“L’euro continuera de chuter début 2012”

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La crainte d’une dégradation des Etats de la zone euro a fait plonger l’euro sous les 1,30 dollar mercredi, une première depuis janvier. Les craintes sur l’avenir de la monnaie unique et l’assouplissement monétaire de la BCE en sont responsables, analyse Clemente de Lucia, économiste chez BNP Paribas.

Pourquoi l’euro chute-t-il ?

Parce que les conditions économiques de la zone euro ne sont pas propices à la confiance des investisseurs. Les doutes sur le manque de solutions durables affaiblissent le taux de change. Et les craintes des investisseurs se multiplient avec des sommets européens qui se suivent et qui n’accouchent décidément d’aucune solution durable.

Mais pourquoi aussi vite alors que ces craintes ne sont pas nouvelles ?

Un autre élément entre en compte, c’est la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). Dans la première partie de l’année, elle avait une politique divergente de la FED aux Etats-Unis, avec un taux directeur qui a grimpé. A présent, elle a une politique plus convergente de celle de la FED, où elle a décidé de soutenir l’économie en baissant notamment son taux directeur deux fois. Ce qui a fait forcément baisser l’attrait pour la monnaie européenne. De ce point de vue, la chute de l’euro n’est pas surprenante aujourd’hui.

A-t-on atteint un niveau trop bas ?

Historiquement, on est encore à des niveaux moyens, et même encore loin par exemple de la valeur d’équilibre entre les deux monnaies qu’on estime à 1,20 dollar. Cela fait longtemps que l’on est dans un créneau entre 1,20 et 1,40 dollar, on ne peut pas vraiment dire que l’euro atteint des niveaux trop bas aujourd’hui.

Est-ce une bonne nouvelle pour la zone euro ?

Un euro qui baisse est une bonne chose pour le commerce européen bien entendu. Mais il faut garder à l’esprit que c’est surtout la demande extérieure qui stimule les exportations. Dans le contexte actuel de crise mondiale, il faut attendre pour voir si cela sera vraiment favorable au commerce extérieur. Mais ce niveau est surtout révélateur d’une chose. Lors des deux derniers mois, on n’a pas hésité à évoquer un peu partout le scénario d’explosion de la zone euro. Mais ce que l’on remarque c’est que malgré une parité euro/dollar qui baisse mais reste à un niveau tout à fait correct, l’euro tient très bien comme devise internationale. La monnaie est le reflet d’une économie, et le moins que l’on puisse dire c’est que l’euro n’a jamais menacé de s’effondrer.

Comment voyez-vous l’évolution pour 2012 ?

Les perspectives de croissance vont être déterminantes pour le niveau de l’euro. Mais elles ne sont visiblement pas à l’avantage de l’Europe. Tous les économistes ont révisé leurs chiffres de croissance à la baisse alors qu’ils ont fait l’inverse avec les Etats-Unis, ce qui devrait forcément peser sur le niveau de l’euro à la baisse. En conséquence, je pense qu’il va continuer à chuter jusqu’à 1,28 dollar au premier trimestre. La remontée devrait se faire ensuite, à partir du deuxième trimestre ou l’euro pourrait toucher les 1,35 dollar, voire même davantage lors des trimestres qui suivront. Cela dépend aussi de la capacité des européens à trouver une solution face aux difficultés qu’ils rencontrent. S’il y a une vision claire de sortie de crise, la confiance sera rétablie et l’euro reprendra des forces.

Propos recueillis par Ali Bekhtaoui, L’Expansion.com

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