MR et cdH vont alléger le mammouth wallon

Olivier Chastel (MR) et Benoit Lutgen (CDH) © Belga

Le nouveau gouvernement wallon financera une série d’allègements fiscaux, dont la suppression de la télé-redevance, en sabrant dans les structures publiques (fin des provinces, rationalisation des outils économiques, fusion des 5 TEC, réseau de distribution d’électricité unique, disparition de 200 mandats d’administrateurs etc), ont annoncé mardi les présidents du MR et du cdH, Olivier Chastel et Benoît Lutgen. La composition du gouvernement devrait être connue ce mercredi.

“Avec le parti socialiste, nous n’aurions jamais pu aller aussi loin dans la réorganisation des structures régionales, afin d’améliorer l’efficience publique, a déclaré le président du cdH, Benoît Lutgen, en présentant l’accord de gouvernement conclu avec le Mouvement réformateur. Chaque euro dépensé doit être un euro efficient au bénéfice des Wallons.” La rationalisation des structures publiques apparait en effet comme l’ingrédient principal des trente pages du programme gouvernemental. On vous en présente quelques chapitres.

Fusion des outils économiques. La nouvelle majorité entend dégager des moyens en rationalisant les outils économiques wallons. Le nouveau paysage n’est pas encore clairement défini, mais on se dirige vers une fusion de la SRIW (grandes entreprises) et de la Sowalfin (coupole des invests provinciaux), voire des invests eux-mêmes (mais ceux-ci aussi des actionnaires privés).Au sein ou à côté de cette structure, on retrouverait “un pôle spécialisé dans les techniques de redressement des entreprises et de l’assainissement des sites industriels désaffectés”. Ce pôle réunirait donc les actuelles Sogepa et Spaque.

Le raisonnement se décline aussi pour l’Awex (agence à l’exportation), dont le réseau d’attachés de par le monde sera “optimalisé” dans l’espoir de “retrouver des moyens supplémentaires pour le soutien à l’exportation”. On envisage aussi “une meilleure intégration” de l’Awex au sein des structures wallonnes, dans un souci de cohérence et d’économies de moyens.

Le monde patronal peut être rassuré, le nouvel exécutif ne bousculera pas la stratégie du Plan Marshall et des pôles de compétitivité, le dispositif-phare de la politique wallonne depuis dix ans. Tout au plus, Olivier Chastel souhaite-t-il intensifier les moyens en faveur de l’économie numérique, moyens qui avaient déjà été amorcés par le gouvernement sortant. Le changement se marquera plutôt du côté des aides aux entreprises. Libéraux et humanistes ont le sentiment que ces aides s’apparentent un peu trop à des “effets d’aubaine”, “coûteux pour la collectivité” et bien souvent “réservés aux seuls initiés”. Une simplification des procédures devrait faciliter l’accès des PME à des aides, dont elles ignorent parfois l’existence.

Suppression de plus de 200 postes d’administrateurs. Les outils économiques ne seront pas les seuls mis à contribution puisqu’on annonce la disparition de plus de 200 postes d’administrateurs, en incluant les sociétés de logement, les TEC (il y a aura 1 seule société, comme De Lijn ou la Stib, au lieu des cinq actuelles), la constitution progressive d’un gestionnaire de réseau de distribution unique (au lieu des actuels Ores, Resa et quelques autres, avec chacun conseil d’administration, comité de direction etc)… La nouvelle majorité espère dégager ainsi une économie récurrente d’une vingtaine de millions.

-Disparition des provinces et limitation des mandats locaux. La nouvelle majorité souhaite la fin des institutions provinciales mais cela nécessite un vote à la majorité des deux tiers, ce qui signifie le soutien du PS. Mais sans attendre cela, il y a moyen d’organiser des transferts de compétences vers les communes, les communautés de communes, la Région, voire la Communauté. Si tout devait se réaliser, on réduirait les dépenses de “plusieurs dizaines de millions d’euros”. On supprime aussi la rémunération de tous les mandats dérivés des fonctions locales (l’échevin du logement ne sera plus payé en plus s’il siège dans la société locale de logements publics) et on intègre tous les postes dans les asbl, intercommunales, leurs filiales et les filiales de leurs filiales dans le champ des règles de cumul. Cela apporterait une économie de 5 millions d’euros.

Le gouvernement promet encore de réduire le 10% le salaire des ministres et les frais de cabinet, et de supprimer tout sponsoring de la part des organismes publics wallons. “Et je peux vous dire que c’était très large et souvent à destination des connaissances”, ajoute Olivier Chastel.

Ce tour de vis dans les dépenses publiques ne s’accompagne pas, semble-t-il, de politiques de diminution du nombre de fonctionnaires. L’accord de gouvernement parle uniquement de “mobilité interne” au sein de l’administration et, surtout, d’objectivation des recrutements.

Avec toutes ces économies, que finance-t-on ?

Ces économies devraient financer une série d’allègements fiscaux, dont le plus emblématique est la suppression de la télé-redevance. “Les Wallons ne la paieront plus en 2018”, ont assuré les présidents du MR et du cdH.

Aide au logement : réduction des droits d’enregistrement et préfinancement des frais, afin de faciliter l’accès à la propriété ; suppression du taux de 15% pour les droits d’enregistrement sur la 3e habitation ; exonération temporaire du précompte immobilier pour les installations dans les quartiers nouveaux ; crédit d’impôt pour les étudiants (ou leurs familles) qui ne vivent pas à proximité d’une école supérieure et doivent donc louer un kot.

Droits de succession. La transmission de la maison familiale au conjoint survivant sera exempte de taxes. Les droits seront aussi réduits ou supprimés si les héritiers investissent dans l’efficacité énergétique du bâtiment. Les droits de donation mobilière seront également réduits.

Mobilisation de l’épargne. Le gouvernement wallon va utiliser le levier fiscal pour tenter de mobiliser l’épargne des citoyens dans deux directions. D’une part, dans les jeunes entreprises, via un élargissement du prêt Coup de pouce lancé l’an dernier (avantage fiscal pour les prêts aux starters) ; d’autre part, dans l’économie verte et les investissements durables, via un emprunt obligataire spécifique que lancera la Région.

“Tous ministres de l’emploi”

A l’image du Premier ministre Charles Michel et son “jobs, jobs, jobs”, le gouvernement wallon affirme sa volonté de tout miser sur l’emploi. “Tous les ministres seront des ministres de l’emploi, à travers leurs compétences propres”, résume Benoît Lutgen.

Le MR ayant régulièrement et abondamment critiqué le Forem ces dernières années, on n’est pas surpris de voir l’annonce d’une refonte de l’éventail des formations proposées. Elles sont trop nombreuses, selon les deux présidents de parti, à conduire vers des métiers où il n’y a guère d’emploi. Ils veulent au contraire intensifier les formations aux métiers en pénurie et prévoient “une orientation plus dynamique” des demandeurs d’emploi vers ces filières. “Nous parlons bien ici d’une incitation et non d’une obligation à suivre une formation aux métiers en pénurie”, a précisé Olivier Chastel. Le MR défendait cette idée d’obligation pour les chômeurs non-qualifiés mais, “dans une première phase”, elle n’a pas été retenue. La Wallonie misera par ailleurs plus résolument sur l’apprentissage des langues étrangères et sur la formation en alternance. L’absence, pour l’heure, d’un accord sur le futur du gouvernement de la Communauté française ne permet malheureusement pas de garantir une concertation optimale entre l’enseignement obligatoire et ces politiques de formation.

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