“La Wallonie n’est pas la forteresse de résistance à la politique fédérale”

© BELGA

Le ministre-président wallon Paul Magnette (PS) a inauguré ce mardi le concept de ” causerie ” avec la presse. Au cours d’une discussion informelle, il a évoqué ses relations avec le gouvernement fédéral, l’avenir du Plan Marshall et, surtout, la nécessité de redonner de la vitalité au débat démocratique en Wallonie.

Plus d’un wallon sur deux n’a strictement aucun avis sur les six premiers mois d’action du nouveau gouvernement régional. Cette “espèce d’indifférence” interpelle le ministre-président Paul Magnette (PS), politologue à l’ULB dans une autre vie, et qui s’inquiète de ce désenchantement à l’égard du politique et de notre système démocratique. “Je comprends que nos action fasse moins de fracas que celle du gouvernement fédéral, mais la Wallonie doit exister davantage dans le débat public, a-t-il expliqué ce mardi lors d’une “causerie” avec la presse. Nos options doivent alimenter le débat contradictoire. Et qu’à la fin, que 55% des Wallons soient pour ou contre le gouvernement mais, qu’au moins ils aient une opinion.”

Il promet donc que, dès l’an prochain, tous les ministres wallons présenteront une note de politique générale, explicitant les orientations gouvernementales. “Les débats parlementaires portent trop sur des procédures et des délais, et peu sur le contenu”, insiste Magnette. Il convient que les majorités successives ont joué dans ce jeu, avec des discours très “méthode Coué” sur les frémissements du redressement économique. “C’était sans doute nécessaire pour casser des clichés à l’égard de la Wallonie, ajoute-t-il. Mais ce discours s’est essoufflé et devient même contre-productif.”

Attirer des services autour de l’industrie

Qui dit débat wallon, dit immanquablement Plan Marshall. C’est donc essentiellement de cela dont Paul Magnette a “causé” ce mardi. N’aurait-il pas mieux valu abandonner le concept et repartir d’une page blanche, plutôt que de toujours remanier une formule conçue en 2005 et qui en est déjà à sa troisième adaptation ? “Je ne pense pas qu’il faille chercher la nouveauté pour le plaisir, répond Magnette. Le risque est alors d’avoir des effets d’annonce, qui entraîne la déception six mois plus tard.”

On garde donc le Plan Marshall, en y insérant désormais le numérique et l’économie circulaire dans l’espoir “d’anticiper la prochaine rupture technologique” pour reconstruire le tissu industriel régional. Une attention plus grande sera en outre accordée aux investissements complémentaires dans l’économie des services. L’industrie est “la locomotive” de l’économie, pour reprendre l’expression du ministre-président, mais cette locomotive n’a d’intérêt que si elle tire des wagons. En l’occurrence, les bureaux de consultance, de comptabilité, d’avocats et autres s’implantent encore très peu autour des pôles industriels wallons. “C’est anecdotique mais, souvent, quand je visite une entreprise, si on fait appel à un traiteur, il vient de France, de Bruxelles ou de Flandre, confie Paul Magnette. Nous devons vraiment capter en Wallonie la valeur ajoutée induite par l’industrie.” Il mise notamment sur le développement de quartier d’affaires au coeur des principales villes wallonnes.

Loyauté fédérale

“Je ne veux pas faire de la Wallonie, la forteresse de résistance à la politique fédérale.” Paul Magnette prône résolument “la loyauté fédérale”, même si l’asymétrie actuelle (les partis de la coalition wallonne, PS et cdH, sont dans l’opposition fédérale) ne facilite pas les choses. Il espère que le Premier ministre Charles Michel convoquera rapidement une réunion du comité de concertation afin de régler des dossiers comme la répartition des quotas de CO2 ou la cohérence des projets d’aménagement fluviaux, qui concernent “naturellement” toutes les Régions. Demain, quand chacun commencera à utiliser vraiment ses nouveaux leviers fiscaux, il sera vraiment indispensable de se concerter pour éviter les interactions négatives. C’est d’ailleurs l’un des conseils repris dans le rapport du FMI sur la Belgique, remis ce lundi.

Cela dit, lors de l’inauguration du nouveau commissariat de police de Charleroi (dont il est le bourgmestre, s’il faut le rappeler), Magnette n’a pas souhaité la présence du ministre de l’Intérieur Jan Jambon (N-VA). On a déjà vu mieux comme signe de loyauté fédérale. “J’ai hésité et j’en ai même parlé avec Olivier Chastel (NDLR : le président du MR est aussi Carolo) qui est mon seul contact avec le niveau fédéral, explique-t-il. Mais finalement, les anciens combattants menaçaient de provoquer un incident si le ministre de l’Intérieur venait et les répercussions auraient été pires encore.”

Le ministre-président wallon tire une leçon de cet épisode et des autres qui ont concerné le secrétaire d’Etat à l’Immigration Théo Franken (N-VA) : la Belgique a besoin d’une circonscription fédérale, d’hommes et de femmes politiques qui mènent campagne dans les différentes régions du pays. “S’ils avaient l’habitude de débattre en Wallonie et à Bruxelles, ces gens sauraient qu’il y a des sensibilités très différentes sur les sujets relatifs à la collaboration”, dit-il.

Ses trois engagements pour 2015

Lors de sa “causerie”, Paul Magnette a précisé ses trois engagements pour l’année prochaine. On notera qu’ils impliquent tous une négociation avec les partenaires sociaux, comme si le ministre-président voulait démontrer que ce qui est bloqué à Bruxelles fonctionne parfaitement à Namur…

– Finaliser le Plan Marshall 4.0, après une concertation avec les partenaires sociaux.

– Installer le nouvel organisme social, qui gèrera les matières sociales (santé, soins aux personnes âgées, allocations familiales, personnes handicapées) régionalisées à travers la 6e réforme de l’État.

– Conclure un pacte pour l’emploi avec les partenaires sociaux. Il déterminera l’affectation de l’enveloppe de 1,2 milliard dévolue aux aides à l’emploi et pourrait reconsidérer l’ensemble des dispositifs d’aide existants aujourd’hui.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content