L’agriculture française, un poids lourd en grande difficulté

© AFP/Jean-Christophe Verhaegen

En perte de vitesse depuis plus de 30 ans, l’agriculture française reste un poids lourd au niveau européen mais traverse une grave crise liée à la chute des prix payés aux producteurs, dans l’élevage, les céréales et les légumes.

Depuis plusieurs semaines, les agriculteurs multiplient les actions de protestation dans toute la France, réclamant des aides et des réformes pour atténuer leurs difficultés.

“Il faudrait peut-être se réveiller au niveau du gouvernement parce que les agriculteurs ne pourront pas se permettre de tenir comme ça”, dénonce un jeune agriculteur dans l’est de la France.

Depuis 1980, la part de l’agriculture et des industries alimentaires dans l’activité économique française a chuté de plus de moitié, essentiellement à cause de la baisse des prix des produits agricoles depuis 25 ans.

Selon les dernières données disponibles, l’agriculture et l’agroalimentaire ne pesaient en 2014 que 3,5% du produit intérieur brut (PIB), contre plus de 6% en 1980. Et le secteur représentait moins de 5,5% des emplois, avec 1,42 million de salariés et non-salariés travaillant dans l’agriculture et l’agroalimentaire.

A l’instar de ce qui se passe ailleurs en Europe, la tendance reste la même depuis 30 ans: les petites exploitations ont tendance à disparaître au profit de structures moins nombreuses mais plus grandes.

La France a perdu plus de la moitié de ses exploitations en 25 ans. Selon le dernier recensement en date de 2010, il y a 490.000 fermes dans l’Hexagone alors qu’il y en avait encore plus d’un million à la fin des années 80, et 664.000 en 2000.

Dans la foulée, la superficie moyenne des exploitations s’est accrue de 13 hectares en 10 ans, pour atteindre 56 hectares en moyenne. Le paysage agricole reste néanmoins morcelé avec 20% de très grandes exploitations (au moins 100 hectares) et 30% de très petites (moins de 10 hectares).

A la peine sur le marché mondial

Les filières d’élevage (lait, boeuf et porc) ont vu leurs prix s’effondrer en 2015 en dessous de leurs coûts de production mettant les éleveurs dans des situations intenables.

Les céréaliers, plutôt privilégiés jusqu’à une période récente, sont touchés de plein fouet par la chute des cours mondiaux du blé.

Les maraîchers souffrent de la dégringolade des prix des légumes, arrivés en masse et précocément sur les étals à cause de l’hiver très doux, alors que la demande des consommateurs n’est pas à la hauteur.

La question de l’évaluation précise des revenus suscite des crispations dans le secteur. En décembre, l’institut national de la statistique Insee a pronostiqué une hausse de près de 9% du revenu agricole moyen pour 2015, tablant sur une baisse des coûts de production (aliments pour animaux, énergie, engrais) et sur une nette hausse des subventions. Une évaluation jugée “incompréhensible” par les principaux syndicats et organisations du secteur.

Les éleveurs laitiers s’attendent à une chute drastique de leurs revenus, de 40 à 50%, selon la Fédération nationale des producteurs de lait.

“On ne demande pas de chèque, on ne veut pas l’aumône” mais de “vraies réformes structurelles”, explique Jérôme Matthieu, producteur de lait à qui les industriels annoncent un prix de 27 centimes d’euros le litre contre 38 il y a quelques années.

L’Hexagone reste la première puissance agricole en Europe, même si sa part en valeur (18%) dans la production agricole de l’Union européenne (UE) a diminué depuis 2000, notamment en raison de l’arrivée de la Roumanie et la Pologne au sein des 28 de l’Union européenne.

A 75 milliards d’euros en 2014, la production agricole française devance de loin celles de l’Allemagne (58 milliards), de l’Italie (54 milliards) et de l’Espagne (43 milliards).

Néanmoins, la France ne cesse de perdre des parts de marché dans le commerce alimentaire mondial.

En quelques années, elle est passée de la place de 2e exportateur agroalimentaire, au 5e rang, derrière les États-Unis, l’Allemagne, les Pays-Bas et le Brésil. Elle est championne dans l’exportation de blé, d’alcool et de semences, mais beaucoup reste à faire dans la viande ou les fruits et légumes.

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