La chasse aux fraudeurs a rapporté 4 milliards mais…

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Le ministère des Finances a une nouvelle fois réussi à réduire la fraude fiscale au cours de l’exercice 2009. Certains estiment pourtant qu’il pourrait faire rentrer davantage d’argent dans les caisses de l’Etat.

La question est régulièrement posée : la traque aux contribuables indélicats est-elle vraiment efficace ? Pour Bernard Clerfayt, secrétaire d’Etat adjoint aux Finances, en charge de la lutte contre la fraude fiscale, cela ne fait pas l’ombre d’un doute. Il en veut pour preuve les résultats de cette chasse aux fraudeurs qui, en 2009, a rapporté 4,23 milliards d’euros, soit 7 % de plus qu’en 2008. Sur l’ensemble des trois années de législature, ce sont 12,2 milliards de suppléments d’impôts qui ont été enrôlés. “Maintenir, année après année, de tels résultats est une excellente performance, s’est félicité Bernard Clerfayt lors d’une conférence de presse le 14 juillet dernier. C’est la preuve d’un travail efficace de l’administration fiscale.” D’autant plus efficace, estime-t-il, que le contexte économique a été marqué par une croissance négative.

Peut mieux faire ?

Attention : il s’agit là de montants réclamés et donc non perçus. Une partie des contribuables vont les contester devant les tribunaux. Combien l’administration réussit-elle in fineà récupérer dans le cadre de cette lutte contre la fraude fiscale ? Elle n’est toujours pas en mesure de livrer la moindre statistique à ce sujet. Bernard Clerfayt le concède volontiers. Un programme informatique en cours d’élaboration, baptisé Mississippi, devrait per- mettre à terme d’avoir une idée précise des sommes fraudées effectivement récupérées.

Autre bémol : d’aucuns pensent que ce chiffre de 4 milliards d’euros récoltés bon an mal an pourrait être amélioré. “C’est un maigre résultat, prétend ce familier de l’administration fiscale. Avec des fonctionnaires motivés, une gestion automatisée des redressements fiscaux et la fin du secret bancaire, on pourrait obtenir de bien meilleurs chiffres.” Selon une récente étude de l’ULB, réalisée à la demande de la FGTB, les pertes en recettes fiscales représenteraient 20 milliards d’euros dans notre pays. Oui mais “il faut distinguer fraude fiscale et fraude sociale”, rétorque Bernard Clerfayt, soulignant que cette dernière n’a rapporté que 120 millions d’euros l’an passé. Quant aux 108 recommandations de la commission parlementaire sur la grande fraude fiscale, il note que, sur les 57 mesures relevant directement des Finances, “13 ont déjàété réalisées et 22 autres sont en cours”. Sauf qu’une des mesures les plus importantes se fait toujours attendre : la levée du secret bancaire. La faute à la chute du gouvernement, se défend le secrétaire d’Etat, qui disposait d’un projet de texte finalisé.

Trop d’impôt tue l’impôt Au-delà des polémiques, comment expliquer ce chiffre de 4 milliards d’euros ? Il est d’abord le fruit de contrôles classiques de plus en plus efficaces. Ceux-ci ont permis au fisc d’enrôler 3,2 milliards d’euros de suppléments d’impôts en 2009. Merci les programmes informatiques (data mining, Mercurius, etc.), paraît-il, de plus en plus performants. D’un autre côté, le travail mené par le nouveau département de lutte contre la fraude fiscale (anciennement ISI) a rapporté un bon milliard d’euros en 2009. Grâce notamment à une intensification de la collaboration internationale. Ainsi, 54 dossiers ont été ouverts sur la base du fameux CD-Rom du Liechtenstein – 13 d’entre eux ont déjà donné lieu à un enrôlement pour 8,6 millions d’euros.

Enfin, pour faire diminuer la fraude fiscale, Bernard Clerfayt a une nouvelle fois plaidé pour la mise en place d’une “DLU bis” et une baisse de la pression fiscale, “principal moteur de l’envie de frauder”. Selon les auteurs de l’étude évoquée plus haut, il n’existerait pourtant pas nécessairement de corrélation entre fraude et taux d’imposition. La Grèce, pays à faible imposition, est un des champions d’Europe de la fraude fiscale. Inversement, la fraude est moins importante dans les pays scandinaves, dont l’imposition est plus élevée que la moyenne européenne.

Sébastien Buron

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