Le prix Nobel Stiglitz avance sa recette pour “réécrire les règles de l’économie européenne”

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L’économiste américain Joseph Stiglitz, Prix Nobel d’Économie 2001, a défendu jeudi à Bruxelles, à quelques semaines des prochaines élections européennes, une série de propositions pour réformer l’économie européenne et tendre vers une croissance plus robuste, plus inclusive et une prospérité davantage partagée au profit de tous les citoyens du Vieux Continent. Ces propositions font l’objet d’un livre co-écrit par Stiglitz à l’initiative de la Fondation européenne d’études progressistes.

Présenté jeudi matin sous les ors de la Bibliothèque Solvay, à Bruxelles, en présence du commissaire européen Pierre Moscovici (Affaires économiques et financières, fiscalité et douanes), “Rewriting the rules of the European economy” répond à un best-seller de Stiglitz publié en 2015, “Rewriting the rules of the American economy”, dans lequel l’économiste et professeur d’université dressait un constat implacable de l’économie US, marquée depuis les années 1980 du sceau du néo-libéralisme et par une augmentation des inégalités.

“La croissance n’a profité qu’à quelques-uns au sommet alors que les salaires les plus bas ont stagné pendant des décennies”, constate Joseph Stiglitz, taclant au passage la théorie économique dite “du ruissellement”. “Si on ne change rien, cela va continuer à aller mal. Il faut réécrire les règles, pas pour revenir à ce qu’il y avait avant mais pour écrire l’économie du 21e siècle”.

L’analyse du Prix Nobel d’économie n’est pas plus complaisante avec l’économie européenne et la zone euro, dont la croissance est amorphe depuis la crise de 2008. Les inégalités sont également bien présentes en Europe et les taux de chômage restent élevés, ce qui nourrit les sentiments populistes et anti-européens, constate-t-il.

Joseph Stiglitz pointe du doigt une série de règles et sacro-saints principes qui régissent l’économie européenne, comme la limitation du déficit public à moins de 3% du produit intérieur brut (PIB), la limitation de la dette publique sous 60% du PIB ou une inflation proche mais sous 2%, qui ne reposent en réalité sur aucune analyse économique fouillée et “viennent de nulle part”.

L’économiste américain juge notamment le mandat de la Banque centrale européenne trop étriqué et suggère que la BCE accorde plus d’attention à la création d’emplois plutôt que de se focaliser sur l’inflation. Joseph Stiglitz espère que son ouvrage “suscitera le débat” car “il y a une alternative aux règles existantes”. “Les règles sont faites par les législateurs et les gouvernements. C’est une bonne nouvelle: elles peuvent être changées”. Conscient néanmoins qu’il n’est pas aisé de modifier les règles européennes, pour lesquelles l’unanimité est encore souvent requise, l’économiste rappelle, de manière pragmatique, que les règles actuelles peuvent aussi être interprétées différemment.

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