ouvertement, c’est de transformer les professions libérales en auxiliaires du fisc ! Ce qu’il oublie juste de préciser, c’est que c’est déjà le cas notamment en matière de blanchiment d’argent. En cas de soupçons de blanchiment d’argent, votre banquier et toute une flopée de professions libérales sont déjà légalement obligés de vous dénoncer au fisc à l’insu de votre plein gré comme dirait l’autre.

Quant au fait de retirer une licence d’agrément à une banque soupçonnée d’aider ses clients à frauder, l’idée est encore moins vieille car c’est tout bonnement ce qu’ont fait les Etats-Unis, il y a quelques années. Un deal avait alors été mis entre les mains de banques privées suisses: soit vous livrez les noms de vos clients américains avec un compte en Suisse, soit vous ne pourrez plus exercer votre activité aux Etats-Unis ! Ce genre de pression ou de chantage a marché auprès de ces banques suisses.

Mais ce qui est regrettable dans ce déluge d’informations médiatiques, c’est que sous prétexte de transparence, on mélange l’argent de dictateurs et de dirigeants politiques corrompus avec des montages fiscaux tout à fait légaux, réalisés par des sociétés ou des familles honorables. En oubliant aussi de dire que certaines de ces sociétés offshore ont été dissoutes depuis lors et que leurs détenteurs se sont mis en règle vis-à-vis du fisc comme on l’a vu dans d’autres fuites (leaks) similaires. En oubliant également de préciser que s’il y a des paradis fiscaux, c’est aussi parce qu’il y a au départ des… enfers fiscaux. Vous me direz que c’est l’histoire de l’oeuf et de la poule mais en attendant le mal est fait et des noms ont été jetés en pâture au grand public sans faire de distinguo entre argent sale et optimisation fiscale…

Sans compter que ce voyeurisme favorise l’émergence de partis populistes qui n’ont qu’à dire : vous voyez, les riches ne paient jamais d’impôt ! Dommage car le populisme ne fait jamais bon ménage avec la vérité.

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