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Mais elle est où cette fichue croissance?

La sortie du dernier livre de l’économiste Daniel Cohen est toujours un événement – cette fois-ci il a choisi de nous expliquer pourquoi nous sommes tellement braqués sur la croissance et sur son retour qu’il juge t- hélas – très très hypothétique.

Depuis l’éclatement de la crise en 2008, on est bien en peine de trouver la croissance, sauf dans quelques rares pays du sud. En zone euro, elle semble avoir disparu. D’ailleurs, si on regarde les chiffres, le taux de croissance des pays industrialisés recule d’année en année. Constatant cela, certains économistes, et non des moindres, nous disent qu’il faudra s’en accommoder, que nous allons entrer dans une longue période de croissance molle, ce qu’ils appellent la “stagnation séculaire”. La faute à qui ?

Comme toujours avec les économistes, il y a plusieurs chapelles qui s’affrontent. La plus connue d’entre elle estime que les nouvelles technologies, à l’inverse de la machine à vapeur ou de l’électricité, ne créent pas d’emplois ou pas assez pour compenser ceux qui sont détruits. L’exemple que l’on ressort le plus souvent, c’est celui de Kodak qui a son apogée utilisait 140.000 personnes, alors que son équivalent aujourd’hui, ç-à-d la société Instagram, lorsqu’elle a été rachetée employait une bonne dizaine de personnes seulement. Remplacez Instagram, par Booking, Blablacar ou Uber et vous aurez à peu près le même ordre de grandeur.

Nos sociétés ont besoin de croissance, ne serait-ce que pour assurer du travail à tout le monde

“C’est vrai qu’Internet offre des services gratuits, ce qui est évidemment très bon pour notre pouvoir d’achat. Mais la mauvaise nouvelle, c’est qu’Interne ne génère pas d’emplois. En fait, tout se passe comme si un petit nombre de gens très bien payés travaillaient à rendre gratuits des biens consommés par des pauvres” (La Croix du 3 septembre 2015). Or, le drame, c’est que nos sociétés ont besoin de croissance, ne serait-ce que pour assurer du travail à tout le monde, et également pour assurer la survie de notre système de sécurité sociale. C’est la raison pour laquelle, il faut absolument lire le dernier livre de l’économiste Daniel Cohen, dont le titre dit tout : “Le monde est clos et le désir infini”. Il parle bien de ce souci lié à l’absence de croissance. Dans les pays du nord, elle est plus lente et nettement moins créatrice d’emplois, car les robots, comme je l’ai dit, se substituent à la main d’oeuvre humaine, ce qui crée un sentiment d’angoisse dans la classe moyenne. A contrario, dans les pays du sud, la croissance reste encore relativement rapide, car les besoins à satisfaire sont immenses, mais à ce rythme-là, les ressources naturelles de notre planète risquent rapidement d’être épuisées. Le livre de Daniel Cohen est très documenté et mélange histoire, philosophie et économie, mais pèche un peu au niveau des remèdes à apporter à cet immense problème. En réalité, la solution a déjà été donnée par le sociologue Edgar Morin, “il faudrait passer de la quantité à la qualité” – mais l’être humain ne semble pas prêt à faire ce passage, car ses désirs restent illimités et notre planète limitée.

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