Le secteur bancaire grand gagnant du sommet européen?

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Les banques ont beau avoir tiré un trait sur la moitié de leurs créances grecques, elles affichent des envolées spectaculaires en Bourse. Est-ce à dire que leurs problèmes sont enfin résolus?

Après trois mois de déconfiture boursière, le secteur bancaire est à la fête. Au lendemain de l’accord européen sur la Grèce, les banques caracolent en tête des plus fortes hausses européennes, avec des envolées parfois spectaculaires.

Des pertes conséquentes

Paradoxalement, sur le papier, les mesures adoptées dans le courant de la nuit par les gouvernements européens ne sont pas de nature à enchanter les banquiers. L’accord prévoit en effet un effacement “volontaire” des créances des banques de 50%. En clair, elles vont perdre la moitié du montant de leurs obligations grecques, et ce avec l’interdiction de se plaindre.

Jusqu’au dernier moment d’ailleurs elles ont tenté d’obtenir une décote plus favorable, de l’ordre de 40%. Mais les États, et notamment l’Allemagne, ont insisté pour rendre le plan le plus crédible aux yeux des marchés. Selon diverses sources concordantes, certains négociateurs, parmi lesquels le directeur du Trésor Ramon Fernandez, les auraient même menacées d’utiliser des armes juridiques “peu élégantes”, ou d’aller au défaut total de paiement si elles n’acceptaient pas le niveau de décote.

Comment expliquer alors cette euphorie boursière? En réalité le montant de la décote n’est pas ce qui intéressait en premier lieu les marchés. “Depuis longtemps maintenant il est acquis que les banques européennes ont les moyens de faire face à un défaut total de la Grèce. Par contre les investisseurs craignaient que la crise grecque ne se propage au reste de l’Europe. L’attente des marchés était donc focalisée non pas sur le plan grec, mais sur la crédibilité de la solution censée éviter le risque de contagion de la crise aux autres pays européens “, explique Benoit de Broissia, analyste du secteur chez KBL Richelieu. Si tant est que le plan fonctionne, et que le risque de défaut de l’Italie et de l’Espagne soit véritablement écarté, les investisseurs n’ont donc finalement plus tellement de raisons de s’inquiéter pour la santé du secteur.

Besoins de recapitalisation

Ceci d’autant plus que les États ont aussi obligé les banques à renforcer leur matelas de fonds propres, à 9% d’ici le 30 juin 2012. Selon l’Autorité européenne des banques (EBA), 70 établissements européens auront besoin de 106 milliards d’euros dans les prochains mois. Les banques grecques sont les principales concernées (30 milliards) devant les banques espagnoles (26,16 milliards) et italiennes (14,77 milliards).

Pour y parvenir, “les banques devront faire appel en priorité à des sources de capital privées” et ensuite seulement venir sonner aux portes des États.

Toutefois des incertitudes persistent sur la pertinence de cette mesure. Les marchés ont beau quémander depuis longtemps cette recapitalisation, certains observateurs soulignent en effet le risque que les établissements de crédits se consacrent désormais davantage à renforcer leur matelas de fonds propres plutôt qu’à financer l’économie.


Pour répondre à cette incertitude, le régulateur européen (l’EBA) sera intransigeant sur un critère: le plan de recapitalisation des banques ne devra pas se faire au détriment du crédit. Pour certaines banques les analystes estiment que leur capacité à générer des bénéfices devrait leur permettre de répondre aux nouvelles exigences prudentielles. D’autres banques européennes seront moins chanceuses, à l’image des banques grecques qui ne pourront vraisemblablement pas éviter le passage par un soutien public.

Quoi qu’il en soit en apportant une réponse -écrite- au problème de la dette, les États ont donné aux banques la bouffée d’air dont elles avaient besoin. Mais ceci non sans quelques contreparties bien méritées. En attendant que l’objectif de 9% de fonds propres soit rempli, “les banques devraient être sujettes à certaines contraintes concernant la distribution de dividendes et le paiement de primes”, souligne le communiqué, et ce quelle que soit leur manière de se recapitaliser…

Julie de la Brosse

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