Grèce: la balle dans le camp des autorités européennes, vers une sortie de crise?

Tsipras et Juncker. © REUTERS

Le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, a estimé lundi soir, à l’issue d’un sommet de la zone euro, que la balle était désormais “dans le camp des autorités européennes” pour trouver un accord cette semaine évitant au pays le défaut de paiement.

“J’ai la sensation que (…) la balle se trouve dans le camp des autorités européennes”, a dit M. Tsipras devant la presse, à l’issue du sommet au cours duquel ont été débattues les nouvelles propositions soumises par Athènes à ses créanciers (Commission, BCE, FMI).

“Notre critère de base, c’est la justice sociale”, a-t-il affirmé, comme s’il rodait ses arguments pour défendre devant le Parlement grec l’accord souhaité, dans un pays profondément éprouvé par la crise.

“Pour la première fois, le poids ne reposera pas sur les salariés et les retraités. Nous protégeons les pensions et les salaires, nous protégeons les familles moyennes, et pour la première fois le poids reposera sur ceux qui en ont la capacité, pour sortir définitivement de cette crise que nous subissons depuis cinq ans”, a ajouté M. Tsipras.

“Notre proposition a été acceptée comme base de discussion par les institutions (créancières, ndlr). Les négociations continueront les deux prochains jours”, a-t-il continué.

“On ne veut pas d’un accord fragmenté et limité dans le temps. On veut une solution complète et viable, accompagnée d’un paquet fort de croissance, qui rendra viable l’économie grecque et la capacité du pays de rester sur ses pieds”.

Après une réunion “franche et utile”, chaque heure va compter cette semaine

La réunion des chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro lundi soir a été l’occasion d’une “discussion très franche et très ouverte”, et le débat sur la situation de la Grèce justifiait pleinement cette réunion utile, a indiqué le Premier ministre Charles Michel à l’issue du sommet. Les propositions concrètes soumises par la Grèce sont “un bon pas dans la bonne direction”, a répété Charles Michel, mais désormais “chaque heure compte” jusqu’à la fin de la semaine et la conclusion, espérée pour jeudi, d’un accord entre la Grèce et ses créanciers (UE, Fonds monétaire international, Banque centrale européenne).

“Probablement, nous vivons des moments importants non seulement pour la zone euro, mais aussi pour l’Europe entière”, a déclaré le Premier ministre, qui pointe trois points de fragilité pour l’Europe dans les prochains mois: la situation de la Grèce, le débat sur la relation entre le Royaume-Uni et l’UE et la situation sécuritaire aux frontières de l’Union (particulièrement en Ukraine et en Libye).

Le débat sur une éventuelle restructuration de la dette grecque, que demande le gouvernement d’Athènes, ne peut pas être mené tant que la confiance n’a pas été recréée, a commenté Charles Michel. Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a été plus catégorique: “ce n’est pas le moment”, a-t-il asséné.

Athènes accepte le principe d’une prolongation de son plan d’aide

La Grèce, menacée d’un défaut de paiement et dont l’avenir est au menu d’un sommet exceptionnel à Bruxelles, a accepté le principe d’une prolongation de son plan d’aide actuel, a-t-on appris lundi soir de sources gouvernementales grecques.

“Pour la première fois, nous acceptons l’extension du programme comme seul moyen d’avancer” dans les négociations avec les créanciers – Union européenne et FMI-, a déclaré cette source en marge du sommet exceptionnel des 19 pays de la zone euro qui s’est ouvert à 17H00 GMT (19H00 HB) dans la capitale européenne.

“On ne sait pas combien de temps le programme sera prolongé”, a indiqué une deuxième source grecque.

Le deuxième plan d’aide pour la Grèce, accordé en 2012, a déjà été prolongé à deux reprises, en décembre 2014 puis en février côté européen. Le FMI est lui engagé jusqu’en mars 2016.

La dernière prolongation de ce programme a donné lieu à des semaines d’âpres négociations en février, entre les créanciers et Athènes, qui voulait à tout prix tourner la page de l’austérité.

Ce plan d’aide prend fin le 30 juin. Pour les créanciers européens, l’idée d’une extension est sur la table depuis plusieurs semaines, sans précision sur la durée envisagée. Tant qu’elle est sous le programme d’aide de ses créanciers, la Grèce peut continuer à recevoir l’aide de la Banque centrale européenne pour ses banques, qui est de plus en plus vitale face à une accélération des retraits des épargnants ces derniers jours.

Restructuration de la dette grecque: les leaders européens bottent en touche

Les leaders européens réunis à Bruxelles sont restés évasifs lundi sur l’épineuse question d’une restructuration de la dette grecque, une demande de Syriza qui rencontre des échos différents selon les capitales.

“Ce n’est pas la question la plus urgente”, a lancé la chancelière allemande Angela Merkel à propos d’un éventuel rééchelonnement de l’énorme dette publique, pesant quelque 180% du Produit intérieur grec.

Mme Merkel, confrontée à une opinion publique très hostile à toute remise de dette à la Grèce, a assuré qu’une restructuration n’était “pas en débat”.

Le patron de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a lui déclaré que “ce n’était pas le moment de discuter” de la dette.

Le sommet européen lundi a pris acte d’un rapprochement entre Athènes et ses créanciers, tout en constatant qu’il restait beaucoup de travail à faire sur la trajectoire budgétaire et les réformes en Grèce, avant de débloquer une aide de quelque 7 milliards d’euros dont le pays a cruellement besoin.

Soucieux également de ne pas perturber ces progrès encore fragiles, le président français François Hollande a dit à la presse que “sur l’allongement des délais ou le reprofilage de la dette, cela ne pourrait venir que dans une seconde étape.”

Selon lui “ce sujet de la dette n’est pas dans la discussion” actuellement, mais “cela doit être indiqué comme étant une étape ultérieure”.

“Cela fait partie de ce qui doit être à un moment abordé”, après qu’un accord serait trouvé sur le court terme avec Athènes, a-t-il encore assuré.

Sur cette question de la dette, la France est depuis le départ mieux disposée que l’Allemagne à l’égard de la Grèce. A Paris, on souligne que le sujet a une importance politique très grande pour le Premier ministre Alexis Tsipras, qui avait fait campagne sur un effacement des créances, et qui devra faire valider dans les prochains jours par son Parlement tout accord avec ses créanciers.

M. Tsipras a une nouvelle fois réclamé mardi, après le sommet, une “dette viable”.

De source grecque, on assurait “ne pas voir comment les institutions (la BCE, la Commission et le FMI) pourraient ne pas aborder le sujet” dans l’accord attendu prochainement.

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