L’empereur du Japon bientôt retraité, la tâche sera rude pour son successeur

L'empereur Akihito pourrait renoncer à ses fonctions dès la fin de l'année 2018. © Belgaimage

L’empereur Akihito se prépare à abdiquer, après presque 30 ans de règne pendant lesquels il a su panser les plaies de l’archipel. La tâche sera rude pour son neveu Naruhito, qui doit lui succéder.

Le contraste est frappant. Tokyo, l’une des mégapoles les plus modernes de la planète, possède des robots serveurs de sushis, des toilettes à multiples fonctions et des trains à grande vitesse. Mais, en plein centre de la ville, derrière des murailles et des douves, se niche l’enclave boisée du palais impérial, où vit la plus vieille monarchie du monde. La famille est placée sous l’autorité de l’empereur, qui, selon la tradition shinto, descend de la déesse du soleil et doit accomplir des devoirs et des rites religieux tels que la plantation du premier riz de l’année.

En 2018, la préparation de l’abdication de l’empereur Akihito, qui aura fêté son 84e anniversaire au tournant de l’année, sera l’occasion pour le Japon d’une réflexion sur le rôle traditionnel de la famille impériale. L’empereur, qui renoncera à ses fonctions en mars 2019 ou peut-être même dès la fin de 2018, sera le premier à abdiquer en deux siècles et, en passant la main à son fils, il inaugurera une nouvelle ère.

Une institution controversée

Naruhito, qui aura 57 ans en 2018, aura fort à faire pour être à la hauteur de son père. Ayant hérité d’une institution impopulaire et controversée quand il a été intronisé, en 1989, l’empereur aux cheveux gris et au regard pétillant a su se forger un nouveau rôle. L’obligation de servir son père, l’empereur Hirohito, qui était considéré comme un dieu vivant, avait motivé et justifié les agressions militaires japonaises. C’est elle aussi qui a mené le pays à la défaite et à la destruction à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Akihito s’est attaché à panser les plaies. Bien qu’il soit interdit à l’empereur d’exercer des fonctions politiques, il a habilement étendu le champ de ses activités. Au cours de ses voyages en Asie, il a présenté des excuses pour les agissements du Japon en temps de guerre, contrairement à beaucoup de responsables politiques japonais qui pensent que le pays n’a rien fait qui justifie des excuses. Nul ne doute désormais de l’esprit libéral d’Akihito, qui, selon des personnes bien informées, ne tient pas en haute estime les dirigeants japonais.

Sur la scène intérieure, il a gagné la confiance du peuple en offrant une image plus accessible de la monarchie. La famille impériale apparaît rarement en public et, quand elle le fait, elle doit agir selon les instructions de l’Agence de la maison impériale, l’organisme public chargé de sa gestion.

Naruhito ressemble, dit-on, à son père. Mais il aura du mal à renvoyer la même image d’ojisan (grand-père) de la nation. Pour commencer, les politiciens les plus va-t-en-guerre voudront l’en empêcher. Leur visée est de revenir à l’époque où l’empereur avait un rôle bien plus important que celui, purement symbolique, de célébrer des cérémonies, ainsi que le définit la Constitution de l’après-guerre, rédigée par les Américains.

La famille impériale pourra voir sa popularité décliner sans que cela fasse du Japon une république. Mais elle n’en est pas moins confrontée à un sérieux problème : l’absence d’héritiers. La famille ne compte aujourd’hui que 18 membres et la majorité ne peuvent prétendre régner car ce sont des femmes. Un seul des quatre héritiers, Hisahito, le neveu de 11 ans de Naruhito, est jeune. Le Japon pourrait donc avoir à rouvrir le débat sur la possibilité pour des princesses mariées à des roturiers de continuer à faire partie de la famille (actuellement, elles en sont exclues) ou celle pour des femmes de devenir impératrice – un changement qui, aux yeux des conservateurs, salirait l’institution.

Mais l’actualité japonaise de 2018 ne se réduira pas à des intrigues de palais. Shinzo Abe, le Premier ministre, s’est assuré une large victoire aux élections anticipées de la chambre basse d’octobre. Bien que l’électorat commence à se lasser de lui (beaucoup lui ont accordé leur suffrage parce qu’il n’y avait pas d’autres candidats sérieux), Shinzo Abe a conduit le Parti libéral-démocrate à la victoire aux trois dernières élections générales. Il semble bien placé pour remporter un troisième mandat de chef du parti en 2018. Si tel est le cas, il sera probablement réélu à la tête du gouvernement à la fin de 2019 et restera dans l’Histoire comme le Premier ministre de l’après-guerre étant resté le plus longtemps au pouvoir.

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