Lutte contre la fraude : mission impossible ?

© Image Globe/Herwig Vergult

La présence obligatoire d’un avocat, imposée par la loi Salduz, alourdira le travail des inspecteurs sociaux. Jusqu’à paralyser la lutte contre le travail au noir… Cerise sur le gâteau, le “bazooka antifraude” de Di Rupo Ier serait contraire à la Constitution.

La loi Salduz menace la lutte contre la fraude sociale

Les contrôles menés sur les chantiers de construction, dans l’horeca, le commerce de détail ou le nettoyage sont particulièrement touchés par la loi Salduz, qui prévoit que les auditions menées par l’Inspection sociale dans sa lutte contre le travail au noir aient lieu en présence d’un avocat, rapporte vendredi La Libre Belgique.

La présence obligatoire d’un avocat alourdira en effet le travail des inspecteurs sociaux.

Au niveau des services de police, “les procureurs généraux ont tenté de contourner ce problème via une circulaire demandant aux enquêteurs d’attacher moins d’importance aux auditions et davantage aux constatations matérielles, indique Jean-Claude Heirman, directeur général de l’Inspection sociale au SPF Affaires sociales. Mais au niveau de la fraude sociale, c’est plus compliqué car c’est l’audition qui pourra mettre en évidence l’infraction, ou non.”

“Si l’on tombe sur des travailleurs en séjour illégal, il faut les priver de liberté et les mettre à disposition de l’Office des étrangers. En principe, c’est la police qui s’en occupe. Mais si aucun avocat n’est disponible, nous devrons les relâcher”, ajoute-t-il, précisant que ce cas ne s’est pas encore présenté mais qu’il risque bien de se produire.

Pour renouer avec l’efficacité, deux pistes existent. L’une consisterait à retirer ou diminuer la peine d’emprisonnement pour certaines infractions. “On en arriverait alors à un Salduz light, plus facile à appliquer et où l’avocat n’entre plus en ligne de compte dans les auditions”, poursuit Jean-Claude Heirman. L’autre solution consisterait à dépénaliser certaines infractions pour lesquelles on mènerait uniquement des poursuites administratives.

Le Conseil d’Etat est critique vis-à-vis de la manière de lutter contre la fraude

Autre obstacle à une vraie lutte contre la fraude en Belgique : le Conseil d’Etat avertit que le “bazooka”, que le gouvernement Di Rupo souhaite utiliser pour lutter contre les constructions frauduleuses, semble contraire à la Constitution, rapporte vendredi De Standaard.

Le gouvernement fédéral a axé une partie de sa déclaration sur la lutte contre la fraude. Le Conseil d’Etat est très critique envers l’une des mesures antifraude les plus importantes mises sur pied par le secrétaire d’Etat en charge de la Lutte contre la fraude, John Crombez (SP.a), afin de combattre les constructions fiscales illicites.

Le Conseil d’Etat a fait connaître jeudi soir son avis sur le projet de loi-programme, dont cette mesure antifraude fait partie. Il estime en substance que le système de requalification doit être soumis à une analyse complémentaire, visant à une plus grande adéquation avec la Constitution.

Le législation fiscale renfermait, selon De Standaard, depuis longtemps une disposition anti-abus. Si le fisc arrivait à prouver qu’une construction particulière était motivée par des avantages fiscaux, il pouvait lever un impôt supplémentaire. Mais le contribuable avait toujours la possibilité de démontrer que la construction qu’il avait mise sur pied servait bien un objectif économique. Cette mesure s’est toutefois érodée au fil des ans.

Le “bazooka” que le fisc tenait dans ses mains s’est ainsi transformé en pistolet à eau. John Crombez souhaite à nouveau équiper le fisc d’une telle arme, qu’il disposait pourtant déjà. Le secrétaire d’Etat n’a pas réagi, jeudi soir, à l’avis du Conseil d’Etat, préférant l’analyser en profondeur.

Trends.be, avec Belga

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