Les notionnels définitivement enterrés?

© belga

Remis en cause par la justice européenne, “le mécanisme des intérêts notionnels n’est pour autant pas forcément appelé à disparaître”, estime son père spirituel, Bruno Colmant, partner chez Roland Berger.

Et un mauvais point de plus pour notre fiscalité ! Après l’exonération fiscale du livret, c’est au tour du très controversé régime des intérêts notionnels de se voir remis en cause par la justice européenne. Dans un arrêt rendu ce jeudi, la Cour de Justice de l’Union estime que le mécanisme des intérêts notionnels appliqué en Belgique est contraire au droit européen. En n’intégrant pas la valeur des actifs dont les entreprises disposent à l’étranger dans le régime de déductibilité fiscale, la loi belge constitue “une restriction à la liberté d’établissement dans l’Union européenne”, estime la Cour, répondant à une question préjudicielle posée par le tribunal de première instance d’Anvers dans une affaire opposant Argenta au fisc belge suite au refus de ce dernier de déduire des intérêts notionnels pour des actifs situés dans une filiale néerlandaise de la banque anversoise. Pas de révolution Ancien chef de cabinet de Didier Reynders, ancien président d’Euronext Bruxelles, aujourd’hui partner chez le consultant Roland Berger et, sinon le père unique des intérêts notionnels, en tout cas leur inspirateur et défenseur le plus ardent, Bruno Colmant ne se dit pas surpris par la décision des juges luxembourgeois. “Le problème était connu. Une entreprise belge qui possède une succursale étrangère ne peut pas bénéficier pleinement des intérêts notionnels. Elle est pénalisée dans sa base imposable, qui est diminuée. L’argumentation est correcte. Il y a une justification économique incontestable.”

Le mécanisme est-il pour autant condamné ? Nullement, reprend Bruno Colmant. “Nous n’en sommes pas là. La Belgique va devoir adapter le mécanisme pour se conformer au droit européen. Cela prendra un certain temps. Le système sera ajusté mais avec discernement. Ce ne sera pas une révolution.” Spécialiste des matières fiscales au sein du PS, le sénateur Ahmed Laaouej estime pour sa part qu’ “il faut faire évoluer les intérêts notionnels vers un système qui encourage davantage l’investissement productif plutôt que d’allouer un avantage fiscal en fonction du niveau des fonds propres.” En attendant, cette nouvelle admonestation de la justice européenne à l’encontre de notre système fiscal prouve ô combien celui-ci regorge de niches fiscales et qu’il est grand temps de le remettre à plat. Preuve aussi qu’il est très difficile de mettre en place des politiques fiscales nationales dans une Europe harmonisée.

Sébastien Buron

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content