Gaz : cinq fournisseurs ” hors-la-loi “

© ThinkStock

Le gouvernement prépare une loi “interprétative” afin de balayer l’argument avancé par les fournisseurs d’énergie. Les hausses de tarifs du 1er avril seront bien illégales.

Mandatée par Johan Vande Lanotte (ministre SP.A de l’Economie) et Melchior Wathelet (secrétaire d’Etat CDH en charge de l’Energie), l’Inspection économique a rendu son rapport ce mercredi matin. Aucune révélation fracassante, mais une clarification, nécessaire, de la situation. A la date du 1er avril 2012, aucun fournisseur n’a indexé, à la hausse, ses tarifs pour l’électricité, respectant ainsi la loi du 29 mars 2012 instaurant un gel des tarifs énergétiques pour une durée de neuf mois, à compter de ce fameux 1er avril.

Pour le gaz, par contre, c’est autre chose. Electrabel et Luminus avaient ouvert le bal avec fracas, la semaine dernière, en annonçant une augmentation de leurs tarifs, de l’ordre de 3 %. La dernière indexation à la hausse autorisée, selon eux, ce 1er avril, tout juste avant l’entrée en vigueur du gel tarifaire. De quoi faire hurler les ministres concernés, dénonçant une manoeuvre illégale, qui ne respecte pas l’esprit de la loi. Outre la rédaction d’un état des lieux, l’Inspection économique est aussitôt chargée de convaincre les fournisseurs de faire machine arrière. Menace à la clef, le gouvernement affichant sa volonté de traîner les récalcitrants devant le tribunal du commerce.

Pas encore de guerre judiciaire
Du rapport de l’Inspection, il ressort que cinq des douze fournisseurs de gaz ont revu leurs tarifs à la hausse, se mettant ainsi en infraction avec la loi, selon le gouvernement. Electrabel et Luminus, donc, mais aussi Ebem, Essent et Nuon – ce dernier semblant se ménager une porte de sortie, relève l’administration. “Melchior Wathelet s’est vraiment senti floué, insiste-t-on au cabinet du secrétaire d’Etat. Il a reçu lui-même la Febeg, la fédération des producteurs et des fournisseurs d’énergie, ainsi que Grégoire Dallemagne, le patron de Luminus, le 13 mars. Avec un message clair : une indexation à la date du 1er avril est interdite. Pour nous, les fournisseurs cherchaient à tout prix un moyen pour indexer leurs tarifs. Pour ce faire, ils ont interprété l’article 108 de la loi, d’une manière tirée par les cheveux. Cette disposition était prévue uniquement afin de permettre aux fournisseurs qui, ayant baissé leurs prix durant le gel, souhaitaient les revoir à la hausse suite à un changement du marché, tout en ne dépassant pas les prix pratiqués au 1er avril, évidemment. Nous n’étions pas obligés de prévoir ce mécanisme ; nous l’avons mis en place pour être corrects jusqu’au bout vis-à-vis des fournisseurs.” Avec le résultat que l’on connaît.

Pour l’heure, le gouvernement ne déterre pas encore la hache de guerre judiciaire. Les cabinets Vande Lanotte et Wathelet travaillent d’arrache-pied à l’élaboration d’une loi “interprétative” destinée à battre en brèche l’interprétation des fournisseurs, avec effets rétroactifs au 1er avril 2012. Caricaturons : de quoi rendre les indexations, déjà considérées comme illégales, “encore plus illégales”. “L’objectif est de présenter ce projet de loi au premier conseil des ministres de la semaine prochaine, poursuit-on au cabinet Wathelet. Nous demanderons en urgence l’avis du Conseil d’Etat puis passerons devant le Parlement. Cela devrait aller très vite. Une loi interprétative nous paraît la piste la plus sûre et nous travaillons toujours dans une optique constructive, le but initial étant de pacifier le milieu.” Ce n’est qu’en cas d’entêtement d’un fournisseur qu’une action en justice deviendrait inévitable. On en arrivera sans doute pas là, espère-t-on au cabinet. “Puisque les fournisseurs seraient sûrs de perdre.”

Benoît Mathieu

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content