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“Il est plus que temps de retisser les liens entre le PS et le MR”

Au lendemain de la restructuration annoncée chez Caterpillar, Charles Michel avait une nouvelle fois évoqué son projet d’un “pacte national d’investissement”, idée soutenue, une fois n’est pas coutume, par le PS. La gravité du secteur économique oblige à agir et à se reparler, et éviter de tomber dans des guéguerres politiciennes. La situation actuelle nécessite des investissements publics… et politiques.

Trois mille emplois passent à la trappe et ce n’est sans doute qu’un début pour le secteur bancaire. Sur le banc des accusés : la numérisation. Celle-ci rend effectivement un certain nombre de métiers obsolètes. Mais elle en génère d’autres. Peut-être pas autant et, malheureusement, sans doute pas pour les mêmes personnes. Mais, à terme, les emplois créés ici devraient compenser une bonne partie de ceux détruits là-bas. La numérisation peut conduire à une sorte de jeu à somme nulle, socialement acceptable, voire bénéfique. A condition toutefois de ne pas laisser la main invisible du marché guider seule la transition.

Un défi de taille pour les pouvoirs publics. Il implique des efforts de formation et d’orientation vers les nouveaux métiers, une organisation du travail plus souple – et oui, si vous recevez mardi le colis commandé en ligne lundi, c’est que des gens ont travaillé la nuit, des horaires repensés et vraisemblablement réduits (intégrer la semaine des quatre jours dans le débat peut aider à dégager des solutions innovantes) et des investissements dans les infrastructures collectives.

Le pacte national d’investissements suggéré par Charles Michel est au coeur d’un intéressant Stratego politique.

Attardons-nous sur ce dernier point car il est au coeur d’une intéressante partie de Stratego politique. Au lendemain de l’annonce de la fermeture de Caterpillar-Gosselies, le Premier ministre Charles Michel a lancé l’idée d’un pacte national d’investissements. Certes, pour l’heure, le dossier est encore vide mais, pour la première fois en deux ans, le parti socialiste a embrayé positivement sur une initiative du MR. Et on note que les deux partis prennent soin d’esquiver l’affrontement trop direct sur les multiples plans de restructuration annoncés ces derniers temps ; que Paul Magnette et Charles Michel ont pu tenir une conférence de presse commune sans se titiller l’un l’autre ; qu’Olivier Chastel et Elio Di Rupo ont repris des contacts informels réguliers.

Que signifie tout cela ? Tout simplement que le PS et le MR sont des partis de pouvoir, que l’un est malade de ne plus être présent au gouvernement fédéral où se gère toujours la sécurité sociale et que l’autre supporte de moins en moins sa longue mise à l’écart des exécutifs régionaux. Alors, il est plus que temps de retisser des liens. Le Premier ministre a eu le nez fin en saisissant l’occasion Caterpillar pour ce faire.

Le timing politique est parfait : la gravité de la situation économique oblige à agir, sans tomber dans les guéguerres politiciennes, tandis que les sondages poussent les deux plus grands partis francophones à se reparler. D’un côté, la chute du PS conjuguée au déclin du cdH et d’Ecolo hypothèque les majorités de gauche (du moins tant que le triomphant PTB refuse l’exercice du pouvoir) ; de l’autre, le MR vit une situation paradoxale : sa relative stabilité électorale indique que l’alliance avec la N-VA satisfait les électeurs mais n’en attire pas de nouveaux. Plus que jamais, les réformateurs doivent redevenir ” fréquentables ” pour au moins un allié francophone. Et tant qu’à faire pourquoi ne pas opter pour le plus grand de ces partis ?

C’est pourquoi, sans le dire et même en jurant le contraire, le PS et le MR replacent des pions l’un vers l’autre dans cette partie de Stratego, dont l’issue pourra peut-être s’entrevoir dès les élections communales et provinciales de 2018. Un rapprochement risqué. Les réformateurs sentent le souffle de leur principal partenaire, la N-VA, qui a fait du maintien des socialistes dans l’opposition sa priorité et les socialistes celui du PTB, qui n’attend que cela pour montrer qui est ” le vrai parti des travailleurs “. Bref, la consistance que Charles Michel parviendra, ou pas, à mettre dans son projet de pacte national d’investissements aura autant de répercussions politiques qu’économiques.

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