La Wallonie balaie les nouveaux chiffres budgétaires du Fédéral

Paul Magnette (PS), Maxime Prevot (cdH) et Christophe Lacroix (PS) © Belga

Le gouvernement wallon a décidé de limiter son contrôle budgétaire à un effort de 140 millions, tenant à peine compte de l’impact de la nouvelle loi de financement.

Le gouvernement wallon a choisi de ne pas se préoccuper des calculs fédéraux, qui rabotent ses recettes fiscales. Il limitera son effort budgétaire à 140 millions d’euros, alors qu’il en aurait fallu plus du double pour respecter la trajectoire de retour à l’équilibre, en fonction des nouveaux chiffres fédéraux.

Si les autres Régions emboîtent le pas à la Wallonie, cela risque bien de faire dériver les finances belges et d’alerter la Commission européenne. Le Premier ministre Charles Michel a fustigé ce vendredi ” l’irresponsabilité ” du gouvernement wallon, qui ” reporte le fardeau sur les générations futures “. Il regrette que la Wallonie se place ” dans une logique d’affrontement politique “.

A l’Elysette, on estime au contraire que c’est le Premier ministre qui a ” débranché la prise du fédéralisme de coopération ” (dixit le ministre Maxime Prevot, cdH), en annonçant une diminution des recettes régionales de 750 millions d’euros, sans la moindre concertation. La Wallonie se dit toutefois toujours prête à une discussion sereine sur le sujet. A condition, précise le ministre-président Paul Magnette (PS), que les Régions soient respectées comme il se doit. “Les Régions constituent un partenaire à égalité et ne sont pas sous tutelle du Fédéra “, insiste-t-il.

D’où viennent ces 750 millions?

Le gouvernement fédéral a, à tout le moins, manqué d’élégance dans ce dossier, en bouclant son propre contrôle budgétaire, sans attendre d’évaluer les derniers et très surprenants chiffres du SPF Finances avec les autres entités. D’où viennent ces 750 millions d’euros, que l’Etat fédéral ne devrait finalement pas verser aux Régions ? On va tenter de vous l’expliquer.

La nouvelle loi de financement, qui entre en vigueur avec les budgets 2015, remplace les anciennes dotations par des additionnels régionaux à l’impôt des personnes physiques. Ils ne s’appliquent pas “bêtement” sur les recettes de l’IPP mais sur “l’impôt Etat”, une notion inédite. Il s’agit de l’impôt dû, après les réductions sur la quotité exemptée, les revenus de remplacements et les revenus d’origine étrangère. Ces réductions restent ainsi strictement fédérales, comme le voulaient les partis francophones, soucieux d’éviter une cogestion de l’IPP. On déduit ensuite de cet Impôt Etat un facteur d’autonomie de 25,99%. Sur le solde, on applique les additionnels régionaux (35,117% pour un résultat neutre pour le contribuable) et on obtient la recette pour chaque Région.

Le SPF Finances doit estimer cette recette pour l’élaboration des budgets de chaque entité. Dans le budget initial, il avait évalué l’Impôt Etat en se basant sur les recettes de l’IPP en 2011, extrapolées à l’exercice d’imposition 2015. Depuis, il a refait ses calculs sur base des recettes de l’IPP en 2013 (comme prévu dans la LSF) et en mettant en place un nouveau simulateur. Résultat : le montant dégringole de 45,9 à 42,7 milliards. On applique le facteur d’autonomie et l’on intègre les dépenses fiscales régionalisées (déductibilités crédit hypothécaire, titres-services et investissements économiseurs d’énergie) et on arrive à une perte de recettes de 750 millions pour les Régions.

Pourquoi les recettes ne diminuent-elles pas aussi pour le Fédéral?

Mais, direz-vous, si les Régions doivent acter la perte de 25,99% de l’écart entre les deux estimations des Finances, le Fédéral ne doit-il pas, lui, acter la perte de 74,01% du montant? Et bien non. Le budget de l’État repose sur les recettes totales de l’IPP de l’année en cours, estimées et ajustées au fil des mois par le service d’étude du SPF Finances. La notion d’Impôt Etat n’intervient que dans le volet ” Dépenses “, au moment de déterminer la somme à verser aux Régions. Donc, quand on recalcule l’Impôt Etat, les recettes fédérales ne bougent pas mais ses dépenses de transfert sont diminuées de 750 millions.

Le facteur d’autonomie a été fixé pour une période de trois ans, afin de limiter la volatilité des recettes. Le pourcentage définitif sera déterminé fin 2016 par la Cour des comptes, sur base des dernières recettes de l’IPP. On s’attend à ce que les Régions récupèrent alors une partie (190 millions, dit-on en fonction des paramètres actuels) des fameux 750 millions. C’est notamment pour cela que l’État a mis en réserve la moitié du montant.

La Wallonie balaie les nouveaux chiffres budgétaires du Fédéral
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