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L’idée d’une taxe au kilomètre (et les effets pervers qui l’accompagnent)

Évoquée il y a quelque temps, l’idée d’une taxe de circulation en fonction des kilomètres parcourus revient à l’esprit, cette fois, de certains dirigeants flamands.

Encore imprécis, le projet semble être de remplacer la taxe annuelle de circulation, forfaitaire, par une redevance d’utilisation des routes en fonction du nombre de kilomètres parcourus. Une possibilité serait également de pondérer davantage les distances en période d’heure de pointe, et de compter différemment la redevance en fonction du type de route (urbaine ou rurale, autoroute ou route ordinaire) utilisée.

Taxe au kilomètre: il faut être vigilant, le souhait des hommes politiques est rarement de réduire les impôts…

Il faut bien sûr toujours être vigilant, parce que le souhait des hommes politiques est rarement de réduire les impôts. Si cette redevance devait s’ajouter à la taxe régionale de circulation déjà perçue actuellement, cela ne ferait encore qu’alourdir le fardeau fiscal des automobilistes, qui est déjà colossal, si l’on tient compte des accises et de la TVA sur les produits pétroliers, de la taxe sur l’acquisition des véhicules neufs et de la taxe à l’immatriculation, des taxes sur les assurances et des multiples autres prélèvements.

En revanche, si l’idée est simplement de remplacer, pour une recette totale constante, une taxe “aveugle”, comme la taxe de circulation, par une redevance “intelligente”, il faut admettre que celle-ci n’a pas que des inconvénients. Il paraît en effet peu logique qu’une personne utilisant rarement sa voiture, pour de brefs déplacements, doive payer une taxe de circulation identique à celle due par celui qui circule tous les jours sur des distances importantes.

L’idée de faire payer les services publics, non plus de manière systématique par tous les contribuables, ou par tous les utilisateurs sans distinction suivant l’importance du service perçu, mais par les utilisateurs en fonction du bénéfice qu’ils en ont retiré paraît assez justifiée. Celui qui utilise un service public de manière intensive doit, comme pour les services acquis sur le secteur marchand, payer plus que celui qui l’utilise moins.

La logique serait d’ailleurs alors de faire de même pour les autres services de transport, comme les chemins de fer, les bus ou les trams, et de réclamer à chacun le coût réel d’utilisation de ces véhicules, plutôt que de faire supporter, comme actuellement, une part très importante de ce coût par l’ensemble de la population, y compris des personnes qui n’en bénéficient jamais.

Si l’on admet cette philosophie, suivant laquelle chacun paie pour les services qu’il reçoit, l’idée d’une taxe au kilomètre parcouru peut être séduisante si elle n’implique aucune recette nouvelle pour l’Etat et les régions.

Mais les modalités qu’on envisage sont de nature à la rendre très dangereuse. Si l’on installe en effet partout des détecteurs lisant les plaques d’immatriculation et qu’on les relie à un ordinateur central qui déterminera les parcours de chaque véhicule, en temps et heure, l’on va mettre à la disposition des autorités une machine infernale qui va permettre de suivre les mouvements de chacun et de conserver ces données. Celles-ci pourront alors être utilisées par les autorités, qui ont tendance à permettre de plus en plus l’interconnexion de leurs fichiers, pour accroître encore le contrôle sur toutes les activités de chacun, au mépris de la vie privée.

Plusieurs Etats américains ont pourtant trouvé une solution qui ne présente pas cet inconvénient. Au lieu de détecter les plaques, les installations se trouvant sur certaines routes captent simplement des signaux émis par un transpondeur que chacun peut acquérir anonymement dans des kiosques à journaux ou des supermarchés. La valeur attachée à cet équipement, très bon marché, est réduite à chaque passage, comme sur une carte téléphonique prépayée et l’on peut la recharger lorsque c’est nécessaire. Cela permet le paiement anonyme des redevances et empêche toute centralisation des données concernant l’identité des conducteurs. Leur plaque n’est photographiée que lorsqu’ils sont en infraction, c’est-à-dire lorsqu’ils ne disposent pas du transpondeur requis, et ce n’est que dans ce cas que les autorités connaissent leur identité.

Si l’on introduit un jour le système de la taxe au kilomètre sans utiliser un tel système, c’est que les politiques qui l’auront votée auront en réalité comme objectif de permettre aux autorités de connaître les déplacements de chacun.

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