Donald Trump déclare la guerre (commerciale) au Canada

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Donald Trump a lancé une offensive tous azimuts contre le Canada, imposant des taxes sur le bois de construction et menaçant de le faire contre les produits laitiers, déclarant la guerre commerciale au principal partenaire économique des Etats-Unis.

Après avoir imposé lundi soir des taxes à l’importation du bois de construction canadien, le président américain a tweeté mardi à l’aube: “Le Canada a rendu l’activité de nos producteurs laitiers du Wisconsin et d’autres Etats frontaliers très difficile. Nous ne tolérerons pas cela. Vous allez voir”.

Trudeau promet la fermeté face à Trump

Le Premier ministre canadien a de son côté promis une réponse ferme à Donald Trump. “Je suis poli mais je suis aussi très ferme dans la défense des intérêts du Canada”, a déclaré Justin Trudeau dans un entretien à la chaîne CTV News.

“Nous allons engager respectueusement, mais fermement” un dialogue avec les Etats-Unis pour leur démontrer la complexité de l’intégration des deux économies frontalières, a indiqué le chef du gouvernement canadien.

Les ministres canadiens ont multiplié les déplacements auprès de l’administration Trump depuis la fin janvier et le dossier commercial avec les Américains a été confié à la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland.

“Nous allons travailler ensemble” pour trouver une solution à ces différends économiques, a souligné Justin Trudeau en minimisant l’importance du discours musclé de Donald Trump.

Un vieux dossier

Les disputes “sur les questions du lait et du bois de construction durent depuis bien avant que mon père soit Premier ministre”, soit à la fin des années 1960, a rappelé Justin Trudeau. “Ce sont des problèmes récurrents dans une relation importante et complexe entre le Canada et les Etats-Unis”, a-t-il ajouté.

Sur ces dossiers, “le président Trump a la même position qu’avait le président Obama”, a dit le Premier ministre canadien.

Justin Trudeau a rassuré les producteurs de lait en indiquant que son gouvernement était derrière eux et défendait l’industrie agro-alimentaire. “Nous savons combien (l’industrie laitière) est importante pour le Canada”, a-t-il conclu.

Les relations entre le président républicain et le Premier ministre canadien Justin Trudeau semblaient pourtant plutôt bonnes. Mais, fidèle à ses promesses de campagne, M. Trump est passé à l’offensive contre des accords commerciaux qui, selon lui, désavantagent les Américains.

Réunis, avec le Mexique, par l’Accord de libre-échange nord-américain (Aléna), les Etats-Unis et le Canada ont un volume d’échanges commerciaux annuel de près de 545 milliards de dollars, se traduisant, selon les chiffres américains, par un déficit de 11,2 milliards de dollars aux dépens de Washington.

Mais en frappant le bois de construction, appelé bois d’oeuvre au Canada, Donald Trump réveille un vieux dossier qui divise les deux voisins depuis 35 ans.

L’ensemble des importations de bois de construction canadien aux Etats-Unis se sont élevées en 2016 à 5,66 milliards de dollars, a précisé le ministère du Commerce américain en annonçant lundi soir des taxes à l’importation allant de 3,02% à 24,12% selon les produits. Mais seulement certains, sur ce total, sont visés.

Les producteurs américains accusent leurs homologues canadiens d’exporter ce matériau aux Etats-Unis à un prix de dumping, c’est à dire inférieur aux coûts de production.

Les autorités canadiennes ont condamné l’initiative des Etats-Unis. Le gouvernement américain a cédé “aux pressions du puissant lobby forestier des Etats-Unis en se repliant vers le protectionnisme”, a déploré mardi Alexandre Cusson, vice-président de l’Union des municipalités du Québec, en estimant que l’impact financier pourrait dépasser les 200 millions de dollars pour la seule industrie forestière québécoise.

Dès lundi soir, le gouvernement canadien avait dénoncé des “droits (de douane) injustes et punitifs” sur ses exportations de bois.

Si ces mesures réjouissent les producteurs américains de bois, elles inquiètent le secteur de la construction. Selon certaines estimations, le coût de construction d’une maison aux Etats-Unis pourrait augmenter de 12% en raison des taxes.

Le lait en ligne de mire

Le Mexique semblait jusqu’à présent la cible privilégiée de Donald Trump, mais il a donc choisi de tourner plutôt dans l’immédiat ses canons commerciaux vers son voisin septentrional.

Le secrétaire au Commerce américain Wilbur Ross a résumé la situation lundi soir en affirmant que “cela a été une mauvaise semaine pour les relations commerciales américano-canadiennes”.

“Lundi dernier, il est apparu que le Canada veut bloquer le dernier produit laitier exporté des Etats-Unis. Aujourd’hui, dans un dossier différent, le département du Commerce a déterminé qu’il y avait besoin d’imposer des droits compensateurs sur environ un milliard de dollars d’exportations canadiennes de bois de construction vers chez nous. Ce n’est pas notre idée d’un accord de libre-échange qui fonctionne bien”, a-t-il asséné.

Car le lait est un autre des dossiers que l’administration américaine veut mettre sur la table.

Déjà la semaine dernière, alors qu’il était en visite dans le Wisconsin, un Etat du nord des Etats-Unis grand producteur de lait et de fromage, Donald Trump avait qualifié de “honteuses” des mesures canadiennes de limitation des importations de concentré de protéines de lait.

Celles-ci placent les producteurs de lait américains dans une situation difficile alors que les Canadiens affirment qu’elles ne visent qu’à enrayer les effets d’une surproduction de l’autre côté de la frontière.

Ces salves américaines entrent dans le cadre du souhait de Donald Trump de renégocier l’Aléna. Il a dénoncé pendant la campagne cet accord conclu en 1994, le qualifiant de “désastre” pour l’économie américaine et l’accusant de la disparition de millions d’emplois.

Cette offensive menace aussi d’autres secteurs et partenaires. M. Trump a notamment évoqué la semaine dernière de possibles mesures dans le secteur de l’acier, affirmant que la baisse de la production nationale du fait de la hausse des importations menaçait la sécurité nationale du pays.

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