Cliquet inversé : la fausse bonne idée ?

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Selon la fédération pétrolière belge, ce mécanisme a un impact trop limité sur le prix à la pompe pour être efficace.

Jamais le plein d’essence n’avait pesé aussi lourd dans le budget des ménages belges. Dans la foulée des révolutions arabes, le prix maximum de l’essence 95 est passé à 1,624 euro par litre. Les états-majors des partis politiques n’ont pas tardé à réagir. Guy Vanhengel, ministre (Open VLD) du Budget, a tiré le premier, en ressortant des tiroirs le cliquet inversé.

Ce mécanisme compense l’augmentation de la TVA par une diminution du montant des accises lorsque le carburant atteint un seuil maximum (1,50 euro/l pour l’essence et 1,10 euro/l pour le diesel). Activé en 2007 et 2008 lors d’une précédente flambée des prix pétroliers, il a été abandonné lors de la confection du budget 2009. Le gouvernement se penche aujourd’hui sur l’opportunité de ressusciter cette mesure censée protéger notre pouvoir d’achat.

Mauvais signal aux pays producteurs de pétrole

Séduisante, l’idée n’a pas que des supporters. Le ministre des Finances Didier Reynders (MR) s’est lui-même montré circonspect, considérant que l’impact serait mineur sur les prix à la pompe. Du côté de la fédération pétrolière belge, on partage plutôt cet avis. “C’est une mesure symbolique, commente Jean-Louis Nizet, secrétaire général de la FPB. Son but est de stabiliser les hausses et les baisses de prix. Mais cela ne les évitera pas.”

Le secrétaire général prend un exemple concret. Si le prix du litre de carburant augmente de 0,05 euro, l’augmentation de la TVA est de l’ordre de 0,01 euro. En appliquant le cliquet inversé, le prix du précieux liquide n’augmentera pas de 0,06 euro, mais bien de 0,05 euro. Sur un plein de 50 litres, l’automobiliste gagne… 0,50 euro. Une différence peu perceptible du point de vue du consommateur, et qui prive les caisses de l’Etat de rentrées d’argent frais.

Plus gênant : l’application du mécanisme du cliquet inversé pourrait donner l’impression aux pays producteurs de pétrole qu’en Belgique, toute hausse des prix sera acceptée par les consommateurs et ne fera pas fléchir la demande. “Si l’Etat compense systématiquement la hausse des prix par une baisse des accises, il envoie le message aux pays producteurs qu’ils peuvent continuer à faire grimper les prix”, explique Jean-Louis Nizet.

Même si les tarifs ont connu une envolée spectaculaire, la FPB estime que la consommation de carburant ne devrait pas décroître. “Pour la première fois en 2009, nous avons connu une chute du volume des ventes, liée à la crise économique. 2010 a marqué un net regain, surtout grâce à l’activité des transporteurs.” Ceux-ci consomment du diesel professionnel, qui bénéficie chez nous d’un montant d’accises plafonné. Pour les transporteurs (environ deux tiers du chiffre d’affaires du secteur pétrolier en Belgique), le cliquet inversé n’aurait donc de toute façon aucun impact.

Gilles Quoistiaux

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