” La Fed détruit le dollar “

© Reuters/Kacper Pempel

Est-ce le début de la fin pour les Etats-Unis ? Pour Myret Zaki, rédactrice en chef adjointe du magazine suisse Bilan, il n’est pas abusif de poser la question en ces termes-là.

Auteur d’un livre paru en début d’année sur le déclin du dollar et la santé financière des Etats-Unis, que Myret Zaki juge techniquement en faillite et dont la monnaie ne serait plus la plus sûre du monde, la journaliste est convaincue que le pays se rapproche inexorablement du défaut de paiement. Le 26 mai dernier, dans un entretien avec Trends-Tendances, elle évoquait déjà la dégradation par Standard & Poor’s de la note souveraine américaine comme possible étincelle pouvant mettre le feu aux poudres. Nous l’avons recontactée.

Que penser du krach boursier de la semaine dernière ?

Cette correction tenait de la panique. C’est un début, un frémissement. La vraie crise se manifestera lorsque les marchés reconnaîtront que les bons du Trésor américain ne sont pas sans risque. Ma recommandation est claire : il faut sortir de ce marché de la dette américaine. Il est manipulé par la Fed, qui procède à des rachats massifs pour soutenir les cours et rassurer. C’est pourtant actuellement le marché le plus risqué au monde.

Selon vous, Standard & Poor’s a donc eu raison de dégrader la note des Etats-Unis ?

Oui, mais trop peu, et trop tard. Les bons du Trésor américain sont des titres dont la valeur est inévitablement amenée à s’effondrer. La dette américaine est un fardeau de plus de 14.000 milliards de dollars qui ne pourra pas être remboursé. Il n’y a, à l’heure actuelle, aucune solution crédible sur la table pour résorber le déficit budgétaire américain. C’est un risque intolérable et pas du tout compensé par des taux d’intérêt à 10 ans à peine supérieurs à 2 %. La seule justification à cette faible rémunération est, je le répète, l’intervention massive de la plus puissante banque centrale au monde. En réalité, la Fed administre activement le marché de la dette aux côtés des investisseurs. Mais son raisonnement est fallacieux. Elle commet une grave erreur en faisant tourner la planche à billets pour soutenir ce marché, afin de maintenir les taux d’intérêt artificiellement bas. C’est une politique à court terme dangereuse, qui fausse la valeur des bons du Trésor et arnaque les investisseurs. In fine, tout ceci finit par détruire la valeur d’une monnaie.

Une grave crise économique et financière mondiale est-elle à nos portes ?

Les Etats-Unis n’attendront pas la crise de leur dette pour entrer en récession. Ils y sont déjà. L’économie américaine ne produit plus de croissance, ni d’emplois. Ce qu’on risque en plus, c’est un défaut de paiement des Etats-Unis. La Fed fera tout ce qu’elle peut pour éviter le pire avant les élections présidentielles de 2012. Mais une fois les élections passées, le vernis risque de se craqueler. Très vite, les Etats-Unis vont se retrouver étranglés financièrement, incapables de payer le service de la dette. Rien qu’une augmentation de 1 % des taux américains à 10 ans de 2,5 à 3,5 % par exemple, coûte 140 milliards de dollars d’intérêts supplémentaires. Bref, à un moment donné, le schéma de Ponzi orchestré par la Fed prendra fin dans la douleur. Et pour tout le monde.

PROPOS RECUEILLIS PAR SÉBASTIEN BURON

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