L’Iran est en passe de devenir la nouvelle Chine

La Banque centrale d'Iran, à Téhéran. © REUTERS

L’Iran, de retour dans le concert des nations, offre de nombreuses possibilités d’investissement. Ses atouts rappellent ceux de la Chine quelques années plus tôt.

Ce qui s’est passé pour la Chine en 1990 vaut pour un autre pays en 2017 : l’Iran, qui sort de son isolement international. Le dynamisme et l’esprit d’entreprise qui ont longtemps caractérisé ce pays devraient renaître. Les spécialistes de la Chine savent que les investissements industriels sont le moteur de la croissance. Or les occasions en Iran ne manquent pas dans ce domaine. Son industrie automobile est la 18e du monde. Le pays a plus de 50 sociétés pharmaceutiques, bon nombre d’entre elles cotées à la Bourse de Téhéran. Grâce à ses 21 sites classés au patrimoine mondial par l’Unesco, le tourisme pourrait fleurir. Le secteur alimentaire et celui des tapis sont déjà compétitifs à l’international. Si l’on ajoute à ces ingrédients le développement des relations commerciales avec des amis anciens (en Europe) et nouveaux (en Asie), une rapide modernisation économique est tout à fait concevable.

L’expansion de la Chine était également liée à la démographie. La situation en Iran y est tout aussi favorable : 60 % de sa population a moins de 30 ans. Cette abondance de main-d’oeuvre permettra de maîtriser la hausse des salaires lors de la reprise économique à venir, surtout si elle est associée à une progression de la participation des femmes au marché du travail. Si la fuite des cerveaux s’inverse – environ un Iranien diplômé de l’université sur quatre vit à l’étranger, la productivité s’en trouvera améliorée.

Le défi ? Trouver un point d’équilibre entre la nécessaire séduction des investisseurs et la satisfaction des mouvements religieux conservateurs.

La nouvelle génération du numérique chinois est rapidement montée en puissance, donnant à des entreprises locales comme Alibaba la possibilité de dominer le marché intérieur. La population jeune de Téhéran, urbaine et friande de technologies, soutient déjà un nombre croissant de start-up. Digikala, l’équivalent local d’Amazon, en est un parfait exemple. Lancée en 2007, la société était spécialisée dans l’électronique, puis elle s’est diversifiée en proposant un large éventail de produits de consommation.

La nouvelle route de la soie

Après avoir rejoint l’Organisation mondiale du commerce en 2001, la Chine a vite dominé la fabrication mondiale des produits d’exportation. Ce faisant, elle s’est emparée de la part de marché d’autres exportateurs asiatiques, tout en devenant grande importatrice régionale de composants et de pièces détachées. Une évolution comparable est possible en Iran, si le pays devient une base de fabrication et une plateforme commerciale pour le Moyen-Orient, le Caucase et l’Asie centrale. Téhéran doit cependant rénover ses infrastructures de transport. A cet égard, le gouvernement fait miroiter des contrats aux sociétés européennes et asiatiques, incluant des prises de participation. L’Inde a conclu un marché à hauteur de 500 millions de dollars pour la construction d’un port en eau profonde à Chabahar. Il est probable que la Chine privilégie elle aussi ce type d’investissements, en faisant participer l’Iran à son initiative ” Une ceinture, une route “, aussi appelée ” nouvelle route de la soie “.

Le Parti communiste chinois navigue entre maintenir le contrôle de l’Etat sur l’économie, et donner une marge de manoeuvre au secteur privé pour qu’il se développe. Les investisseurs étrangers ont été les bienvenus, mais des pans entiers de l’économie leur restent fermés. Dans d’autres, ils ne peuvent qu’être partenaires minoritaires au sein de coentreprises. Hassan Rohani, président réformiste iranien, qui sera sans doute réélu en 2017, devra lui aussi trouver un point d’équilibre entre la nécessaire séduction des investisseurs et la satisfaction des mouvements religieux conservateurs. Le sentiment protectionniste prévaudra pendant un certain temps, dans un contexte où une puissante élite refusera de renoncer à son emprise sur des secteurs-clés de l’économie.

Les progrès fulgurants de la Chine ces dernières décennies portent à croire qu’un système politique autoritaire et une économie fondée sur la propriété publique peuvent générer des hausses rapides de revenus. En 2017, les entreprises qui ont réussi sur le marché chinois seraient bien inspirées d’observer les similitudes que présente l’Iran.

Par Pratibha Thaker, directeur Moyen-Orient/Afrique chez “The Economist”.

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