La viande, un business au goût douteux

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L’ancien directeur qualité d’un puissant acteur français de la viande dénonce des pratiques frauduleuses qui touchent un secteur sous pression. Steaks avariés, recongélation, intoxications alimentaires… Pour protéger leurs marges, certains industriels sont prêts à tout. Gare à la crise de foie.

“Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme”, telle est la devise du directeur commercial de la société Castel Viandes, explique Pierre Hinard dans son livre Omerta sur la viande, un témoin parle (éd. Grasset, 2014). Cette devise, l’entreprise l’applique à la lettre. Un hypermarché renvoie ses invendus chez Castel ? Ils repartent chez un traiteur industriel. Ce dernier renvoie la viande avariée ? Elle repart en steaks hachés pour une chaîne de restaurants. Et ainsi de suite.

Engagé comme directeur qualité de l’entreprise en 2006, Pierre Hinard tente de remettre Castel Viandes dans le droit chemin. En vain. Après avoir lancé l’alerte à plusieurs reprises en interne, il est licencié. Il décide alors de dénoncer publiquement les pratiques douteuses de son ancien employeur. Une action qui débouche en juin 2014 sur la mise en examen de la société en tant que personne morale et de plusieurs dirigeants de Castel Viandes, dont son PDG Joseph Viol, pour “tromperie sur la qualité substantielle de la marchandise” et “tromperie aggravée par un risque pour la santé de l’homme”.

Filières de qualité

Lorsque Pierre Hinard débute chez Castel Viandes, c’est pour faire profiter l’entreprise de ses compétences d’ingénieur agronome, spécialisé dans les filières de qualité dans l’agro-alimentaire. Castel Viandes est un gros industriel basé à Châteaubriant en Loire-Atlantique, actif dans l’abattage et la découpe de viande bovine (22.800 tonnes de bétail abattues en 2013), qui emploie 330 personnes et a généré un chiffre d’affaires de 102 millions d’euros en 2013.

Enthousiaste à ses débuts, le directeur qualité va vite déchanter. Dans son ouvrage, il raconte les pratiques inquiétantes de son employeur, sans lésiner sur les détails poisseux. Sa première rencontre avec la “remballe”, il la fait six mois après son arrivée. Cette pratique illégale consiste à récupérer des morceaux de viande impropres à la vente pour les remettre dans le circuit commercial avec un nouvel étiquetage.

Pierre Hinard découvre que son employeur transforme en rôtis une viande visiblement avariée afin de la renvoyer vers un traiteur industriel. Cette viande, ce sont en fait des invendus d’un autre client, le distributeur Auchan, qui ont été retravaillés plusieurs dizaines de jours après leur mise sous vide. “A ce stade, légalement, on ne peut plus utiliser la viande”, souligne l’auteur.

Lire le dossier complet dans le magazine Trends-Tendances de cette semaine.

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