Chute de Leterme II : quelles conséquences sur l’économie ?

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Ministre du Budget à la Région wallonne et à la Communauté française, André Antoine ne décolère pas : la baisse de 9 points en une semaine de la cotation financière européenne de la Belgique entraînerait, selon lui, un coût supplémentaire de 55 millions d’euros au gouvernement fédéral. Les syndicats poussent un cri d’alarme, la Bourse paraît garder son calme… tandis que La Poste pourrait bien ne pas entrer en Bourse comme prévu.

“Le pays est pris en otage par un dossier symbolique qui doit être résolu mais les politiciens n’osent pas prendre leur responsabilité !”, déplore Jan Vercamst, président de la CGSLB, au lendemain de la démission du gouvernement Leterme II. Le président du syndicat libéral estime que cette décision est “malheureuse dans ces temps de crise économique” : “Des décisions doivent être prises. Une série de projets d’AR sont prêts et ne peuvent être signés. Ce n’est pas bon pour les travailleurs et les assurés sociaux.”

La FGTB fédérale – ses ailes wallonne, flamande et bruxelloise – se dit particulièrement inquiète de la situation politique belge et de ses potentielles conséquences sur les travailleurs, a précisé mardi le syndicat socialiste dans un communiqué. Elle lance un appel “ferme” à une “solution négociée en vue de sortir de l’impasse communautaire dans laquelle les citoyens et les travailleurs sont, malgré eux, plongés”.

“La FGTB condamne tout vote de communauté à communauté et refuse la stratégie du coup de force qu’une majorité imposerait à une minorité pour la première fois dans l’histoire de ce pays. La véritable urgence est de tenir compte du contexte de crise socioéconomique grave que nous impose le libéralisme et de pouvoir répondre aux questions essentielles qui préoccupent au plus haut point les travailleurs. Elles concernent leur emploi, leurs allocations dans le cas où ils ont été victimes d’un licenciement ou encore leur pension légale.”

Du côté du Syndicat des indépendants et des PME (SDI), on lance carrément un “cri d’alarme” : “En cette période de récession économique, les petits opérateurs économiques membres du SDI ne peuvent se payer le luxe d’une longue crise politique !” Le syndicat lance donc un appel aux partis politiques en présence ; “Il faut tout faire pour réduire au maximum l’impact négatif de l’absence de gouvernement sur notre économie !”

Pour le SDI, la chute du gouvernement ne doit pas faire oublier les importants enjeux économiques et sociaux auxquels est confronté notre pays. La fédération estime que ces problématiques sont trop graves pour pouvoir être mises au frigo pendant les mois que dureront les élections puis les négociations gouvernementales qui s’ensuivront.

En outre, “la crise politique actuelle constitue un très mauvais message pour les investisseurs étrangers, estime encore le syndicat des indépendants et des PME. Des multinationales comme Google, Microsoft ou certaines entreprises pharmaceutiques ont récemment investi de gros montants dans notre pays… Cette nouvelle crise politique qui risque de s’éterniser brisera sans aucun doute cet élan positif.”

Enfin, le SDI rappelle que notre pays fait actuellement face à d’importants défis sociaux : “Le vieillissement de la population, la croissance des soins de santé, le taux d’emploi très faible et un chômage important des jeunes handicapent la Belgique. Or, cela fait des années que la fragilité des gouvernements successifs fait obstacle à l’adoption des réformes structurelles nécessaires !”

Démission de Leterme II : les médias étrangers donnent une image approximative de la situation, prévient l’Awex

La démission du gouvernement fédéral ne nuira pas vraiment aux exportations de la Belgique. “Ce qui nuit plus à notre pays en matière d’exportation, c’est l’image approximative de la Belgique véhiculée dans les médias étrangers !”, prévient Philippe Suinen, administrateur général de l’Agence wallonne à l’exportation et aux investissements étrangers (Awex).

“Actuellement, les médias étrangers donnent l’impression que plus rien ne se passe en Belgique. Or, ce n’est pas parce qu’un gouvernement démissionne que les lois sont modifiées et les incitants aux investissements annulés !”

Ces médias développent une certaine idée de la Belgique en conflit ethnique permanent : “Ils ne font presque pas de différence entre un conflit ethnique impliquant des morts et un conflit qui fait tout de même l’objet d’un débat constant et où la violence ne s’exprime pas.” Pour l’administrateur général, c’est cette image approximative d’un pays et non la démission du gouvernement en tant que telle qui engendre une perte de la stabilité et de la confiance dans le chef d’investisseurs étrangers.

Philippe Suinen se veut donc rassurant : “La Belgique reste un pays basé sur la diversité avec des Communautés et des Régions qui continuent à fonctionner. Les acheteurs et partenaires étrangers sont intéressés par la solidité des entreprises wallonnes et par une qualité du service qui n’est pas interrompue.”

Démission de Leterme II : l’entrée en Bourse de La Poste pourrait capoter

En raison de la chute du gouvernement fédéral, l’entrée en Bourse la plus importante de l’année en Belgique, celle de La Poste, risque d’être retardée, écrit mardi De Standaard. Les banquiers craignent un scénario où de nouvelles élections seraient organisées et où la formation d’un nouveau gouvernement se ferait difficilement. De plus, on ignore l’identité des ministres qui tiendront bientôt les rênes.

Le gouvernement prévoyait de désigner un conseiller parmi la sélection effectuée par l’actionnaire privé de La Poste, CVC Capital Partners. Cela impliquait que le gouvernement intervienne dans le courant du mois de juin. D’après De Standaard, CVC Capital ne s’est jusqu’ici pas précipité pour désigner le conseiller international.

Les banquiers internationaux d’affaires sont en compétition depuis plus d’un mois pour le mandat. On guette également le nom du futur conseiller de la Nederlandse Post (TNT Post), qui souhaite également faire son entrée en Bourse.

Démission de Leterme II : le Bel 20 semble insensible à la crise belge

En cédant 0,5 % à 2.641 points mardi vers 11 h, l’indice Bel 20 semblait insensible à la crise belge. Il suivait la tendance des autres indices européens avec 14 de ses éléments dans le rouge (tous les détails ici)

Démission de Leterme II : “Déjà 55 millions supplémentaires d’intérêts d’emprunt !” (Antoine)

“Je suis fâchée et consternée”, a commenté Joëlle Milquet, présidente du cdH, à son arrivée au bureau de parti, qui est réuni depuis 11 h mardi. A ses yeux, il existe bien quelques pistes permettant d’échapper aux élections mais, pour les réaliser, il faut une volonté politique dont Joëlle Milquet doute. Comme les autres personnalités du cdH interrogées à leur arrivée rue des Deux Eglises, elle s’en est vigoureusement prise à des libéraux flamands qui ont utilisé un faux prétexte pour servir leurs intérêts partisans au détriment des mesures économiques ou en faveur de l’emploi et de la sécurité que devait prendre le gouvernement.

Ministre du Budget à la Région wallonne et à la Communauté française, André Antoine ne décolérait pas, expliquant que la baisse de 9 points en une semaine de la cotation financière européenne de la Belgique entraînerait un coût supplémentaire de 55 millions d’euros au gouvernement fédéral.

Avec son homologue bruxellois Benoît Cerexhe, il a également déploré les conséquences de la mise au placard du plan fédéral de lutte contre le chômage, qui aura des répercussions sur les politiques régionales. Secrétaire d’Etat fédéral au Budget, Melchior Wathelet a, lui, jugé “inadmissible” l’attitude de l’Open VLD, “au moment où l’on est regardé par l’Europe”.

Démission de Leterme II : les entreprises technologiques s’inquiètent du vide politique (Agoria)

Agoria demande que soit adopté un paquet minimal de mesures d’urgence visant à aider les entreprises à traverser cette période difficile sans subir de nouvelle détérioration de leur situation; a réagi mardi la fédération de l’industrie technologique au lendemain de la chute du gouvernement Leterme.

“Avant tout, il est absolument indispensable que l’actuel paquet de mesures anticrise (parmi lesquelles le chômage temporaire des employés), qui est en vigueur jusqu’à la fin de juin, soit prolongé jusqu’à la fin de l’année, estime Agoria. En outre, le gouvernement doit mettre en oeuvre un certain nombre de mesures visant à maintenir à niveau l’octroi de crédits aux entreprises. L’assurance-crédit, également, doit être garantie. L’offre des assureurs-crédit privés est actuellement insuffisante car ceux-ci se basent dans une trop grande mesure sur les résultats des entreprises en 2009, y compris pour les entreprises structurellement saines.”

Enfin, “notre pays doit, avant la fin juin, introduire auprès des instances européennes son plan national pour la réalisation de l’objectif de 13 % d’énergies renouvelables. La réglementation relative au prolongement de la durée de vie des centrales nucléaires n’est pas encore achevée non plus. Ce sujet également revêt une grande importance pour les entreprises.”

Trends.be, avec Belga

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