Labille, Javaux, Castagne : des présidences en sursis

L'ancien patron du holding Arco succédera au socialiste Jean-Pascal Labille à la tête du holding public wallon. © Belga

Le gouvernement wallon prépare le renouvellement des instances des outils économiques wallons. Grandes manoeuvres à tous les étages.

Nouvelle culture politique ou pas, la désignation des administrateurs publics constitue toujours un moment délicieux. En l’occurrence, il s’agit du renouvellement des conseils d’administration d’une série d’outils économiques wallons. Un renouvellement particulièrement intéressant, car il survient dans la foulée d’un renversement de majorité -et donc avec une volonté de “rééquilibrage”- mais aussi à quelques encablures d’élections communales, en vue desquelles il faut parfois savoir ménager des partenaires potentiels. Ces instances sont composées à la proportionnelle, en fonction des résultats des dernières élections régionales (2014), ce qui signifie notamment l’éviction des administrateurs Ecolo. Le ministre de l’Economie Pierre-Yves Jeholet a sollicité les présidents de parti pour connaître leurs candidats-administrateurs. Dès qu’il aura les réponses, le gouvernement wallon devrait valider les nouveaux conseils.

A la SRIW, les 12 mandats sont arrivés à échéance sauf celui de Jean-Pascal Labille (patron de Solidaris et ex-ministre PS dans le gouvernement Di Rupo), désigné à la présidence du CA jusqu’en 2019. Son mandat peut toutefois être remis en cause par l’actionnaire, c’est-à-dire par le gouvernement wallon. L’envie de déboulonner une éminence socialiste en chatouille évidemment plus d’un, mais le risque d’apparaître comme trop revanchard en fait hésiter d’autres. Bref, le gouvernement wallon n’a pas encore tranché la question. Celle-ci doit de toute façon être intégrée dans l’ensemble des nominations en cours, avec ce que cela implique comme savants dosages politiques.

En cas de départ de Jean-Pascal Labille, la présidence reviendrait au MR, qui gagne un troisième mandat d’administrateur au détriment d’Ecolo. Taillé sur mesure pour Michaël Vanloubbeeck, administrateur depuis une dizaine d’années ? Pas vraiment, car il est aussi chef de cabinet du ministre fédéral de la Mobilité François Bellot et qu’un tel cumul n’est plus dans l’air du temps. Le PS reste à 4 administrateurs et le cdH à 1. Il y a également trois administrateurs indépendants : Eric Domb (Pairi Daiza) et Olivier Lefebvre (Xylowatt) devraient être reconduits, tandis que Pierre Rion ferait son entrée au CA de la SRIW. Le douzième administrateur est un représentant de Belfius.

La Sogepa connaît une composition particulière : sur papier, son CA est strictement politique, mais dans les faits il est, depuis 2012 présidé par un administrateur indépendant, à savoir Thierry Castagne, directeur général d’Agoria-Wallonie. A l’époque, c’est Ecolo qui avait accepté de se priver d’un mandat d’administrateur pour permettre l’arrivée de Thierry Castagne. Les Verts n’ont désormais plus droit à un mandat, mais on suppose qu’un autre parti posera le même geste (sans doute le MR puisqu’il récupère le siège d’Ecolo). “Je suis disponible pour poursuivre ce travail sous le même statut d’indépendant, nous a confié le patron d’Agoria-Wallonie. Avec le monde professionnel, je plaide d’ailleurs pour la présence d’une certaine dose d’administrateurs indépendants, à côté de ceux relevant des quotas politiques.” Thierry Castagne assure par ailleurs avoir pu exercer son mandat en parfaite indépendance, sans contacts ou demandes particulières provenant des partis politiques. On critique si souvent le comportement interventionniste des élus pour saluer ce fait.

La réforme des outils économiques prévoit la fusion de la Sogepa avec la Spaque (chargée de l’assainissement des sites). En bonne logique, le renouvellement des instances de ces deux organismes devrait être coordonné en vue de cette fusion. La Spaque est actuellement présidée par le socialiste Vincent Bourlard, secondé d’un vice-président cdH Eric Poncin.

Le train de nominations concerne aussi le puissant invest liégeois Meusinvest. A sa tête, on retrouve aujourd’hui l’écologiste Jean-Michel Javaux. Tous partis confondus, on salue son action et son dynamisme, mais, gros problème, Ecolo n’aura plus aucun mandat dans un CA ramené de 22 à 15 unités. Les partenaires privés envoient 7 administrateurs, le gouvernement wallon désigne lui 5 politiques (2 PS, 2 MR, 1 cdH) et 3 indépendants. Jean-Michel Javaux peut-il être l’un de ces trois indépendants ? Contactés par nos soins, les états-majors ne sont pas très chauds à l’idée d’accorder un label “indépendant” à une personne qui conduira une liste écologiste aux Communales d’octobre. Les Verts ont si souvent dénoncé -et à juste titre- les “petits arrangements entre amis” des autres partis, que ceux-ci n’ont pas spontanément envie de leur faire pareil cadeau aujourd’hui.

Une issue a été proposée par Benoît Lutgen, ami de longue date de Jean-Michel Javaux, bien avant que l’un et l’autre ne s’engagent en politique : le reprendre sur le quota cdH (les accords MR-cdH de l’été dernier octroient la présidence de Meusinvest aux humanistes). C’eût été une très belle prise pour le cdH, mais l’intéressé a décliné une offre qui aurait été ressentie comme un véritable coup de poignard chez Ecolo.

Vous prenez tous ces éléments, vous les secouez et vous vous demandez si la nouvelle majorité, soucieuse d’imprimer son empreinte, peut reconduire à la fois Labille, Javaux et Castagne (PS, Ecolo et indépendant). Les paris sont ouverts. On vous glisse un indice avant que vous ne fassiez votre mise: si la présidence de la SRIW devait changer de camp, pas sûr que le boulevard de l’Empereur remue ciel et terre pour sauver le soldat Labille lui qui, en décembre dernier, avait sonné une très vive charge contre la présidence d’Elio Di Rupo…

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