Draghi et la BCE sont-ils enfin prêts à tout pour soutenir la croissance ?

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Le président de la Banque centrale européenne ne cache pas son inquiétude face à la récession qui s’aggrave dans la zone euro. Il se dit prêt à agir mais cherche des moyens efficaces. Car l’arme des taux d’intérêt n’est plus qu’un pétard mouillé.

L’heure n’est pas à l’optimisme. Alors que la Commission européenne table déjà sur une baisse de 0,3% du PIB en 2013 dans la zone euro, et que le taux de chômage atteint le niveau record de 12%, la Banque centrale européenne n’écarte pas la possibilité d’une récession plus forte que prévu. Si une reprise graduelle est attendue dans la deuxième partie de l’année, elle est sujette à ” des risques à la baisse “, a déclaré le président Mario Draghi lors de sa conférence de presse mensuelle à Francfort. Parmi ces risques, “une demande intérieure plus faible qu’attendu” ou encore des réformes structurelles insuffisantes dans les pays de la zone euro.

En conséquence, la BCE se dit “prête à agir” et examine “divers instruments” grâce auxquels elle pourrait soutenir l’économie. “Nous devons réfléchir intensément pour trouver quelque chose qui soit à la fois utile et compatible avec notre mandat”, a précisé son président, et “prendre en compte l’expérience d’autres pays”.

L’arme des taux d’intérêt s’est enrayée L’arme habituelle de la baisse de taux ne fonctionne plus. Le principal taux directeur de l’institution a beau avoir été abaissé à 0,75%, soit son plus bas niveau historique depuis juillet 2012, cela n’a guère contribué à relancer le crédit et l’activité économique dans la région. Au contraire, le coût du crédit pour les Petites et moyennes entreprises (PME) dans les pays en crise s’est encore enchéri. La BCE a d’ailleurs décidé jeudi de ne pas toucher à ses taux.

“Ce n’est pas le niveau du taux directeur le principal problème, mais le fait que les taux de crédit dans la périphérie (les pays en difficulté, ndlr) ne reflètent pas la politique de taux bas” pratiquée par la BCE, note Michael Schubert, économiste chez Commerzbank.

Le président de la BCE Mario Draghi est conscient de la situation. Il s’est même ému à plusieurs reprises du défaut de transmission de sa politique monétaire. Mais sans esquisser jusqu’ici de solution à ce problème. Le changement intervenu ce jeudi est donc à relever. Car ” super Mario ” a cette fois assuré chercher de l’inspiration “à 360 degrés”, c’est-à-dire partout.

Vers de nouvelles mesures non conventionnelles ? La Banque d’Angleterre rachète par exemple directement des titres d’entreprises, la Banque du Japon a décidé jeudi d’accélérer et d’amplifier ses mesures d’assouplissement monétaire et d’augmenter ses achats d’obligations d’Etat. La Fed américaine mène également actuellement une politique monétaire ultra-accommodante pour accompagner la reprise économique aux Etats-Unis.

Mais ce serait “franchir un nouveau Rubicon”, juge Carsten Brzeski, économiste d’ING, prédisant des remous en son sein. Une telle action devrait en effet susciter l’opposition virulente de certains de ses membres, dont la Banque centrale allemande, qui n’a toujours pas digéré le programme de rachat de dette publique adopté en mai 2010, ni sa nouvelle version de septembre 2012, même si celle-ci n’a encore jamais été mise en application.

De nouvelles mesures non-conventionnelles devront impliquer “d’autres acteurs”, a encore dit Mario Draghi, citant les gouvernements, et les banques centrales nationales. Il en a profité pour exhorter une nouvelle fois les pays de l’union monétaire à continuer leurs efforts en matière de réformes et de redressement de leur budget.

Interrogé sur la difficulté des entreprises à accéder au crédit dans les pays en crise de la région, notamment pour leurs Petites et moyennes entreprises (PME), M. Draghi a encore averti que “la BCE ne (pouvait) pas remplacer le manque d’action des gouvernements” sur ce front, tout comme elle ne peut pas remplacer le “manque de capital dans le système bancaire”. “L’une de nos mesures exceptionnelles permet déjà aux banques de prêter aux entreprises et d’utiliser ces titres de créances comme garanties pour se refinancer en liquidités auprès de la BCE. Cela fonctionne merveilleusement dans certains pays et pas du tout dans certains pays de la périphérie, nous devons comprendre pourquoi, suivre cela de près”, a-t-il dit.

Egalement interrogé sur la crise chypriote et sur ses éventuelles conséquences pour l’ensemble de la zone euro, M. Draghi a souligné à plusieurs reprises que le cas chypriote n’était en aucun cas un modèle de résolution de crise applicable à d’autres pays.

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