Livret : bientôt plus de carotte fiscale ?

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Même si l’idée suscite la controverse et ne semble pas prête d’être adoptée, une modification du régime fiscal avantageux du livret devient de moins en moins taboue.

Taxer les comptes d’épargne dès le premier euro d’intérêt. Après le gouverneur de la Banque nationale Luc Coene, et plus récemment l’ancien président de la Banque européenne d’investissement Philippe Maystadt, c’est au tour du nouveau ministre des Finances Koen Geens (CD&V) de remettre sur la table la fin de l’avantage fiscal du livret (pas de précompte mobilier de 15 % sur les 1.880 euros d’intérêt). Selon lui, l’idée s’inscrit dans la recherche de solutions pour réorienter les quelque 240 milliards d’euros placés par les Belges sur les carnets d’épargne. Des milliards de dépôts qui prennent en partie la direction des maisons-mères étrangères de nos grandes banques, et qui “ne servent pas suffisamment à soutenir l’économie du pays”, a-t-il indiqué dans un entretien accordé ce weekend à nos confrères de La Libre Belgique et du Standaard, proposant en parallèle de “relancer” le bon de caisse avec un précompte non pas à 25 %, mais seulement à 15 %. Histoire que les épargnants acceptent de bloquer leur épargne à plus long terme (5 au 7 ans) et que, dans le même temps, les banques soient obligées d’octroyer des crédits aux PME ou à des projets publics agréés par le ministère des Finances.

Tuée dans l’oeuf

Mal accueillie par les différents partis de la majorité, surtout du côté francophone, l’idée a directement été tuée dans l ‘oeuf. Pas question pour eux de toucher à la fiscalité du compte d’épargne. Du moins pour le moment. Car l’idée ne tombe pas du ciel. Elle est dans l’air depuis longtemps et revient d’ailleurs régulièrement sur le tapis, notamment lors de la confection du budget. Comme l’a rappelé Koen Geens lui-même, se retranchant derrière l’avis de la vénérable institution, elle a surtout été suggérée l’an dernier par la Banque nationale, laquelle devra affiner sa position dans un second avis attendu en juillet prochain par l’équipe Di Rupo.

Mais pourquoi au juste vouloir supprimer la carotte fiscale du livret ? D’abord parce qu’elle coûte de l’argent à l’Etat. Défini par le Conseil supérieur des Finances comme une “dépense fiscale” (c’est-à-dire une moindre recette découlant d’encouragements fiscaux provenant d’une dérogation au système général d’un impôt déterminé en faveur de certains contribuables ou de certaines activités économiques, sociales, culturelles, etc. et qui pourrait être remplacée par une subvention directe), l’avantage fiscal accordé aux épargnants représente un manque à gagner pour les caisses publiques estimé à 476 millions d’euros (en 2011). Pas négligeable en ces temps de disette budgétaire et de relance économique.

Nombreux sont ensuite les experts à voir dans le régime fiscal avantageux du livret d’épargne une véritable anomalie. Anomalie qui non seulement biaise le comportement des épargnants dans leur choix d’un produit de placement, mais encourage aussi la fraude. On le sait, nombre de Belges multiplient les carnets d’épargne pour bénéficier plusieurs fois de l’exonération en question.

Sébastien Buron

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