La BCE abaisse son taux à la surprise générale

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Pour sa première action comme président de la BCE, Mario Draghi a pris tout le monde de court en abaissant son principal taux directeur de 0,25 points, à 1,25 %, jeudi.

A la surprise générale, la Banque centrale européenne a abaissé jeudi son principal taux directeur à 1,25 %, a annoncé l’une de ses porte-paroles, contre 1,5 % précédemment. L’Italien Mario Draghi, qui doit tenir sa première conférence de presse en tant que nouveau président de l’institution monétaire européenne à partir de 14 h 30, peut s’attendre à un feu roulant de questions au vu de l’évolution dramatique de la crise en zone euro ces derniers jours…

La BCE a également abaissé de 25 points de base ses deux autres taux directeurs, à savoir le taux de dépôt au jour le jour, qui est désormais de 0,5 % (contre 0,75 % précédemment), ainsi que son taux de prêt marginal, passé à 2 % contre 2,25 % auparavant).

La BCE attendue au tournant

Economistes et marchés espéraient un geste de la part de la BCE en faveur des pays en difficulté de la zone euro, mais pas forcément sur les taux dès ce mois-ci. La BCE est en effet attendue au tournant sur son programme de rachat d’obligations publiques sur le marché secondaire. Cependant, par crainte de compromettre son indépendance ou d’inciter les gouvernements au laxisme budgétaire, la BCE ne conduit ce programme que de mauvaise grâce et espère que le Fonds européen de stabilité financière (FESF) prenne bientôt le relais.

En dépit de plusieurs sommets européens qui se sont penchés sur la crise, la situation est redevenue explosive depuis que le Premier ministre grec Georges Papandréou a décidé d’organiser un référendum sur le plan de sauvetage du pays, qui met en suspens de facto toutes les aides européennes prévues. Par ailleurs les taux d’emprunt de l’Italie et de l’Espagne, deux gros pays également dans le collimateur des marchés, sont toujours sous haute tension.

A l’issue de la conférence de presse au siège de la BCE à Francfort, Mario Draghi doit gagner Cannes pour participer au sommet des pays du G20, où la crise de la zone euro occupera encore le devant de l’affiche.

Draghi : les Etats ne doivent pas trop compter sur l’aide de la BCE

Le nouveau président de la Banque centrale européenne a appelé jeudi les gouvernements de la zone euro à ne pas trop compter sur son institution pour résoudre la crise de la dette. Interrogé sur la possibilité de voir la BCE augmenter ses rachats d’obligations publiques de pays en difficulté de la région, Mario Draghi a rétorqué que “la façon de réagir n’est pas de compter sur une aide extérieure” mais, pour ces gouvernements, de compter sur “leur capacité à se réformer eux-mêmes”.

La BCE s’était laissé convaincre, au printemps 2010, de racheter de la dette publique sur le marché secondaire afin de faire baisser les taux d’emprunt de la Grèce. Depuis, elle est aussi intervenue pour racheter de la dette portugaise, irlandaise, espagnole et italienne afin de tenter d’enrayer la contagion de la crise. Mais ces achats sont trop parcimonieux et réalisés de trop mauvaise grâce, selon les économistes, pour rassurer vraiment les marchés, qui spéculent désormais allègrement contre l’Italie.

Face aux attentes, Mario Draghi a signifié : “Personne ne peut nous obliger (à augmenter ces achats). Nous sommes indépendants. Tous les gouvernements de la zone euro doivent montrer leur détermination inflexible à honorer leur signature souveraine individuelle (Ndlr, leur capacité à honorer leurs échéances), élément-clé pour assurer la stabilité financière dans la zone euro dans son ensemble.”

Le nouveau président de la BCE pessimiste pour la croissance en zone euro

Mario Draghi s’est par ailleurs montré alarmiste pour la croissance dans une zone euro secouée par la crise de la dette. L’économie de la zone euro est affectée par des “risques” et des “incertitudes particulièrement hautes et persistantes”, a-t-il déclaré lors de sa première conférence de presse mensuelle.

Le président de la Banque centrale européenne a jugé “très probable une révision à la baisse significative des prévisions de croissance en 2012” de la BCE en décembre. En septembre, la BCE avait déjà baissé sa prévision de croissance pour la zone euro en 2012, à 1,3 % contre 1,7 % trois mois plus tôt. Pour cette année, la BCE table pour l’instant sur une croissance de 1,6 %.

L’inquiétude de Mario Draghi semble partagée par les 17 membres du conseil des gouverneurs de la BCE : la décision surprise de l’institution de baisser jeudi son taux directeur à 1,25 % a été “unanime”, a précisé son président. Autrement dit, même les représentants d’une ligne monétaire dure, dont l’Allemagne, l’ont approuvée.

Dans le même temps, Mario Draghi a dit que l’inflation en zone euro restait “élevée” mais qu’elle allait “diminuer au cours de l’année 2012, sous les 2 %”, contre 3 % aujourd’hui, conformément à l’objectif de moyen terme de la BCE. Une faible croissance à l’horizon en zone euro refroidit en effet les pressions inflationnistes, a-t-il expliqué.

Ce ton alarmiste sur la croissance mais rassurant sur l’inflation semble indiquer que, s’il le fallait, la BCE aurait la marge de manoeuvre nécessaire pour baisser encore ses taux.

Trends.be, avec Belga

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